Titre original : Ravenous
1999 – Etats Unis
Genre : Horreur
Durée : 1h40
Réalisation : Antonia Bird
Musique : Damon Albarn et Michael Nyman
Scénario : Ted Griffin
Avec Guy Pearce, Robert Carlyle, Jeffrey Jones, Jeremy Davies et David Arquette
Synopsis : 1847, Etats-Unis. Le capitaine John Boyd a été décoré bien qu’il n’ait pas fait preuve d’un grand courage durant la bataille. Il a fui devant l’ennemi et a fait le mort. Conscient de la lâcheté dont a fait preuve Boyd, le supérieur de celui-ci décide de l’envoyer dans un fort retranché aux fins fonds des montagnes. Sur place, il fait la connaissance du détachement : le colonel Hart, le major Knox, ainsi que les soldats Cleaves, Toffler et Reich. Un soir, il découvre dans l’enceinte du fort un vagabond, Colquoun. Ce dernier leur raconte comment il s’est retrouvé isolé avec son convoi en pleine montagne, sans nourriture, et comment ils en sont arrivés au cannibalisme. Colquoun révèle également que deux personnes sont toujours en vie. Le détachement décide de se rendre dans la caverne où, selon Colquoun, un certain colonel Hives survit en mangeant de la chair humaine…
Rares sont les films de cannibales ne jouant pas sur l’abus de gore gratuit et facile et ayant véritablement quelque chose à raconter. Cannibal holocaust, même s’il allait parfois très loin, parvenait à véhiculer un message sur le pouvoir de l’image, mais il fut suivi par tout un tas de navets italiens. Puis il y a eu les films de cannibales comiques, avec notamment Cannibal the Musical distribué par Troma, excellente surprise. C’est en 1999 que Vorace débarque, grosse surprise, réalisé par une femme, Antonia Bird, et doté d’un fantastique casting (Robert Carlyle en cannibale fou et Guy Pearce en lâche héros de la guerre). Vorace traite du cannibalisme via une légende indienne, Windigo (ou Wendigo), cela laquelle un homme mange la chair d’un autre homme, et absorbe son énergie, sa force. Plus il mange, plus il veut manger. Les indiens se retrouvent souvent dans les films d’horreur américains, et sont toujours décrits comme des êtres aux pouvoirs magiques, ou pouvant voir l’avenir. On se rappellera du mitigé mais sympathique Poltergeist 2, ou du très réussi Ginger Snaps 3, même si les passages avec les indiens plombaient une partie du récit. Ici, rien de tout ça heureusement, les indiens sont comme nous, avec leurs cultures et leurs croyances. Vorace prend donc un chemin très différent de tout ce que l’on a déjà vu sur le cannibalisme, et fait l’effet d’une bouffée d’air frais, surtout qu’en chemin, le film n’oublie pas d’être intelligent, très bien écrit, et que la réalisatrice (ce qui est assez rare pour le souligner, une femme réalisant un film d’horreur) s’en sort merveilleusement bien, pour ménager le suspense de son film, ou encore lors des scènes sanglantes. Ainsi, John Boyd est un héros de la guerre entre les Etats Unis et le Mexique au milieu du XIXe siècle, décoré d’une médaille alors qu’il n’est qu’un lâche, est envoyé dans un fort reculé dans le fin fond des montagnes californiennes, en plein hiver. Là bas, il se retrouve entouré de personnages singuliers vivant la solitude de leur environnement comme ils le peuvent. Il y a donc le colonel Hart (excellent Jeffrey Jones), le major Knox qui aime le bourbon, Toffler, émissaire de dieu et les soldats Reich (Neal McDonough, bien avant le calamiteux 88 minutes) et Cleaves (David Arquette, mis en avant au casting alors qu’il ne doit pas apparaître plus de 5 minutes). Ajoutons à cela deux indiens, Martha, qui ne parle pas, et son frère.
Ces 8 personnages sont bloqués dans le fort, en plein hiver, jusqu’à l’arrivée de Colquoun, un mystérieux personnage qu’ils retrouvent évanouie dehors, dans le froid, joué par un Robert Carlyle absolument parfait. Reprenant connaissance quelques jours plus tard, il va leur raconter l’expérience qu’il vient de traverser, ou, perdu dans les montagnes avec son convoi et obligé de se réfugier dans une grotte à cause de la neige, le petit groupe s’est adonné au cannibalisme, avant qu’il ne quitte la grotte par lâcheté, laissant là bas le cannibale et probablement une de ses futures victimes. Bien entendu, une mission est créée afin de partir à la grotte. Sauf que le cannibale n’est pas celui que l’on croit, et cela, on le sait depuis longtemps avec la pub faite pour le film, les différents résumés ou les photos circulant un peu partout. Mais malgré la connaissance de ce point important de l’histoire, Antonia Bird parvient tout de même à nous surprendre par la qualité de sa mise en scène qui ne mise jamais sur le gore pur et dur (d’ailleurs, il n’y en aura pratiquement pas), même si de ce côté là, on notera quelques corps démembrés, des coups de couteaux, impacts de balles et l’usage de différents ustensiles de jardinage. Mais Antonia Bird parvient également à véhiculer un suspense lors de certaines séquences en particulier, suspense accentué par la musique du métrage, tout à fait inhabituelle pour ce genre de métrage, mais collant finalement parfaitement aux images (certains morceaux sont d’ailleurs sublimes et s’écoutent parfaitement en dehors du film).
Mais outre cet aspect et la grande intelligence du scénario et de la mise en scène, le film est une réussite grâce aux deux acteurs principaux, Guy Pearce (L.A. Confidential) et Robert Carlyle (pourtant bien mauvais dans Le monde ne suffit pas). Ils portent le film sur leurs épaules, et rapidement, le film se révèle être une confrontation brute entre les deux personnages qui se ressemblent par certains points. Si Boyd est un lâche, sa psychologie s’annonce finalement bien plus complexe que cela, et se rapprochera par moment de la folie de Colquoun. Mais outre le cannibalisme, Antonia Bird nous parle bel et bien de l’homme, de ses agissements dans des situations extrêmes, du changement de son comportement dans ses situations, tels que la solitude, l’enfermement, la faim surtout. Le tout sans jamais céder à la facilité. Si Colquoun a lui dépassé les limites de la folie et accepte sa condition, Boyd ne comprend pas, cherche à stopper toute cette histoire, tout simplement parce que cela est mal. La moralité de l’homme est également souvent remise en cause, encore une fois, la moralité ou les points de vues de l’homme peuvent rapidement changer suivant les situations dans lequel l’homme se retrouve. Vorace est donc un excellent film, unique en son genre, intelligent, mais également violent, porté par un bon duo d’acteurs, une réalisatrice qui maîtrise son sujet (alors qu’elle serait arrivée sur ce film au dernier moment) et une musique unique et original, tout comme le métrage. Sans doute le meilleur film de cannibale à ce jour.
Les plus
Un grand casting
La musique
Un film très bien écrit
Original et prenant
Les moins
Quelques stéréotypes sur les personnages
En bref : Un excellent film de cannibale, parfois gore, mais qui vaut le détour pour la qualité du traitement de ces deux personnages principaux, joués par Robert Carlyle et Guy Pearce.