SIX FEMMES POUR L’ASSASSIN (Sei Donne per l’assassino) de Mario Bava (1964)

SIX FEMMES POUR L’ASSASSIN

Titre Original : Sei Donne per l’assassino
1964 – Italie
Genre : Giallo
Durée : 1h28
Réalisation : Mario Bava
Musique : Carlo Rustichelli
Scénario : Marcello Fondato

Avec Eva Bartok, Cameron Mitchell, Mary Arden, Massimo Righi, Thomas Reiner, Arianna Gorini, Dante De Paolo, Franco Ressel et Claude Dantes

Synopsis : La Comtesse Como dirige à Rome un atelier de haute couture très réputé. Les ennuis commencent le jour où Isabelle, un de ses mannequins, est retrouvée morte dans une armoire. Le doute n’est pas permis : il s’agit d’un meurtre, et le premier d’une longue série.

En 1964, Mario Bava a déjà quelques films derrière lui, passé son premier film officiel en 1960 avec Le Masque du Démon. Cependant, il doit s’adapter, puisque la société avec laquelle il travaillait jusque-là, Galatea Film, ferme ses portes. Il doit donc trouver de nouveaux partenaires financiers, et c’est en grande partie Emmepi Cinematografica qui produit son nouveau métrage, un tout nouveau studio, ce qui explique sans doute le budget assez dérisoire qu’obtient Bava pour faire son film. Un budget plus bas que Le Masque du Démon, film où il devait pourtant faire ses preuves. Et ironiquement, Six Femmes pour l’Assassin est une des œuvres les plus importantes de la carrière de Mario Bava, le film qui lança clairement une mode, celle des giali, en tout cas, des giali enfin tournés en couleurs. Alors qu’ironiquement, le film fut, à sa sortie en tout cas, un relatif échec en Italie. Car Six Femmes pour l’Assassin, Sei Donne per l’assassino, est en couleurs, et nous le fait savoir dès son ouverture avec un usage de couleurs vives marquées. Plus que le giallo, le métrage aurait, dans le fond, plus eu une influence sur certains cinéastes. En regardant le film, comment ne pas penser au cinéma d’Argento, que ce soit dans l’utilisation des couleurs (Suspiria) ou dans certains meurtres même (la noyade dans la baignoire, reprise dans Les Frissons de l’Angoisse, 11 ans plus tard). Un grand film précurseur donc ? Dans la forme, totalement, même si j’émettrais quelques réserves sur le fond. Car dans la forme, c’est un Bava en très grande forme ici. C’est souvent sublime, avec une utilisation intelligente des décors, et des accessoires. Après tout, d’entrée de jeu, Bava brouille, visuellement, les pistes. Avec ces mannequins présents un peu partout qui laissent planer le doute, avec le manteau du tueur, qui est le même que le manteau porté par l’inspecteur en charge de l’enquête.

Bava s’amuse, oui, et le fait très bien. Dès le plan d’ouverture, avec cette pancarte qui vacille avant de nous faire découvrir le manoir où les modèles sont rassemblés pour un défilé. Avec l’utilisation des couleurs vives, notamment le rouge et le vert. Avec un sens du cadre qui semble souvent millimétré, et ces plans qui trahissent parfois un tournage en studio, mais qui pourtant, donnent un charme fou au film, et même, soyons fou, une réelle personnalité. Et bien entendu, on pourrait parler longtemps des meurtres, sauvages et violents, pour l’époque en tout cas (1964 hein), quand bien même aujourd’hui, l’effet est atténué, mais reste tout de même violent. Bava démontre également une certaine science du montage et de fluidité lors de certaines scènes, lorsque tous les personnages, présents dans une même pièce, gardent tous un œil sur un sac à main contenant un élément pouvant (ou non) identifier le tueur du métrage, chacun ayant une raison de vouloir mettre la main dessus. Bava n’a jamais été autant à l’aise que lorsqu’il doit filmer ses personnages silencieux, immobiles, le forçant en quelque sorte à créer une dynamique autrement, via sa mise en scène. Ce qui est sûr, c’est qu’on ne croirait pas du tout être devant un métrage qui a couté bien moins cher que les précédents films de son auteur ici, tant formellement, c’est une réussite, dans l’ambiance, dans sa folie visuelle, et dans les meurtres. Là où l’on pourrait émettre quelques réserves sur le film, ce serait dans le fond, avec notamment un lot de personnages pas toujours ni intéressants, ni attachants, et quelques rebondissements qui fonctionnent, mais qui sentent le déjà-vu.

