Avec John David Washington, Robert Pattinson, Elizabeth Debicki, Kenneth Branagh, Dimple Kapadia, Aaron Taylor-Johnson et Michael Caine
Synopsis : Muni d’un seul mot – Tenet – et décidé à se battre pour sauver le monde, notre protagoniste sillonne l’univers crépusculaire de l’espionnage international. Sa mission le projettera dans une dimension qui dépasse le temps. Pourtant, il ne s’agit pas d’un voyage dans le temps, mais d’un renversement temporel…
Dire que Tenet, le dernier film de Christopher Nolan, était attendu est un euphémisme, tant le film s’annonçait comme l’un des grands films de 2020 aux côtés de Dune de Denis Villeneuve. Mais 2020, c’est un peu une pu**. Elle nous retarde Dune de Décembre 2020 à Décembre 2021, et nous sort Tenet à la fin de l’été, alors que personne ne veut aller en salles. Il faut dire aussi que pour la récouverture des cinémas, le public ne voulait pas forcément se prendre la tête avec un film concept qui dure 2h30. Tenet fut donc un échec, financier déjà, ce qui est rare pour Christopher Nolan. Aux Etats Unis, il n’aura récolté que 57 millions, sur une mise initiale de 205 millions. Heureusement qu’il se rattrape largement à l’international pour être rentable, mais tout de même. Dire que le film a légèrement divisé le public, c’est un euphémisme ça aussi, tant Tenet fait parler de lui depuis sa sortie. D’un côté, les détracteurs de Nolan, qui voient là un réalisateur qui a une liberté totale pour faire ce qu’il veut et nous livre un film concept mélangeant science fiction et histoire à la James Bond, et qui du coup, sans personne pour le nuancer, fait un peu n’importe quoi. Et de l’autre, les fans de Nolan, qui crient au génie. Ce qu’il est facile de comprendre, car justement, un peu comme Villeneuve, Nolan a un style bien à lui, appliqué, et accorde une grande importance à la dramaturgie et au développement des personnages. Vu l’ampleur de ses métrages, on n’échappe jamais à quelques raccourcis ou quelques faux pas, comme pour The Dark Knight Rises par exemple, mais facilement excusable face à la grande qualité du reste. Et même sans aimer ces métrages, il faut reconnaître à Nolan un talent visuel. Et une envie visuelle qui fait parfois crier lorsque l’on regarde chez soit ses métrages, avec des scènes qui changent de format d’image, en fonction du tournage en Imax ou en caméra traditionnelle. Bref, Tenet. Ou Tenet à l’envers, dans les deux sens, ça fonctionne. Un film monstre qui tient à Nolan, et on comprend vite pourquoi.
L’homme avait déjà prouvé par le passé son attachement à la saga James Bond, notamment avec la longue séquence dans la neige pour Inception, ironiquement une des séquences qui me plait le moins du métrage, mais passons. Comme pour Inception d’ailleurs, Nolan prend un concept à lui, et se retrouve seul au scénario. Il n’adapte rien, son film n’est pas un remake, ni une suite. Mais dans son ADN, l’affiliation avec la saga James Bond n’a jamais été aussi énorme. Par contre, on sent le réalisateur qui a totalement carte blanche. Car dans les petits détails, avec Tenet, il fait l’exact opposé d’Inception. Inception prenait son temps, nous expliquait en long, en large et en travers son concept pour rendre le métrage accessible à tous dés le début. Inception accordait énormément d’importance aux personnages et à leurs parcours, d’ailleurs, ils étaient le moteur de l’intrigue, sans doute l’élément le plus important. Tenet en est l’exact opposé. Le concept est vaguement expliqué passé quelques scènes, puis de nouveaux éléments arriveront, et les explications elles seront vagues pour le commun des mortels qui ne s’est jamais intéressé au temps, aux paradoxes, à l’énergie quantique et j’en passe. Des noms de concepts sont balancés, mais les dialogues n’en effleurent que la surface, pour viser l’efficacité avant tout, quitte à perdre quelques spectateurs en cours de route. Prétentieux ? Peut-être un peu, mais pour tenir un tel projet sur ses épaules, il faut bien l’être. Dans le même ordre d’idées, il y a les personnages. Souvent voir toujours au centre du récit, sauf dans Dunquerke, son avant dernier film, Tenet poursuit cette voie. Pour preuve, le héros s’appelle le Protagoniste, tout simplement, et lorsque nos héros se lancent dans une bataille, l’autre camp est appelé durant le briefing les antagonistes. Voilà qui est clair et net.
