Titre Original : Secret Window
2004 – Etats Unis
Genre : Suspense
Durée : 1h36
Réalisation : David Koepp
Musique : Philip Glass
Scénario : David Koepp d’après Stephen King
Avec Johnny Depp, John Turturro, Maria Bello, Timothy Hutton, Len Carlou et Charles S. Dutton
Synopsis : Mort Rainey devrait être devant son ordinateur, à écrire un autre de ses romans à succès. Mais son divorce le détruit et le prive de toute inspiration. Tout ce qui touche à la rupture devient un véritable cauchemar et sa page reste blanche. Un jour, un inconnu nommé John Shooter se présente à sa porte et l’accuse d’avoir plagié son histoire. L’homme demande réparation. Malgré les efforts de Rainey pour le calmer, l’individu devient de plus en plus vindicatif. Sa notion particulière de la justice pourrait bien le conduire jusqu’au meurtre.
Face à une carrière discrète alternant le bon et le moins bon en tant que réalisateur, on en vient parfois presque à oublier que oui, David Koepp est également réalisateur. Et ce n’est pas son dernier film en date, le soporifique You Should Have Left, où il retrouvait Kevin Bacon, qui va venir me faire dire le contraire. À une lointaine époque pourtant, notamment dans les années 90, tout semblait lui sourire. Scénariste reconnu de films, au choix, à succès commercial ou devenant culte avec le temps, comme Jurassic Park, L’Impasse, Mission Impossible, Snake Eyes, Panic Room, Spider-Man, tout en passant par la case de la mise en scène donc, avec un premier film méconnu en 1996, et le très sympathique Hypnose en 1999. Mais le passage des années 2000, si elles commençaient bien, ne furent pas de tout repos. Car après Panic Room et Spider-Man comme scénariste en 2002, il se lance dans son second long métrage, ce Fenêtre Secrète donc, en 2004, avant de continuer d’écrire, pour Spielberg par exemple (La Guerre des Mondes, le quatrième Indiana Jones) ou Ron Howard (Anges et Démons, Inferno), ou tout simplement pour Tom Cruise avec La Momie. Ah ça, les années 2000, si tout n’est pas à jeter, elles sont tout de suite moins glorieuses que les années 90. Fenêtre Secrète donc, c’était en soit le film gagnant, puisque Koepp, qui aime les scénarios malins et à tiroirs, adapte Stephen King, qu’on lui offre un budget très confortable pour le faire (40 millions pour un huis clos, quand même), et qu’il a un casting composé de Johnny Depp que l’on ne présente plus, John Turturro, Maria Bello ou encore Charles S. Dutton. Sur le papier, le film ne fait pas les choses à moitié, même si aux premiers abords, on peut avoir quelques craintes, tant qu’Koepp s’attaque à un écrit mineur de Stephen King. Une nouvelle plutôt longue en fait, parue à l’époque en France avec une autre nouvelle de taille conséquente, Les Langoliers. Et si Les Langoliers n’a pas eu de bol en passant sur le petit écran, Fenêtre Secrète lui a droit à la case cinéma.
La nouvelle n’est pas la meilleure de King, loin de là, surtout qu’il faut bien l’avouer, les écrits de King tournent très souvent autour d’un nombre très limité de thématiques. On a les adolescents ou enfants qui ont des pouvoirs (Carrie, Shining, Charlie), l’artiste en panne d’inspiration ou ayant des doutes (Shining, La Part des Ténèbres) ou la petite ville dont un élément extérieur vient quelque peu exposer les secrets (Ça, Le Bazaar de l’Épouvante). Alors oui, c’est réducteur, et il y a parfois quelques nouvelles ou romans qui s’éloignent de tout cela. Mais pas de bol, Fenêtre Secrète tombe dans ces catégories, celle de l’artiste en panne d’inspiration et qui va avoir quelques soucis le jour où un inconnu vient frapper à sa porte en lui annonçant qu’une de ses nouvelles lui a été volée. Bien entendu, King oblige, notre écrivain a un petit souci d’alcool, est à une période difficile de sa vie avec un divorce en cours, pète les plombs, et est retranché dans un petit lieu clos. En gros, autant pour le connaisseur de l’œuvre de Stephen King que pour le cinéphile qui bouffe des adaptations, encore très présentes à l’époque, Fenêtre Secrète va avoir du boulot pour nous convaincre. Son relatif échec au box office (il rapporta deux fois son budget, sans prendre en compte les coups promotionnels) et surtout ses critiques assassines et que le fait que tout le monde a aujourd’hui oublié le métrage n’est jamais bon signe. Pourtant, des qualités, le film en a. La mise en scène de David Koepp par exemple est relativement appliquée, propre, fluide, et il nous offre même par moment de très élégants mouvements de caméra, comme lors de son générique d’ouverture. Johnny Depp en écrivain torturé et confronté au doute est convaincant 85% du temps (oui, il reste 15%, on y reviendra), et John Turturro en stalker inquiétant livre une merveilleuse prestation, clairement l’un des gros points forts du titre par ailleurs.
