2014
Studio : Access Games
Editeur : Microsoft Studios
Genre : Point & Click made in Swery
Multijoueur : Non
Joué et testé sur : Xbox One
Existe sur : Xbox One, PC
Synopsis : David Young est un détective privé, ancien flic dont la femme a été assassinée. Les événements autour de sa mort sont flous, et David est devenu amnésique. Mais il a gagné également un étrange pouvoir, celui de pouvoir retourner dans le passé pour résoudre des enquêtes grâces à des mémentos.
Ah, Swery ! Ou Swery65. Ou tout simplement de son vrai nom Suehiro Hidetaka. Un développeur assez connu du monde du jeu vidéo, en particulier pour un seul jeu, à savoir Deadly Premonition. Un jeu autant détesté qu’adoré. Car un jeu cultivant les extrêmes. Très en retard visuellement, aux animations ratées, aux bruitages souvent risibles, mais touché par moment par la grâce et avec une ambiance tellement étrange qu’une fois rentré dedans, difficile de lâcher. Mais résumer la carrière de Swery à Deadly Premonition, malgré l’annonce d’une suite pour 2020, ce sera réducteur. S’il a commencé sa carrière au milieu des années 90 en étant scénariste sur des jeux Neo Geo, on pourra dire que son premier vrai bébé sera le survival horror Extermination en 2002, sur Playstation 2, suivi de peu par Spy Fiction, son premier jeu en tant que réalisateur. En 2010 donc, ce fut Deadly Premonition, et après quelques jeux plutôt simples sur PSP, le monsieur revient en 2014 avec un jeu développé exclusivement pour Xbox One, un jeu prévu en épisodes, et donc en plusieurs saisons. Vendu peu cher, c’est la saison 1, comprenant un prologue et deux épisodes d’environ 1h30 chacun qui débarquent. Seulement par la suite, Swery prit une pause dans sa carrière, avant de quitter Access Games et de créer son propre studio, pour revenir finalement en 2018 avec The Missing. D4, Dark Dreams Don’t Die, n’aura donc jamais de fin. Et ça, c’est dommage, car si le jeu partage des défauts et qualités en commun avec Deadly Premonition, il demeure également une œuvre à part, une œuvre à l’ambiance singulière, et un jeu plutôt fun à jouer et à découvrir. Un jeu plein de mystères, qui ne seront donc jamais résolus.
Dans D4, le joueur prend le contrôle de David Young, détective qui a quitté la police après le meurtre non résolu de sa femme. Meurtre qui a eu des séquelles inhabituelles. En effet, avant de mourir, sa femme a eu le temps de lui dire « Look for D », et son obsession pour ce mystère l’a fait quitter la police. Plus inquiétant, David a prit une balle dans la tête lors de l’événement, et cela lui a donné un pouvoir un peu particulier, celui de pouvoir « plonger » dans le passé à l’aide d’objets appelés mémento. Une base qui pourrait faire penser à Inception, le passé remplaçant le monde des rêves. Si seulement le jeu n’était pas réalisé par Swery, puisque quelques éléments viennent se greffer à tout ça pour en faire clairement un jeu différent. Mais une base à la fois simple et folle, et prenante, surtout qu’elle se prend en main très facilement, l’aventure étant la majeure partie du temps un simple Point & Click. On déplace le curseur à la manette (ou au Kinect) sur l’objet que l’on veut, on valide, et voilà. Quelques énigmes pas compliquées, et la possibilité de mettre en surbrillance les objets importants viennent simplifier l’ensemble. Chaque action requiert de l’énergie. Oui, même ouvrir un placard va faire baisser tout ça. Heureusement, encore une fois, l’aventure reste très accessible, puisque la nourriture, faisant remonter notre énergie, se trouve un peu partout. Au delà de l’aspect aventures et donc point & click, D4 est un jeu avec des QTE. Oui oui ! Tout ce que je n’aime pas. Et pourtant ici, ça fonctionne, car les QTE interviennent dans des scènes souvent bien gratinées, comme un combat bien énergétique (avec rock irlandais en bande son) dans un avion lors de l’épisode 1. Quelques minis jeux où il suffira de faire bouger le curseur au bon endroit et voilà pour le gameplay de D4.