Heureusement, contrairement à Argento qui se laisse parfois aller à des films longs avoisinant ou dépassant les deux heures quand il est dans le giallo (Les Frissons de l’Angoisse dépasse les deux heures, et le scénario original était apparemment anormalement long, Le Sang des Innocents aussi approche des deux heures), Bava va le plus souvent à l’essentiel, et ne dépasse même pas l’heure et demi, livrant un récit fluide avec un rythme endiablé, où les meurtres se succèdent, ainsi que les fausses pistes. En y regardant de plus près, on pourrait dire que cette durée, et le relatif vide des personnages niveau fond et personnalité vont dans le sens du métrage, qui cherche plus à jouer sur les apparences, et donc, sur ce que les personnages représentent, pour le milieu dans lequel ils évoluent, et avec leurs vices, plutôt que d’en faire des personnages à part entière. Et c’est au final ce qui fait, en plus de la très haute tenue visuelle (et sonore) du film que l’on se prend au jeu, malgré le côté relativement prévisible de l’intrigue en général. Et c’est ce qui fait également que Six Femmes pour l’Assassin est un film qui vieillit très bien. Oui, évidemment, certains éléments semblent un peu datés, et on a vu plus hardcore ou sadique niveau meurtres par la suite, mais voir ou revoir le film aujourd’hui est toujours un plaisir. De toute façon, pour tout amateur, il est toujours intéressant de revenir à l’un des films fondateurs du genre. Sauf si vous ne voulez que le look du tueur et préférez vous tourner vers Fantom Kiler… mais là je ne peux plus rien pour vous alors.

Les plus

Visuellement c’est juste sublime
Les éclairages, les jeux d’ombres, silhouettes
Des meurtres bien violents par un tueur au look inoubliable
Le récit est court et se suit bien

Les moins

Malgré tout assez prévisible
Des personnages peu développés

En bref : Œuvre importante, Six Femmes pour l’Assassin ne déçoit pas, malgré son âge, étant toujours ce film aussi soigné visuellement que violent.

A FEW WORDS IN ENGLISH
THE GOOD THE BAD
♥ Visually, it’s simply stunning
♥ The lights, the shadows, silhouettes
♥ Violent murders with an iconic killer
♥ A short and well paced story
⊗ A bit predictable
⊗ The characters lack development
Blood and Black Lace is an important film, fascinating despite its age, still violent and visually stunning after all those years.

3 réflexions sur « SIX FEMMES POUR L’ASSASSIN (Sei Donne per l’assassino) de Mario Bava (1964) »

  1. Salut Rick
    Super article sur ce Bava que j’aime beaucoup. Je te trouve d’ailleurs un peu dur à propos des personnages qui évoluent dans le milieu de la haute couture. Cela fait aussi partie de l’approche critique qui se superpose aux meurtres en série. Et visuellement, tu l’as dit, c’est splendide. Aux marges du fantastique parfois (comme je l’avais noté dans mon article).

    1. Hello mister 😉
      Oui, sans doute un poil dur même si j’aime beaucoup et que sa note est excellente, mais il faut dire que le film ayant vraiment lancé le giallo (et que je bouffe en ce moment énormément de films Italiens, et beaucoup de giallo, merci à ma récente commande chez Le Chat qui Fume où je me suis procuré pas mal de titres, dont certains que j’aime beaucoup mais que je n’avais pas vu depuis bien 10 ans, comme MAIS QU’AVEZ VOUS FAIT A SOLANGE ou LA QUEUE DU SCORPION), mon avis est sans doute un peu faussé par tout ce que le genre a apporté par la suite. Mais ne t’inquiètes pas, malgré tout ça, je préfère 100 fois ce Bava à certaines influences visuelles trop directes malheureusement citées à la fin de ma review 😉
      Je crois d’ailleurs que nous avions parlé du film à l’époque sur ton site, et que c’était là que je m’étais dis qu’il fallait que j’en parle aussi, que je le revois dans les meilleures conditions possibles. Il s’est juste écoulé quelques années avant que le délic ne soit fait.
      En tout cas je compte bien parler d’autres Bava dont je n’ai pas encore parlé, comme son tout dernier, paraît-il excellent, que j’ai mais pas encore vu (SHOCK, renommé à l’époque chez nous LES DEMONS DE LA NUIT).

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