2005 – Etats Unis
Genre : Drame
Durée : 1h13
Réalisation : Steven Soderbergh
Musique : Robert Pollard
Scénario : Coleman Hough
Avec Debbie Doebereiner, Dustin Ashley, Misty Wilkins et Omar Cowan
Synopsis: Dans une petite ville perdue du Midwest, Martha et Kyle travaillent pour l’une des rares usines encore en activité. Malgré leur différence d’âge, leur solitude les a rapprochés et le jeune homme et celle qui pourrait être sa mère sont devenus amis. L’arrivée de Rose, une jeune mère célibataire, va tout remettre en cause. Entre les deux jeunes gens, des liens se nouent naturellement, ce qui n’est pas du goût de Martha.
Bubble est un exercice de style, un film loin d’être bête et ennuyeux comme certains ont pu le dire. Un film étrange, fait en dehors des studios Hollywoodiens, avec uniquement des acteurs amateurs, les lieux de tournage étant en général leurs vraies maisons, et la plupart des dialogues ont étés improvisés. Bubble pourrait traiter de deux sujets principaux, auxquels viendraient s’ajouter d’autres thèmes au fur et à mesure. Un sujet un peu casse gueule, ainsi que la façon de faire, d’autant plus que lors de sa sortie, le film fit un petit scandale dû à sa distribution simultanée au cinéma, en DVD et en VOD. L’homme derrière ce projet : Steven Soderbergh, à la fois présent comme réalisateur, mais également monteur et directeur de la photo sous des pseudonymes qu’il utilise régulièrement, même pour des blockbusters. Juste après l’amusant Ocean’s twelve, Soderbergh se lance donc dans Bubble, un film beaucoup moins amusant dans ses thèmes et son histoire. Nous allons découvrir la vie de trois différents personnages. Il y a d’abord Martha, rousse, la quarantaine, vivant avec son père, s’occupant de lui. Elle travaille dans une usine produisant des poupées, la seule de la région, avec Kyle, un homme beaucoup plus jeune, vivant encore chez sa mère. Ils vivent au milieu de nulle part, dans un trou paumé. Pour survivre, Kyle enchaîne le soir sur un deuxième travail. Jour après jour, c’est la même routine qui s’installe pour eux. Une vie où ils ne s’amusent pas, une vie simple et morne. Soderbergh dresse là un portait peu glorieux de l’Amérique, où il faut travailler dur pour espérer s’en sortir. Rapidement, la vie de ses personnages va quelque peu changer avec l’arrivée de Rose. Jeune femme mignonne venant d’arriver dans l’usine, elle aussi ayant un deuxième travail, et mère d’une petite fille de deux ans. Au final, malgré cette charge de travail, les personnages n’évoluent pas, ils restent figés dans l’instant présent, espérant un avenir meilleur qui ne viendra pas.
En ce sens, le parallèle avec ses poupées vides, lisses, assemblées, est très rapidement fait. Les personnages leur ressemblent. Bien plus tard dans l’histoire, qui peu être découpées en deux parties, le parallèle est encore plus grand. Dans sa première partie, durant bien quarante minutes, le réalisateur filme calmement, sans se précipiter, le quotidien plus que banal des différents personnages. Ils se lèvent, s’occupent de leur famille, puis vont travailler, avant de se retrouver pendant la pause repas. Martha et Kyle semblent très proches. Martha est toujours présente pour lui rendre service, pour discuter avec lui après ou pendant le travail. Dans ce petit bled où il n’y a rien d’autres, ils semblent compter l’une sur l’autre. Dans ce contexte banal qui pourrait arriver à tout le monde (peut être est-ce là la raison pour laquelle Soderbergh n’a engagé que des non-professionnels pour jouer dans son film), la vie de Martha et Kyle va être chamboulée par l’arrivée de Rose. Immédiatement, Kyle et Rose vont se rapprocher, et Martha va être quelque peu exclue de ce cercle, sauf lorsqu’il faudra rendre service. Dans un style très sobre, Soderbergh développe ses personnages, la situation, et le comportement humain. Dans un sens, plus son histoire évoluera, plus on pensera par certains aspects au cinéma de Lynch, en particulier à Twin Peaks. Et l’usine à fabrication de poupées en sera la plus belle métaphore. Ces poupées ont beaux avoir une belle apparence, un sourire, être lisses, parfois comme les humains, on ne sait jamais ce qui se cache en dessous. Pour ces poupées, c’est la manière dont elles sont fabriquées qui trahissent la beauté finale. Pour nous, un homme aura beau sembler parfait sous tous les angles, on ne sait pas ce que peu abriter son esprit et ce qui se cache sous la surface des choses.
Comme nous le savons tous de par l’histoire, un meurtre va être commis, et Soderbergh, volontairement, ne nous montrera pas le meurtre. La seconde partie du métrage se déroule donc à la manière d’une enquête policière, qui sera finalement assez facile à résoudre, mais là n’est pas l’intérêt justement. L’intérêt réside dans la psychologie des personnages, les faux semblants, comment une petite faille ou un sentiment peut prendre l’emprise sur la situation et tout faire dégénérer, et comment l’esprit humain accepte tout cela. C’est de là que pourra venir le malaise à la vision du métrage pour qui arrive à rentrer dedans, pour qui acceptera son rythme volontairement lent. Et c’est de là également que la comparaison avec Twin Peaks devient encore plus inévitable, notamment dans le final. Encore une fois, on pourra applaudir face aux qualités du métrage, qualité visuelle déjà, qui parvient à nous émouvoir sans avoir recours à des effets de styles ou des artifices. Un film indépendant, intimiste, filmé avec peu de moyens avec une petite caméra. Un film au scénario simple mais travaillé, efficace. Si Soderbergh continue de faire des gros budgets, aucun doute que c’est pour se permettre ensuite des petits films comme Bubble ensuite.
Les plus
Un très beau film, simple
Très intéressant
Personnages attachants
Les moins
Des acteurs amateurs qu’on ne reverra pas dans d’autres films
En bref : Entre le drame et l’enquête policière, Bubble est avant tout la peinture de trois personnages qui s’ennuient dans une petite ville, une peinture de l’horreur qui peut se cacher sous la surface des choses.