ANTIPORNO (アンチポルノ) de Sono Sion (2016)

ANTIPORNO

Titre original : アンチポルノ
2016 – Japon
Genre : Érotique
Durée : 1h16
Réalisation : Sono Sion
Musique : –
Scénario : Sono Sion

Avec Tomite Ami, Tsutsui Mariko, Asami, Fujiko, Fukuda Ami, Ishibashi Honoka et Takayama Yûya

Synopsis : Kyoko est artiste et romancière. Elle s’enferme dans une pièce peinte avec des couleurs rayonnantes. Minute par minute, elle s’acquitte de ses tâches qui lui sont envoyées par son agent, Noriko.

Cela fait trois ans que j’ai vu Antiporno pour la première fois, trois ans que je dois écrire dessus. Trois ans que je n’ai pas aligné un mot. L’œuvre ne m’avait pas conquise, loin de là. Mais je n’avais pas détesté pour autant. Des émotions conflictuelles. Mais comme j’ai un grand cœur, j’ai décidé de lui laisser une seconde chance, et puisque le film est sorti par miracle en France, grâce à l’éditeur Elephant Films qui s’est fait plaisir en sortant non pas un, mais toute la collection des films du revival du Roman Porno par la société Nikkatsu, j’ai décidé qu’il fallait saluer l’initiative, et j’ai donc acheté Antiporno, ainsi que White Lily, l’effort de Nakata Hideo (Ring, Dark Water) dans le genre, que j’avais bien aimé lui. Puis le Blu-Ray a traîné dans ma collection, attendant sagement sa seconde chance. Moi, j’appréhendais. Allais-je aimer ? Allais-je détester ? Mon avis serait-il toujours flou et indécis ? Il était temps d’en avoir le cœur net, et après tout, j’aime le cinéma de Sono Sion. Pas tout, The Virgin Psychics, c’était quand même bien naze. Mais à côté, je ne peux nier que Suicide Club fut un choc en 2002, tout comme sa fausse suite en 2005. Que Love Exposure reste un de mes films favoris, que Cold Fish était une méchante claque dans la face. Il était temps de réhabiliter Antiporno, unique film du réalisateur de 2016, après une année 2015 débordante et du coup, forcément très inégale (Shinjuku Swan que je n’ai pas vu, Love & Peace qui était sympathique, Tag que j’avais aimé, The Whispering Star que je n’ai pas vu, et The Virgin Psychics que j’ai donc détesté de bout en bout). Verdict 1h15 après la courte vision ? Et bien non, je ne sais toujours pas quoi penser. Je n’arrive pas à vraiment aimer Antiporno, mais je n’arrive pas à le descendre non plus. Dilemme ! Pourquoi je n’arrive pas à faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre de la balance ? Antiporno, film extrême ? Même pas au final ! Film d’auteur et film artistique, oui totalement. Roman porno ? Hmm ça se discute aussi au final.

Antiporno, c’est donc l’essai de Sono Sion dans le genre, lui qui avouait n’avoir aucune affinité particulière avec le genre, contrairement aux autres réalisateurs du projet, mais qui accepta malgré tout contre sa liberté quasi totale, avec comme seule contrainte, un peu de nudité et de sexe. Antiporno, c’est l’histoire de Kyoko, qui peint, et écrit, vivant recluse dans un appartement fort étrange, aux murs jaunes, aux toilettes non séparées par un mur, avec des toiles géantes au mur. Antiporno dévoile dés ses premières images le ton qui sera abordé, son côté totalement « auteur » dirons nous. Et ça, impossible de lui reprocher, car peu importe que l’on aime le genre ou pas, il y a beaucoup de choses à saluer dés le départ. Une direction artistique tranchée et originale, un usage des couleurs qui l’est tout autant, une gestion de l’espace par la caméra très bien fichue, une photographie très jolie, des plans souvent justes et même parfois sublimes, et ce d’entrée de jeu, lorsque Kyoko se réveille nue sur son lit, va aux toilettes, puis regarder son reflet, par terre, dans un morceau de verre provenant d’un miroir brisé. Formellement, que ce soit dans son visuel tranché ou dans le son de manière générale, Antiporno est bel et bien une pépite. Mais le reste, ça coince parfois un peu plus. On sait que Sono Sion vient du monde de la poésie, et qu’il aime l’art dans son ensemble, et Antiporno en est sans doute la plus grande représentation. C’est parfois très théâtral dans la manière dont les personnages bougent à l’écran, ou parfois même n’hésitent pas à dire, à voix haute, les actions qu’ils font. Le reste, c’est de la poésie, de l’abstrait aussi souvent. Mais en se voulant trop abstrait tout en essayant de dire sans doute trop de choses, sur la société Japonaise, sur la femme, sa condition, la façon dont elle est perçue et veut être perçue, Antiporno se perds par moment, et nous perd avec lui. Et pas forcément dans le bon sens du terme.

