Titre Original : Luca il Contrabbandiere
1980 – Italie
Genre : Policier
Durée : 1h37
Réalisation : Lucio Fulci
Musique : Fabio Frizzi
Scénario : Lucio Fulci, Ettore Sanzò, Gianni De Chiara et Giorgio Mariuzzo
Avec Fabio Testi, Ivana Monti, Enrico Maisto, Marcel Bozzuffi, Saverio Marconi, Ferdinando Murolo, Tommaso Palladino, Guido Alberti, Aijta Wilson, Venantino Venantini et Daniele Dublino
Synopsis : Luca Di Angelo mène une vie tranquille et confortable de trafiquant de cigarettes à Naples, lorsque son frère Mickey est assassiné devant ses yeux. Les autres contrebandiers sont décimés à leur tour. Il s’avère bientôt qu’un nouveau venu, le « Marseillais », a l’intention de vendre de la drogue en ville. Implacable et sadique, il est prêt à tout pour y parvenir même à éliminer ses concurrents. L’affrontement est inévitable.
Ce qu’il y a de passionnant avec Lucio Fulci, outre le fait qu’il était un excellent réalisateur jusqu’à la triste dernière partie de sa carrière, c’était sa facilité de passer d’un genre à un autre et d’y mettre ses obsessions et son style pour créer quelque chose d’unique. Quand il touche au western, ça peut donner quelque chose de classique comme Le Temps du Massacre, mais aussi Les 4 de l’Apocalypse, qui sous son verni de western, est plus un road movie. Quand il doit tout simplement surfer sur la vague pour livrer des films de zombies après le succès de Zombie de George A. Romero (produit par Argento), ça donne L’Enfer des Zombies qui retourne plutôt à la base du mythe, à base de vaudou, puis Frayeurs, une œuvre plus visuelle que narrative, mais où les zombies, présents, sont très éloignés de ce que l’on connaissait à l’époque. Et Fulci, il ne chôme pas, loin de là, puisqu’entre ses deux titres justement, sorti en Août 1979 pour le premier et Août 1980 pour le second, il a tout de même le temps de nous livrer un polar sur les contrebandiers à Naples, sortant presque en même temps que Frayeurs d’ailleurs (les 8 et 11 Août respectivement). Et fidèle à lui-même, Fulci livre une œuvre unique, sombre, désespérée, archi violente, où il retrouve Fabio Testi pour le premier rôle, qu’il avait déjà dirigé, notamment cinq ans plus tôt dans Les 4 de l’Apocalypse. Il joue ici Luca, contrebandier de cigarettes, marié, avec un enfant, une affaire qui prospère, et un frère qui est dans le même business que lui. Seulement en une seule scène, Fulci place déjà tous les enjeux de son film, lors d’un deal comme les autres en pleine mer, qui voit l’irruption de la police. Il y a donc une taupe quelque part, quelqu’un qui veut faire du mal au business.
Forcément, Luca et Micky pensent immédiatement à leur ennemi juré, mais ce serait bien trop simple que de dévoiler tout ça en quelques scènes seulement. Commence alors un jeu de chat et de la souris, et surtout, un jeu de massacre où tous les coups sont permis, et où les coups, ils font mal, très mal. Alors, dans les faits, La Guerre des Gangs est un petit polar assez classique, autant dans la forme que le fond. Différents contrebandiers, des tensions, un nouveau en ville surnommé Le Marseillais qui lui veut vendre de la drogue et se montre sadique envers ses ennemis, et au milieu de tout ça, Luca, qui en plus de vouloir protéger son business, veut venger la mort de son frère qui survient très tôt, assassiné devant ses yeux, mitraillé (et chutant par la suite d’une falaise, pour être sûr). Ajoutons évidemment par-dessus tout ça la police, qui cherche à arrêter tout le monde, et nous avons là un polar classique oui mais rondement mené. Le scénario sait en tout cas, malgré son côté classique, gérer son rythme, ses retournements de situations, dynamiser tout ça, et ne nous perd jamais entre ses différents gangs et nombreux personnages, tout en allant finalement à l’essentiel, puisque le tout ne dépasse même pas 1h40. Quant à la mise en scène de Fulci, on le retrouve là en forme, livrant ses travellings habituels, zooms sur les yeux, et s’attardant sur les scènes violentes lorsqu’elles surviennent dans le récit, en sachant les rendre brutales et finalement, soit captivantes, soit impactantes pour le récit et le spectateur. On regrettera juste par moment quelques plans où la mise au point semble mal gérée, avec des plans zoomant, mais où la mise au point elle ne varie pas, déjà prête pour le cadre final, mais pas ce qui précède. Ce que l’on pourrait expliquer d’ailleurs par un tournage compliqué, le film ayant manqué d’argent après quelques semaines de tournage (et aurait par la suite en partie été financé par de vrais contrebandiers). Mais Fulci livre une très bonne mise en scène et une très bonne ambiance désespérée.
