SWEET HOME (スウィートホーム) de Kurosawa Kiyoshi (1989)

SWEET HOME

Titre original : スウィートホーム – Suwīto Hōmu
1989 – Japon
Genre : Fantastique
Durée : 1h23
Réalisation : Kurosawa Kiyoshi
Musique : Matsuura Masaya
Scénario : Kurosawa Kiyoshi

Avec Miyamoto Nobuko, Yamashiro Shingo, Furutachi Ichiro, Kuroda Fukumi, Itami Jûzô, Nokko et Yamazaki Tsutomu

Synopsis : Une petite équipe de tournage pour la télévision se rend dans la vieille maison abandonnée d’un artiste célèbre, Mamiya Ichirô. L’équipe veut restaurer et publier les peintures et faire un documentaire sur Mamiya et son art. Mais une fois qu’ils pénètrent dans le manoir, des événements paranormaux ont lieus.

Je ne suis pas un grand connaisseur de la carrière de Kurosawa Kiyoshi. Mais grâce à ce brave Oli, du blog Échec et Ciné(mat), que je cite décidément de plus en plus, j’aurais pu découvrir son premier film de cinéma, Sweet Home, datant déjà de 1989. Film que je connaissais bien, puisque j’avais pu toucher au jeu vidéo adapté du film (ou l’inverse) sur Famicon. Je connaissais donc basiquement les grandes lignes, et à quoi m’attendre. Une maison hantée, des apparitions, une équipe de télévision qui allait devoir tout faire pour survivre. Mais de Kurosawa Kiyoshi, je ne connaissais basiquement que quelques films, alors que j’en ai des tas dans ma collection. Kaïro, qui ne m’avait pas franchement plu sur le moment (mais il mérite une seconde chance), Cure que j’adore, et son film de V-Cinema datant des années 90 Eyes of the Spider, avec Aikawa Shô, acteur fétiche de Miike durant la belle époque. On ne peut pas dire que je connaisse véritablement le style du réalisateur, à part qu’il aime à priori les ambiances relativement lentes. Sweet Home, malgré quelques éléments qui reviendront par la suite, marque vraiment les débuts du metteur en scène, puisqu’il n’a pas encore son style bien distinctif, et que les influences du réalisateur, nombreuses, sont très marquées. On a pas mal de plans qui font penser à Evil Dead de Sam Raimi, et de manière générale à la débrouillardise de monsieur Raimi, un plan en particulier tellement marqué qu’il est impossible de ne pas penser à Suspiria de Dario Argento, une maison hantée à la Amityville, un jeu d’ombre rappelant parfois Nosferatu de Murnau, et une manière de filmer la dire maison dés que les plans sont extérieurs qui rappelle fortement La Maison des Damnées de John Hough. Kurosawa Kiyoshi connaît ses classiques, et essaye par moment de leur rendre hommage, voir de reproduire certains plans marquants. Ce que finalement beaucoup de jeunes cinéastes tentent de faire.

Car Sweet Home était bel et bien la porte d’entrée de Kurosawa vers le monde du cinéma, du vrai cinéma, même si le bonhomme ne trouvera que plus tardivement son style définitif, l’on pourrait dire avec Cure en 1997. Sweet Home dans les faits, c’est d’ailleurs le classique film de maison hantée, plutôt à l’Américaine malgré une ambiance par moment bien Japonaise et la présence d’un spectre aux cheveux longs. Mais Sweet Home ne reste pas sobre bien longtemps, puisque si la première partie met en place ses différents protagonistes, et joue plutôt bien sur l’ambiance, ça change très rapidement pour aller vers quelque chose de plus musclé, voir par moment de sacrément gore, avec des corps coupés en deux et j’en passe. Voilà qui fait bien plaisir. Car s’il y a bien une chose que l’on ne pourra pas du tout reprocher à Sweet Home, c’est sa générosité, malgré son côté de B movie bien présent. Car en fait, on pourrait presque dire qu’une influence non négligeable de la part de Kurosawa, ce fut Hausu, le génial métrage de 1977 (que vous pouvez courir regarder si vous ne connaissez pas). Sweet Home cultive en effet les extrêmes, un peu comme Hausu, même dans ses quelques ratés. On alterne moments légers et moments plus graves, moments bien trouvés et moments bien lourds, moments suggestifs et moments bien gore. Mais ce ne serait pas ce gros côté foutraque qui lui donnerait ce capital sympathie ? Fort probable au final, surtout que techniquement, si ce n’est pas foufou, on peut quand même dire sans hésiter (et malgré la copie moyenne dans laquelle j’ai vu le film) que la photographie est très soignée et essaye à elle seule de poser une certaine ambiance par exemple. C’est souvent bien pensé et même très beau, et ce avant même l’arrivée dans la fameuse maison, avec des éclairages travaillés, puis un court passage en forêt, plongée dans la brume, avant le huis clos. On ne pourra pas dire la même chose de la musique, allant du très sympa au très mauvais.