Mais bien entendu, dire que D4 est un simple point & click avec des QTE serait très réducteur. Durant deux épisodes donc, nous sommes invités dans un univers en cell shading, qui a ses qualités et ses défauts. Techniquement, on peut le dire, ce n’est pas le top du top, mais ça a son propre style. Bien plus professionnel malgré tout qu’un Deadly Premonition. Limité techniquement oui, et avec quelques textures assez moyennes, mais qui agresse beaucoup moins les yeux, et les oreilles également. L’ensemble se fait fluide, les décors limités (pas d’open world ici), les plans souvent fixes, la musique adéquate et les doublages tout à fait corrects. Lors de chacun des deux épisodes, il faudra explorer les lieux, pour découvrir tout un tas de collectibles, mais également pour trouver des indices permettant de faire avancer notre enquête. Bon, ce qui est amusant, c’est que David est parfois un fin limier, dans l’épisode 2 notamment, où il devine les choses après quelques indices alors que nous, joueurs, sommes toujours paumés, et parfois, il est un peu long à la détente, comme dans l’épisode 1, où nous devinons les choses longtemps avant lui, mais non, il doit continuer de récolter des indices. L’histoire en elle-même pourrait être torchée très rapidement, mais non, Swery blinde son jeu à raz bord de petits contenus annexes. Des quêtes secondaires qui se font très rapidement en parlant à certains personnages clés, quelques minis jeux, une boutique où l’on dépense les points gagnés lors des QTE réussis ou lors de certaines actions et découvertes d’indices, quelques choix multiples et la possibilité d’en apprendre plus sur les personnages importants, même lorsque cela ne fait rien avancer.
Mais cela donne une certaine profondeur et cohérence à l’univers créé, bien que le double effet, c’est que parfois, cela ralentit également le rythme général de l’intrigue, plutôt posé, à une ou deux séquences près. Mais finalement, ce qui donne un cachet unique à D4, c’est la patte de son auteur, son côté imprévisible et totalement débridé. Car si l’histoire et son concept sont un peu gros, cela reste plutôt digne d’un film de science fiction dans la veine d’Inception. Mais entre les mains de Swery, beaucoup d’éléments viennent se greffer à l’ensemble pour lui donner un aspect autre. Notre détective peut voyager dans le passé en utilisant des mémentos, soit. Mais il héberge également chez lui Amanda, une jeune femme à la tenue étrange qui se prend pour un chat, et dont la première rencontre se soldera par une séquence de QTE qui peut se terminer par un rat dans notre bouche et du vomi. David semble d’ailleurs accepter la présence de la jeune femme et l’accepter comme un animal de compagnie, comme le montre les scènes de repas, où Amanda se joint à notre table avec sa gamelle. En parlant de repas, on retrouve également la fixation de Swery pour le café et les donuts, comme ce fut le cas dans Deadly Premonition, et comme ce sera encore le cas dans The Missing. Et ce ne sont que quelques uns des nombreux détails parsemant la courte aventure. Mais je pense qu’au final, cela s’en ressent, D4 m’a conquis.
Dans une certaine mesure, puisque son absence de fin nous laisse totalement sur notre faim. Et c’est là sa grande faiblesse, contrairement aux autres titres de Swery. C’est que l’ensemble est toujours aussi fou, blindé d’idées, accumule les pistes, fausses pistes et j’en passe. Mais qu’en l’absence intégrale de dénouement, on a souvent l’impression d’une œuvre foutraque qui ne sait pas trop où aller, et dont les mystères qui n’ont pas de réponses n’ont pas forcément de sens, puisqu’étant impossibles à décrypter. Cela donne encore plus un côté unique au jeu, en fait sa force et sa grande faiblesse. Un jeu court mais impossible à détester si l’on adhère à l’univers, et sur lequel on aura envie de revenir de temps en temps malgré sa linéarité (aucun choix n’a vraiment de conséquences), mais pourtant oh combien frustrant lorsque vient fatalement la fin, avec un à suivre qui ne viendra jamais. Difficile de juger une œuvre qui ne semble pas complète, même si les quelques heures passées dans cet univers furent positives et amusantes. Et qu’au final, le jeu nous interroge en nous laissant sur toutes ces questions, dont l’on peut imaginer toutes les réponses.
Les plus
Direction artistique très sympathique
L’esprit bien fou du jeu
Certaines phases dynamiques
Une histoire pleine de mystères
Les moins
Graphiquement pas top
Pas de fin
Quelques minis jeux dispensables
En bref : D4 est fidèle à la réputation de son auteur. Fou, parsemé de clins d’œil, avec trop d’idées à la minute. Le jeu, du moins ses deux premiers épisodes, sont très sympathiques et font forte impression. Dommage que la suite ne viendra jamais.