Tenet, c’est donc Nolan qui fait un peu ce qu’il veut, et radicalise un peu son cinéma par la même occasion. Et de ce fait, il faut bien le dire, tout le monde a raison. Ceux qui n’aiment pas citent en premier lieu les personnages un peu vides, voir clichés en ce qui concerne Sator, le grand méchant (Russe forcément), la prétention du projet (on en a déjà parlé) mais aussi le côté très froid du film. On ne s’attache pas aux personnages, clairement. Et ils ont raison, sur tous ces points. Mais ceux qui adorent le film ont raison également. Comment nier une mise en scène aussi virtuose, ses plans de toute beauté, ces cascades et autres explosions réelles parfois époustouflantes, son concept original qui permet tant de choses quitte à ce que l’on s’y perdre un peu et que le film nécessite de multiples visions. Inutile non plus de nier que si l’écriture des personnages n’est pas la plus grande qualité du métrage, les acteurs font un boulot plus convaincant, que ce soit John David Washington (le protagoniste), Robert Pattinson (son ami qui va l’aider), Elizabeth Debicki (la femme du grand méchant), et même d’ailleurs Kenneth Branagh (le méchant Russe), malgré le cliché de son accent Russe alors qu’il est Anglais, mais qui parvient par moment à être effrayant, et à d’autres presque pathétique. Si le temps de présence à l’écran des seconds rôles n’est pas bien grand, ils sont tous parfaits.
Seule chose vraiment sujet à débat, peu importe votre camp, la musique. Hans Zimmer ne revient pas pour composer, lui qui avait préféré travaillé sur Dune, le projet de ses rêves. S’il savait tout le retard que le studio a posé sur les épaules de Dune, il aurait très bien pu faire les deux… Il est donc remplacé par Ludwig Göransson, pas un inconnu puisque l’on lui doit ses derniers temps les scores de pas mal de séries (dont la série Star Wars), mais aussi des deux Creed, Black Panther, Venom ou encore Death Wish. Pas toujours du grand cinéma, mais un CV plutôt sérieux et conséquent malgré tout. Il signe ici un score musical souvent très bruyant, où certaines notes semblent jouer à l’envers pour coller au film. Sans doute parfois trop bruyant mais allant de pair avec le rythme endiablé du film qui enchaîne les grosses séquences, qui a malgré tout de belles trouvailles (le thème de Sator avec ces bruits de d’appareils respiratoires), et se fait dans le fond tout aussi radical que le film en lui-même. Un film généreux, virtuose par certains aspects, prétentieux par d’autres, parfois maladroit, parfois moins intéressant sur certains aspects que le reste de la filmographie de Nolan, mais un film à grand spectacle qui nous donne du grand spectacle, sans artifices, sans CGI, filmé de manière compréhensible, et qui, dans son optique très « James Bondienne », multiplie le côté aventures de l’agent Britannique. Les changements de lieux, les décors paradisiaques, les scènes d’infiltrations, les séquences d’action. Du pur Bond, jusqu’à une bonne partie de son intrigue, pouvant rappeler Permis de Tuer, où notre protagoniste infiltre le gang ennemi et essaye de jouer sur les deux tableaux pour obtenir ce qu’il veut. Un bel hommage donc, tout en utilisant son concept pour ne ressembler à nul autre film que lui-même, Tenet était voué à diviser. Ce qui est sûr, c’est qu’il mérite amplement d’être vu.
Les plus
Visuellement impressionnant
Un rythmé endiablé qui ne faiblit jamais
D’excellents acteurs
Un concept intéressant
De belles trouvailles musicales parfois
Les moins
Des personnages un peu vides et clichés
Musicalement parfois trop bruyant
Un brin prétentieux ?