Pour l’épauler, on retrouve Fabio Frizzi d’ailleurs à la musique, qui se montre ici aussi très inspiré. Le thème principal notamment rentre en tête et correspond parfaitement à l’ambiance du métrage, lente et inévitable. Mais si La Guerre des Gangs peut marquer les esprits, c’est clairement par sa grande violence. Fulci y va clairement à fond, n’ayant pas peur du sadisme par moment, comme lors de cette scène où une femme se fera longuement, très longuement brûler le visage, en gros plan, ou en allant dans l’excès le plus total, mais finalement, sans doute réaliste, avec ses nombreuses fusillades où les balles arrachent la chair, explosent les visages. Le film ne recule devant rien pour nous faire comprendre à quel point les personnages sont des pourris, tous jusqu’aux derniers. Malgré ça, le métrage se permet parfois quelques petites notes d’humour, avec cette bonne sœur insultant les flics, ou bien avec ce contrebandier qui même arrêté et emmené par la police, ne lâche pas son assiette de spaghetti et continue de manger quoi qu’il lui arrive. Des petites notes d’humour qui fonctionnent et ne retirent rien de la noirceur à toute épreuve du film. Par contre, voir ce papy qui regarde des westerns à la télé tout le long du film, c’est immédiatement moins pertinent, moins amusant, et ça questionne. Fulci veut-il ironiser sur ses hommes de violence passionnés par la violence du passé ? Un détail qui n’empêche en rien le film d’être un grand film à découvrir pour les fans du réalisateur.
Les plus
Un polar rondement mené
Fulci en grande forme
Une violence radicale et sans concessions
Très bon thème de Fabio Frizzi
Les moins
Quelques petits défauts de mise au point
En bref : La Guerre des Gangs n’est pas à mettre devant tous les yeux tant il se fait radical dans sa violence et désespéré dans son ton. Fulci est en forme et se sert d’enjeux simples pour livrer une fresque presque hallucinée tant elle est jusqu’au-boutiste.
A FEW WORDS IN ENGLISH | |
THE GOOD | THE BAD |
♥ A very good and well made film ♥ Fulci in good shape ♥ It’s violent, radical even ♥ Very good score from Fabio Frizzi |
⊗ A few shots are a bit blurry |
Contraband is not for everyone, as it’s very radical in its violence, and even desperate. Fulci is in good shape, and used a simple story to deliver a crazy film, probably one of the most violent thriller of its time. |
J’aime beaucoup Fulci mais je n’ai pas vu celui-ci. Tu sais comment m’appater dans ton article, le film promet de secouer, et rudement ! On devine l’ influence des French Connections, mais je vois bien Fulci transcender cela en une symphonie visuelle ultra macabre.
Alors je vais t’envoyer un mail, car j’ai justement filé le film à Oli 😉
J’ai l’impression que peu de monde connait ce film là, malgré sa période de tournage, là où Fulci était en plein âge d’or au niveau international.
Le film, ainsi que LES 4 DE L’APOCALYPSE que j’ai fais découvert à un ami, m’ont donnés envie de me replonger dans le cinéma de Fulci, et Italien même en général, du coup j’ai fais chauffer la carte bleue, ce qui m’a d’ailleurs permis de revoir des Fulci mineurs, que je n’avais pas spécialement aimé à l’époque, mais dans des conditions optimales (j’ai réécrit et changé les captures sur mes chroniques qui avaient 20 ans de AENIGMA et MURDER ROCK), et en apprenant beaucoup de choses via les passionnants bonus des éditions. Et j’ai quelques Fulci toujours pas vus en stock, j’ai d’ailleurs découvert le mineur (et pas très bon même s’il y a quelque chose) LE MIEL DU DIABLE il y a peu aussi.