Titre original : Only Lovers Left Alive
2013 – Angleterre / Allemagne
Genre : Drame vampirique
Durée : 2h03
Réalisation : Jim Jarmusch
Musique : SQÜRL et Jozef Van Wissem
Scénario : Jim Jarmusch
Avec Tilda Swinton, Tom Hiddleston, Anton Yelchin, Mia Wasikowska, John Hurt et Jeffrey Wright
Synopsis : Dans les villes romantiques et désolées que sont Détroit et Tanger, Adam, un musicien underground, profondément déprimé par la tournure qu’ont prise les activités humaines, retrouve Eve, son amante, une femme endurante et énigmatique. Leur histoire d’amour dure depuis plusieurs siècles, mais leur idylle débauchée est bientôt perturbée par l’arrivée de la petite sœur d’Eve, aussi extravagante qu’incontrôlable. Ces deux êtres en marge, sages mais fragiles, peuvent-ils continuer à survivre dans un monde moderne qui s’effondre autour d’eux ?
Pour ces fans, Jim Jarmusch commençait à montrer des signes de fatigue en 2005. Broken Flowers semblait parfois un peu trop dépouillé et plus classique pourtant pour plaire au plus grand nombre, tandis que dans son opus suivant en 2009, The Limits of Control, Jarmusch faisait un film pour lui, dépouillé, étrange, obscur, au non-rythme absolu et à l’histoire floue, qui n’avait pas vraiment trouvé son public. Ayant grandement apprécié ces deux métrages, il faut pourtant avouer que le génie de Dead Man n’était plus là. Débarquant début 2014 en France après un passage à Cannes l’année précédente, Only Lovers Left Alive est sans aucun doute le meilleur opus de Jarmusch depuis bien 10 ans, rien que ça. L’auteur retrouve son génie, sa folie créatrice, ses personnages complexes et ses rythmes étranges pour nous livrer un grand film. Car de toute façon, Jarmusch faisant un film de vampire, il faut bien avouer que ça ne pouvait qu’intéresser et proposer une nouvelle image de ces créatures. Apparemment, le réalisateur aura mit plusieurs années avant de réunir un budget permettant la mise en image de son scénario, et ça valait le coup d’attendre mes amis. Que ceux qui voulaient des vampires traditionnels à la Dracula ou des effusions de gore peuvent passer directement leur chemin, les autres sont invités à un voyage qui va traiter de sujets divers et nous éblouir visuellement, et ce dès le plan d’ouverture.
Car si Only Lovers Left Alive parle bien de vampires, ce n’est qu’une façon pour Jim Jarmusch de pouvoir aborder des thèmes comme l’évolution de l’être humain vu par ses créatures, ayant accumulées au fur et à mesure des années un savoir immense dans beaucoup de domaines. Dès le plan d’ouverture, on comprend que l’un des thèmes principaux sera la musique, musique qui a d’ailleurs été composée par le groupe de Jarmusch lui-même, Sqürl. Nous découvrons dans des plans tournant sur eux-mêmes comme un vieux vinyle les deux héros de l’histoire, sobrement intitulé Adam et Eve, et joué par Tilda Swinton (Limits of Control, Snowpiercer) et Tom Hiddleston (Thor, The Avengers). Si Tilda Swinton n’a plus rien à prouver, Tom Hiddleston impressionne dans un rôle dépressif et surtout bien plus fouillé que d’habitude. Dépressif, ne sortant pas, restant chez lui dans son œuvre, sa musique, ayant un œil assez négatif sur les humains, toujours vivants, mais vides de connaissances, il incarne un héros typique du cinéma de son auteur. Il ne veut pas faire parti de ce nouveau monde, de cette évolution, si bien qu’il vit reclus dans un quartier vide, entouré de ses guitares, avec sa vieille télé. Sa femme elle vit à Tanger, et vit bien mieux l’évolution des choses et des humains. Lorsqu’elle est en conversation vidéo avec son homme, lui l’a regarde sur une antique télévision, alors qu’elle se sert tout simplement d’un iPhone.
Mais au delà de ces thèmes et de cet aspect, Only Lovers Left Alive propose un fond très développé, pour qui pourra y voir les différentes influences, les hommages, les nombreux clins d’œil, autant envers la littérature, la musique que le monde du cinéma. Et bien entendu, en traitant de vampires, Jarmusch ne peut pas échapper aux clichés du genre, comme le sang pour se nourrir, le soleil qu’il faut éviter. Mais il y parvient sans jamais que ces éléments ne fassent tâche dans le récit, ou semble rajoutés pour coller à l’image que l’on se fait des vampires. Ici, les vampires ses procurent du sang à l’hôpital, dorment le jour en vivant comme des stars du rock. Le traitement de tous les éléments du métrage est franchement réussi, et Jarmusch se permet d’ajouter quelques seconds rôles savoureux, qui apporteront une touche d’humour, souvent noire au récit. On trouve donc dans le rôle de la sœur d’Eve la jeune Mia Wasikowska (Maps to the Stars, Alice au Pays des Merveilles), amusante et jeune extravertie, John Hurt (Alien, Elephant Man, Snowpiercer) dans le rôle d’un célèbre écrivain ou encore Anton Yelchin (Odd Thomas, Fright Night) en agent d’Adam un peu paumé. Entre humour, culture, vampires, Only Lovers Left Alive nous propose beaucoup de choses.
Les plus
Une superbe mise en scène
De l’humour noir
Une vision intéressante des vampires
Des acteurs tous parfaits
Les moins
Certains le trouveront bien trop lent
En bref : Film passionnant malgré son rythme lent, Only Lovers Left Alive est un merveilleux film, le meilleur de son auteur depuis longtemps.