Techniquement c’est du bon boulot, rien à redire, même si rien de mémorable, la photographie est jolie sans être marquante, les musiques conviennent sans marquer également le spectateur. Mais c’est bien dans son scénario que ça coince. Et dans son final. Déjà car, autant par maladresse dans le travail d’adaptation que par l’œuvre qu’il adapte, Fenêtre Secrète est une œuvre incroyablement prévisible. 10 minutes sont suffisantes pour que l’on se doute déjà du dénouement, tant tout est un peu gros, tant tout a déjà été vu, dans l’œuvre même de son auteur. Ça se veut malin, mais ça ne l’est jamais réellement. Malgré tout, c’est plutôt rythmé, et la majeure partie du temps, ça se suit bien, même si sur les mêmes thématiques, on préférera revoir La Part des Ténèbres de George A. Romero, ou surtout l’énorme Shining de Stanley Kubrick. Et là où tout s’effondre, c’est lors de son final, de ces 15 dernières minutes, où tout est prévisible, et que le film joue alors la carte du toujours plus, avec un Johnny Depp jusque là crédible mais qui part en roue libre, comme s’il tentait d’imiter un Jack Nicholson, sans jamais avoir le même résultat, cette présence. Et ça continue jusqu’au plan final, qui pourra faire rire les connaisseurs de l’œuvre de King, et de cette bien trop longue saga cinématographie nommée Les Enfants du Maïs. Alors attention, Fenêtre Secrète n’est pas foncièrement mauvais, des qualités, il en a pas mal, que j’ai évoqué dans ce texte. Mais il est trop bancal, trop prévisible, trop fragile pour être un spectacle solide sur toute la ligne. Et on sait bien depuis le temps qu’une mauvaise fin peut souvent mettre à mal l’intégralité d’un film. C’est le cas ici.
Les plus
Une mise en scène souvent élégante
John Turturro, excellent
La plupart du temps, Depp est bon
Pendant une heure, ça se suit bien
Les moins
Un scénario ultra prévisible
Le final en dessous
Depp parfois veut faire son Nicholson, ça ne marche pas
En bref : Film mineur pour Koepp, adaptation mineure, mais adaptation d’une nouvelle assez longue déjà mineure. Les thèmes abordés ne sont pas nouveaux, on voit tout venir à l’avance, et si la plupart du temps, ça se regarde bien, c’est néanmoins la déception qui domine.
A FEW WORDS IN ENGLISH | |
THE GOOD | THE BAD |
♥ Technically it’s often good, elegant ♥ John Turturro is excellent ♥ Most of the time, Depp is good too ♥ For an hour, it’s entertaining |
⊗ The script is often predictable ⊗ The finale ⊗ When Depp tries to mimic Nicholson, it doesn’t work |
Small film for Koepp, small adaptation, but adaptation of a short story already small. The themes are not new, everything is predictable, and most of the time, if it remains entertaining, it’s a disappointment. |
Une adaptation à passer par la fenêtre ? En tout cas, je l’avais totalement occultée de mes listes. Heureusement que tu es là pour exhumer ces reliques du temps où Depp devait encore jouer les alcooliques sans l’être lui-même.
Tout le monde oublie ce film, comme beaucoup en fait réalisés par Koepp, à part son premier qui avait été apprécié du public (et par moi aussi).
Toujours là pour venir faire une piqure de rappel sur ces métrages, bons ou mauvais, qu’on oublie avec le temps.