Si visuellement c’est sublime, il faut néanmoins le dire, les dix premières minutes, où Kyoko est seule chez elle, ne sont guère passionnantes. Surtout que dans le choix de faire souvent crier et gesticuler son personnage principal, Antiporno peut irriter. C’est lors de l’arrivée d’autres personnages dans ce petit lieu clôt que le métrage prend son envol, et encore plus arrivé à la fin de la première demi-heure, où le métrage s’amuse alors à briser les règles, à briser ce que le spectateur prenait pour acquis. Là, Antiporno m’aura passionné. Il retourne les acquis, pour le spectateur, mais aussi pour les personnages, retournant alors les situations, à pas mal de niveau. Parfois certes, c’est peu subtil, et même un peu vulgaire, dans les dialogues en tout cas, mais l’idée n’est pas mauvaise, et pour qui cherche un peu, on y trouve pas mal de choses intéressantes. Trop encore une fois, sans doute. Car il reste 45 minutes au compteur passé cet événement. Et à force d’expérimenter, dans sa narration, mais aussi dans son visuel, le réalisateur peut perdre à nouveau les spectateurs. Pas forcément mon cas, même si ce n’est pas parfait, mais c’est plus la première demi-heure qui me pose souci en réalité. Et aussi le fait que ça crie un peu trop souvent, pour pas grand-chose. Oui, un cri de rage, de désespoir parfois, un cri pour se faire entendre, pour vivre et se sentir vivre. Mais bon, chez Sono Sion, ça crie souvent, parfois ça passe, parfois moins. Et c’est dommage aussi, car Tomite Ami, ancienne membre des AKB48 tenant le rôle principal, que Sono Sion avait déjà dirigé dans Tag et The Virgin Psychics, n’est absolument pas mauvaise, dans ce qui reste un rôle difficile. Elle crie beaucoup trop, mais elle est convaincante. Même à ce niveau, le film souffle le chaud et le froid. Nul doute que certains seront très réceptifs à l’œuvre, et d’autres vont la rejeter en bloc. Et il y a moi, pile entre les deux, indécis, aimant et n’aimant pas l’œuvre. À dans 3 ans pour une nouvelle vision et un avis nouveau ?

Les plus

Une mise en scène virtuose
La direction artistique originale et poétique
De bonnes actrices
Des thèmes intéressants

Les moins

Un film qui en fait souvent trop
Ça crie beaucoup pour pas grand-chose
Le début, théâtral et longuet

En bref : Antiporno est une œuvre maitrisée visuellement, et une œuvre qui a des choses à dire, c’est indéniable. Mais parfois, il se perd et nous perd, en voulant être trop abstrait, en voulant raconter trop de choses, et du coup, c’est déséquilibré. Pas inintéressant, mais difficile à aborder, à aimer, à détester.

4 réflexions sur « ANTIPORNO (アンチポルノ) de Sono Sion (2016) »

    1. Oui je sais bien, mais pourtant, il y a plus, j’arrive pas à détester le film, mais ni à l’aimer, et ça m’énerve. Bon en tout cas, le making of sur le Blu-Ray était très intéressant sur le tournage et l’implication de l’équipe. Je me refais bientôt WHITE LILY que j’ai acheté également, dans la même collection (mais un peu plus radin en bonus).

      1. Il m’en reste deux à avoir dans la collection je crois, dont le Shiraishi Kazuya – réal que j’adore. Il y a deux ans environ, je les avais loués. Bim ! Pas de bol, j’ai choppé un énorme coup de froid avec grosse fièvre. Impossible de les voir dans un état pareil. Du coup j’ai fait une copie des DVD locatifs, et ma femme est allée rapporter les films au vidéoclub. Mais plus tard : catastrophe ! Impossible de remettre la main sur mes copies. Je ne sais pas où elles sont passées. Va falloir que je les loue à nouveau… S’ils sont encore dispo… (désolé je ne sais pas pourquoi je raconte ça ahahah).

        1. Non non partage les anecdotes haha ! Ici on a de la chance, les 5 films sont sortis chez nous, avec 5 vieux Pinku des années 70 auxquels les nouveaux rendent souvent hommage. Un coup osé de la part de l’éditeur, pas sûr que la demande soit énorme. Mais tant mieux pour les curieux, et pour moi ! Remarque, si je me les procure, ce sont que des éditions combo DVD et Blu-Ray, donc je pourrais te filer les fichiers du DVD 😉

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