En bref : Tout ce qu’on a dit sur Tenet, en bien comme en mal, et bien c’est vrai. C’est prétentieux, bruyant, trop froid dans son traitement, et parfois trop vide dans ses personnages, mais ça impressionne, c’est virtuose, ça enchaîne les séquences en poussant toujours plus loin son concept.
Je suis très heureux de lire une si belle critique de ce Nolan qui restera sans doute, avec Dark Knight Rises, un des plus mal aimés. Il n’est, c’est vrai, pas aussi profond que Dunkirk ou Interstellar. Néanmoins, il regorge de qualités techniques et d’efficacité parfaitement soulignés dans ton propos. On rêverait en effet d’un James Bond aussi cortiqué que celui-ci, certains épisodes récents signés Mendès ont tenté de s’en approcher d’ailleurs. On pourrait tout autant les qualifier de prétentieux. Nolan aime le cinéma généreusement, aime partager cette passion en proposant des choses nouvelles, en misant sur l’intelligence du spectateur, en réfléchissant sur la forme. A ce titre, il n’est pas plus prétentieux qu’un Alfred Hitchcock, un Stanley Kubrick ou un Orson Welles. Sans doute un peu plus brouillon avec Tenet, et on ne le rate pas sur certaines maladresses. Il y a pourtant des reflets très beaux dans cette intrigue temporelle, à travers le personnage féminin. Ils rappellent « la Jetée » de Chris Marker, qui lui-même admirait le Vertigo d’Hitchcock au point de le citer dans son film.
Tenet, qu’on l’aime ou non, restera néanmoins comme le blockbuster maudit de 2020, le phare dans la tempête Covid.
Content que la critique te plaise. J’ai voulu rajouter des éléments après coups, vis-à-vis par exemple de sa manière de filmer certains actes terroristes (notamment certaines scènes de The Dark Knight Rises il me semble), comme la scène d’ouverture, qui rappelle fortement ces antécédents filmiques, mais j’ai préféré laisser mon premier ressenti. Après je pense que la réception de The Dark Knight Rises, outre le « plan Cottillard », c’est surtout du à l’attente après le précédent volet magistral.
Mendès sur Skyfall et Spectre ne joue pas spécialement au même niveau (quoi que Spectre de mémoire reste très efficace, Skyfall déjà plus lent dans son déroulement), mais bon, les films bénéficient de la photo de Deakins, et ça leur donne déjà un cachet totalement à part.
Personnellement, comme je le souligne, je pense que pour mener d’aussi gros projets, avec d’aussi gros budgets, avec une histoire qui, bien que dans les faits classiques (le parallèle avec l’opus de Dalton me paraît évident), n’adapte rien du tout, il faut un brin de prétention, et ce n’est pas forcément péjoratif.
Et finalement, Tenet reste l’un des seuls blockbusters de l’année, une année assez pauvre en sortie tout court d’ailleurs. J’ai préparé comme chaque année mon top et mon flop, et pfiou, j’ai bien galéré.
Enfin pu louer Tenet ! J’ai trouvé ça pas mal mais loin des meilleurs Nolan – l’impression qu’il se parodie presque dans ce film concept qui propose du grand spectacle très tordu en le dénuant d’humanité. J’ai trouvé ça très froid et par conséquent parfois peu immersif. J’ai donc bien aimé sans pour autant sauter au plafond/tomber du plafond. Le côté « James Bond plus noir et SF » m’a particulièrement plu. Le casting aussi, à l’exception de Washington… peu convaincant à mon sens.
Mais vraiment pour moi le grand problème du film c’est la distance qu’il met (volontairement ?) entre ce qui se passe à l’écran et le spectateur. On est loin, très loin en fait : on a du mal à « entrer » dans le film. D’abord à cause de la narration et du concept très difficiles à digérer, et pour comprendre ce qui se passe il faut être concentré à 100%, un peu comme on lirait la notice d’un appareil électronique compliqué à monter – ça éloigne considérablement le spectateur de l’immersion cinéma. Ensuite, les personnages, d’une froideur gélive. C’est aussi sans doute volontaire, mais mon dieu… Qu’il est difficile de s’attacher à tous ces gens, de s’émouvoir, d’avoir le sentiment de marcher dans leurs pas et de frémir à leur côté.
