Titre original : トウキョウ トライブ
2014 – Japon
Genre : Comédie musicale
Durée : 1h56
Réalisation : Sono Sion
Musique : B.C.D.M.G.
Scénario : Sono Sion
Avec Karina Tomoko, Suzuki Ryôhei, Kitamura Akihiro, Sometani Shôta, Takeuchi Riki, Sasaki Kokone, Yashiki Hiroko et Katayama Hitomi
Synopsis : Dans un Tokyo futuriste, une immense guerre des gangs fait rage et divise la ville en quatre clans qui veulent imposer leurs règles. À la tête de deux bandes, deux anciens amis rivalisent et les rancoeurs et sentiments personnels viennent se mêler aux affrontements des hommes dans un chaos toujours grandissant.
Sono Sion l’annonçait, Tokyo Tribe n’est rien d’autre qu’un pur divertissement, un peu à la manière de son Why Don’t You Play in Hell ? en 2013. Ici, pas de réflexion ou si peu, pas de scénario travaillé façon Love Exposure ou Cold Fish, pas de drames humains et réalistes façon Himizu ou The Land of Hope, pas de personnages forts comme avant, mais un film fou, coloré, vulgaire, brutal, chanté ! Oui, Tokyo Tribe est une comédie musicale se déroulant dans un Tokyo extrêmement coloré et chanté la plupart du temps. Mais Sono Sion ne fait pas comme tout le monde. Si il s’agît bien ici de l’adaptation d’un manga (mais après tout, Himizu l’était également), il ne choisit pas la facilité. Pas de jolies idoles tête à claque, d’effets de styles pour plaire au plus grand nombre façon Crows Zero ou tant d’autres, pas de J-Pop, pas de surdécoupage de l’action. Non, Tokyo Tribe fait le choix du plan séquence bricolé au système D à la steadycam, fait le choix du hip-hop, de la folie visuelle, sonore, du trop plein de situations et de personnages, quitte à nous balancer à la gueule son semblant d’histoire et la situation dés les premiers instants sans rien faire évoluer par la suite ! Le film s’ouvre par un plan séquence dans un Tokyo coloré (néons, couleurs vives), où l’on y retrouve Sometani Shôta dans le rôle du narrateur qui se balade, chante son rap, avant de nous présenter les différents gangs de la ville sur une carte faite au couteau sur la poitrine d’une flic.
Bien qu’habituellement allergique au rap, il faut bien reconnaître que le pari est osé et que Sono Sion s’en sort avec les honneurs sur pas mal de points. Les chansons sont nombreuses, variées, les rythmes également, et certaines passent étonnement bien. Bien entendu, l’ensemble se fait par moment aussi sincère que maladroit, et on passe autant par quelques éclairs de génie et de moments qui font du bien par où ils passent que par des moments racoleurs, légèrement ratés, à l’humour facile et répétitif. Car Tokyo Tribe prend la plupart du temps des allures de fourre tout, avec des scènes qui se suivent et ne se ressemblent pas, mixant chansons, action, humour. Le scénario n’est qu’un prétexte, et c’est bien plus les idées que la dramaturgie ou tout simplement une quelconque évolution qui comptent, puisque Tokyo Tribe parle de guerre de gangs, et puis c’est tout. Le reste, on s’en moque ouvertement. Il arrive d’ailleurs que l’on s’y perde parfois parmi tous ces personnages, certains savoureux, d’autres ouvertement ratés, sans doute volontairement. Le pire, c’est que tous ces personnages qui nous sont présentés dés le début, et bien pour la plupart, ils s’avèrent totalement inutiles au récit, et on ne les reverra que furtivement sur la fin.
Et mettre Takeuchi Riki en chef de gang avec ses expressions habituelles, ça ne fait tout de suite pas très crédible, comme de nous fournir un combat avec la tête de ce bon vieux Riki en arrière plan taguée sur un mur ou de nous mettre deux scènes de masturbation. Car oui, de bite, il en est souvent beaucoup question, de plus en plus quand le film avance. Parfois un peu lourd. Voir Riki faire son numéro une fois, ça passe, mais pas sur la durée. C’est bien là le souci de Tokyo Tribe, tenir sur la durée. Certaines choses tiennent la route heureusement, malgré quelques CGI bien foirés (le tank numérique dans les rues de Tokyo, le ventilateur qui découpe les ennemis). Sono Sion reste fidèle à lui-même, nous gratifiant de quelques moments ne pouvant venir que de lui, utilise quelques acteurs bien connus de son cinéma (on aura Denden en vieux maître même), ou encore quelques musiques qu’il utilise à chaque fois depuis Cold Fish, voir Love Exposure. Il nous gratifie encore une fois de quelques moments sanglants (même si comme dans Why Don’t You Play in Hell ?, le sang est souvent numérique), et de pas mal de plans culottes.
Mais là où Tokyo Tribe fait également plaisir, c’est dans l’action, puisque Sono Sion a bénéficié d’un plus gros budget que d’habitude, et s’amuse à filmer les acrobaties des acteurs et leurs combats avec une caméra dynamique sans avoir recourt au sur-découpage de l’action, rendant le tout agréable à l’œil. Néanmoins, si le plaisir est bel et bien là dans l’instant, tant l’ensemble va vite et qu’on nous balance tout directement à la gueule, il faut avouer que l’ensemble manque de vrai fil conducteur, d’une vraie histoire, d’un fond sans doute plus intéressant. Pire, à force de vouloir aller dans la direction du « toujours plus fort, toujours plus loin », Tokyo Tribe fatigue énormément sur la durée, et on aurait préféré que le scénario intègre moins de personnages et surtout parvienne à se poser par instant. Là, on navigue constamment entre l’élégance de certains plans, des chansons parfois réussies et rythmées, de l’action sympathiques, et des moments lourds, ratés, peu drôles, et on regardera même son final sans se soucier de ce qu’il adviendra réellement. Dommage !
Les plus
Un univers visuel fou et coloré
De nombreux changements de rythme et de ton
Divertissant
Des plans culottes
Les moins
Absence de scénario
Des gags parfois faciles
Très vite usant
Le cabotinage de Takeuchi Riki finit par énerver
En bref : Sono Sion revient avec une comédie musicale divertissante mais très limitée et rapidement lourde. Plaisant dans l’instant.