LES INNOCENTS (The Innocents) de Jack Clayton (1961)

LES INNOCENTS

Titre original : The Innocents
1961 – Angleterre
Genre : Fantastique
Durée : 1h40
Réalisation : Jack Clayton
Musique : Georges Auric
Scénario : William Archibald et Truman Capote d’après le roman de Henry James

Avec Deborah Kerr, Peter Wungarde, Megs Jenkins, Martin Stephens, Pamela Franklin et Michael Redgrave

Synopsis : Miss Giddens, une jeune institutrice est chargée de l’éducation de Flora et Miles dans une gigantesque demeure. Elle découvre alors que ces derniers sont tourmentés par des fantômes.

Les Innocents est souvent considéré comme un des chef d’œuvres du genre aux côtés de La Maison du Diable (1963) de Robert Wise. Un peu moins connu, le film n’en aura pas moins inspiré beaucoup par la suite, et encore récemment, on peut voir l’influence du métrage sur des films tels L’Orphelinat, Les Autres ou Le Labyrinthe de Pan. Production Anglaise de 1961, le film adapte un roman du célèbre romancier Henry James, roman qu’il a écrit tardivement, après avoir quitté le monde du théâtre. Pour son adaptation cinématographique, Jack Clayton s’occupe de la mise en scène alors qu’il n’a qu’un seul film derrière lui (il livrera par la suite l’adaptation de Gatsby le Magnifique), tandis que deux scénaristes se partagent la tâche de retranscrire l’histoire en scénario pour le cinéma. Si le premier n’aura pas une grande carrière, Les Innocents étant son second et dernier scénario, Truman Caopte est lui bien plus connu et a déjà pas mal travaillé pour la télévision. Les Innocents brille d’ailleurs à la fois d’une mise en scène appliquée et ingénieuse, mais également d’un scénario malin et sans temps mort. Le métrage partage d’ailleurs un point commun avec le futur La Maison du Diable, puisque l’action se déroule principalement dans un gigantesque manoir, qui est un peu un personnage à part entière. Filmé dans un magnifique noir et blanc (Freddie Francis s’occupe de la photographie), Les Innocents nous raconte donc l’histoire de Miss Giddens, qui accepte de venir s’occuper de deux jeunes enfants, Flora et Miles. Un boulot qu’elle accepte malgré son manque d’expériences et surtout malgré le triste sort qui frappa sa prédécesseur, morte.

Voilà une base solide pour livrer un film intéressant, puisque nous avons donc une gigantesque maison, des enfants, un splendide noir et blanc, une mort inexpliquée et d’autres tics bien connus des films de genre. D’ailleurs nous sommes plongés dans le métrage dès les premières secondes, qui ne sont en réalité qu’un fond noir avec une voix d’enfants chantant une étrange chanson en fond, et ce avant même l’apparition du logo de la société de production. Ça tombe bien, puisque dans Les Innocents, tout est une question d’ambiance, et quelle ambiance. Le film opte pour le point de vue de Miss Giddens, magnifiquement jouée par Deborah Kerr, et prend son temps pour nous plonger dans une ambiance étrange, et surtout mystérieuse. Dès les premiers pas dans la maison, l’on comprend que malgré ses gigantesques couloirs, ses pièces énormes et bien éclairées, Les Innocents joue sur son décor, sur l’espace. Même avant l’arrivée de Miss Giddens dans la demeure et sa première rencontre au bord du lac avec Flora (Pamela Franklin dans son premier rôle), le ton est donné. Cette ambiance étouffante n’est pas présente que dans la maison mais également dans ses alentours. Les angles de caméra et les éléments du décor renforcent cette impression, avec cette pluie souvent présente, son utilisation de la profondeur de champ, et ces statues géantes présentes un peu partout. Outre son ambiance, l’autre force du métrage est son traitement, et donc, son écriture. Sans aucun temps mort, le métrage alterne continuellement entre une approche fantastique directe mais possiblement fausse (puisque le film adopte le point de vu d’un personnage uniquement), avec quelques apparitions derrière des fenêtres ou en arrière plan, et une approche beaucoup plus réaliste, et donc psychologique.

Les liens entre les différents personnages, notamment le petit garçon Miles (joué par Martin Stephens, déjà vu dans Le Village des Damnés) et Miss Giddens sont bien exploités et surtout donnent plus de profondeur à l’intrigue. Le petit garçon dégage quelque chose qui attire l’œil, qui surprend, et qui met mal à l’aise, dans sa façon de parler, mais également dans sa façon de se comporter. Son comportement peut passer en un clin d’œil de celui d’un enfant normal de son âge à un comportement un peu plus adulte et surtout plein de sous-entendus. On se met alors à douter, à la fois de l’innocence présumée de Miles, et donc des enfants, mais également de l’innocence de Miss Giddens, voulant à tout prit protéger ses enfants, et étant fille de pasteur. Jusqu’à son final, glaçant d’ailleurs, le métrage sème le doute, et ne semble pas vouloir nous offrir une version ou une autre de son histoire, nous faire choisir son approche directe du fantastique ou son approche plus subtile. Et on ne peut que saluer d’ailleurs sa capacité à passer d’un aspect à un autre, sans jamais se prendre les pieds dans son intrigue ou dans les différents choix qu’il met en place visuellement. Du haut de ses 1h40, Les Innocents est une indéniable réussite, un grand film qui en a inspiré plus d’un et continue d’inspirer de grands réalisateurs, un film intemporel et fort, que tout fan du cinéma de genre se doit d’avoir vu, et si ce n’est pas le cas, se doit de découvrir au plus vite.

Les plus

Un film pilier du genre
Une mise en scène et une photographie magnifiques
Un doute constant
Des thématiques intéressantes

Les moins

 
En bref : À l’image de La Maison du Diable, Les Innocents est un des grands films du genre, troublant par le doute qu’il sème constamment.

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