Pareil au niveau des personnages et des acteurs, certains sont sympathiques dans le genre malgré quelques clichés, alors que d’autres, l’ado par exemple, donne parfois envie de lui donner des grosses baffes vu sa manière de réagir par moment. Si les décors et l’ambiance n’étaient pas aussi soignées, j’aurais sans doute pris peur sur les 20 premières minutes, et ce malgré les nombreux hommages. Non pas que ce soit mauvais, mais quand on regarde un film d’horreur, et qu’un acteur joue mal et que la musique en fait des tonnes, il rate son but. Mais dés que les forces du mal vont se manifester, Kurosawa peut totalement se lâcher, avec une énergie et un style que je ne lui connaissais pas du tout. Là, on a droit à du gore qui tâche, des créatures venues du plus profond des enfers, des effets spéciaux de très bonne facture la plupart du temps, et même quelques morts bien fichues qui donne un petit côté choc à l’œuvre. Le fait que l’on ne s’y attendait pas renforce le côté surprenant de l’entreprise, et le choc de certains effets, comme cet homme coupé en deux, aussi. En fait, on a presque là une version de Poltergeist visant un public clairement adulte, ou lorgnant en tout cas plus du côté de l’exploitation, et qui compte faire plaisir aux spectateurs grâce à sa générosité. Sur moi, ça a fonctionné, et malgré ses nombreux défauts, dur de ne pas aimer l’œuvre.

Les plus

Des effets spéciaux convaincants
Une belle photographie
Une seconde partie bien gore
Des hommages un peu partout

Les moins

Certains acteurs
Des faiblesses d’écriture
Une musique très inégale

En bref : Premier film de cinéma pour Kurosawa Kiyoshi, qui n’a pas encore le style lent qu’on lui connaît. On se retrouve là devant une série B bien fichue la plupart du temps, et débordant d’hommages en tout genre. Dommage que le film soit si bancal sur certains aspects.

6 réflexions sur « SWEET HOME (スウィートホーム) de Kurosawa Kiyoshi (1989) »

  1. Oui, un bon petit film vraiment, pas très personnel mais rien d’infamant, un divertissement horrifique très ancré dans son époque. Sympa. Kurosawa peut quand même remercier Itami Jûzô pour l’avoir aidé à revenir dans une salle de cinéma.

    1. C’est ça en fait, c’est bien ancré dans les années 80 et ça lui donne beaucoup de charme. Puis comme dit, il faut bien commencer quelque part, et pas sûr que Kurosawa aurait percé à l’international par la suite s’il avait commencé cash sa carrière en « film de cinéma » avec un CURE ou KAIRO. Je me trompe peut-être, et le cinéma Japonais était peut-être bien moins frileux durant ces années là mais bon.

  2. Jamais vu, mais la générosité dont il fait montre déborde de ton superbe texte et des photogrammes qui l’accompagnent. Une grande naïveté également, que Kurosawa confesse volontiers dans ses entretiens : « Quand j’ai décidé de faire un film d’horreur, je n’ai fait que reproduire ce que j’avais vu des années auparavant.(…) Mon désir n’était pas de faire peur à mes contemporains – juste de reproduire ce qui m’avait effrayé jeune. »
    On peut, sans doute, comparer les débuts de Kurosawa dans le genre à ceux de Cronenberg qui se laissait aussi aller à une horreur très démonstrative avant de se replier vers un style plus mesuré et réfléchi.
    Jamais vu « Hausu », mais tu m’intrigues du coup…

    1. Beaucoup de réalisateurs, pas que Kurosawa ou qu’au Japon, mais durant ces années là, beaucoup rendaient hommage et tentaient de reproduire ce qui les a marqué gamin. Comme Hickox avec son WAXWORK (l’exemple me vient en tête, l’ayant revu il y a une semaine en blu-ray du Chat qui Fume). Quand à Cronenberg, hmmmmm, je ne sais pas. Même si c’était bien plus frontal durant ses premières années, tous ces thèmes étaient déjà en place et ce dés FRISSONS. Il en a fait beaucoup de variantes, souvent passionnantes (j’adore RAGE, SCANNERS, VIDEODROME mon préféré, LA MOUCHE), et une fois qu’il en a fait le tour, il a développé ses thématiques de manière moins démonstrative. Et c’est tout à son honneur, il n’est pas resté enfermé dans un style unique, et il n’a pas renié ses thèmes. Mais bon, je m’égare.
      HAUSU de Ôbayashi, c’est culte, et enfin reconnu comme tel. Depuis il y a eu de nombreuses sorties dvd et blu-ray (mais pas en France, toujours en retard ici), notamment en Angleterre, et il faudra d’ailleurs que je remplace mon vieux dvd zone 1. C’est barré, tu as 30 idées à la minutes, c’est un peu naïf, mais terriblement attachant, fun. Limite c’est un film qui a un style unique : le sien.

      1. Oui je te rejoins totalement sur Cronenberg. La comparaison n’était pas forcément la meilleure, si ce n’est sur le côté visuel, très brut à ses débuts. Cronenberg, d’ailleurs, autre grosse influence de Kurosawa.

        1. On sent que tu es un grand fan de Kurosawa en tout cas, et que tu connais ton sujet (bien mieux que moi pour le coup) Du coup, hâte de pouvoir parler plus en détails des films que nous avons tous les deux vus de lui. Car mine de rien, entre les films de cinéma, les DTV, les séries, les expérimentations étranges (son film d’une heure tourné en Russie), il ne chôme pas le Kurosawa !

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