Ça on est clairement d’accord, on est loin de films comme LE PRESTIGE, THE DARK KNIGHT ou INTERSTELLAR. Mais j’ai l’impression que c’est vraiment la première fois depuis très longtemps qu’il livre un travail aussi froid au niveau des personnages et de l’ambiance en général. Mais techniquement, les scènes et tout, ça reste du haut niveau qui écrase énormément de gros budgets (et en 2020, tous les gros budgets ? IL n’y en a pas eu des masses, et je n’ai que WONDER WOMAN pour comparer donc forcément haha).
Comme beaucoup donc, tu retiens surtout Pattinson ? Ça prouve bien qu’il a énormément évolué comme acteur depuis ses débuts.
En tout cas, la seconde vision pour moi a été meilleure, car justement, le concept et certaines idées/scènes étaient digérées.
Bon, et dans tout ça, ta femme a aimé? haha
Ma femme ? Elle a trouvé ça bien sans plus mais elle a décroché au bout d’un moment, et je la comprends. ^^ Pattinson, mais je l’adore ! Je n’en avais entendu parler qu’en mal à cause d’une série télé avec des vampires (que je n’ai jamais vue), mais franchement, dans tous les films où j’ai eu la chance de le suivre, je l’ai trouvé bon, voire très, très bon : COSMOPOLIS (que j’aime pas trop d’ailleurs, je vais lui donner une 2nde chance un jour), LOST CITY OF Z, THE LIGHTHOUSE… Je l’adore ! Je présume que la série télé en question devait être mal dirigée, mal écrite, les acteurs blasés, etc. Je suis même pas loin de miser une pièce sur cet acteur pour qu’il entre dans le Top 5 masculin à Hollywood dans les 10 prochaines années.
PS : en fait, TENET, c’est quand même pour moi peut-être le moins bon Nolan (parmi ceux que j’ai vus – INSOMNIA et FOLLOWING pas encore visionnés).
Oui je demande car en général, il y a au moins sa note sur ton blog, mais comme tu ne parleras pas de TENET là-bas, j’étais curieux ^^
On a le même point de vu sur lui. Je pense que la fameuse série télé en question c’était juste un choix pour percer un peu dans le milieu, gagner de la tunes et se faire connaître de certains spectateurs, être bankable en quelque sorte, car dés que c’était terminé, il était chez Cronenberg. Le jour et la nuit. Rah je suis vraiment le seul à l’aimer ce COSMOPOLIS ! Je vais me le refaire pour la peine, rien que pour le splendide score de Howard Shore et du groupe Metric. Tu reverras Pattinson l’année prochaine – euh non, cette année en fait – dans le nouveau BATMAN, même si bon, un peu marre de revoir un reboot de BATMAN haha.
INSOMNIA, si tu n’as pas vu l’original, c’est un excellent polar, porté par deux grands acteurs (et avec un minuscule petit rôle pour mon actrice Canadienne préférée, Katharine Isabelle). Par contre si tu as vu l’original, ça fait un peu plus mal, c’est un remake qui n’ajoute pas grand-chose, un peu inutile. Irréprochable techniquement oui mais inutile. L’éternel souci des remakes surtout quand ils sont fait seulement quelques années après l’original. Par contre oui tiens jamais vu FOLLOWING, il faudrait que je le trouve.
Lors du premier visionnage, je n’ai pas tout compris mais j’ai été pris dans le film, son histoire et ce fut tout simplement un énorme plaisir ! Malgré la durée du film, le temps est passé vraiment très vite.
La scène sur l’autoroute avec la voiture inversée, le début dans l’opéra, l’avion qui fonce dans le hangar, le combat du protagoniste contre « l’homme au masque à gaz » etc… mais quel pied putain !
Je comprends également que certains spectateurs puissent être un peu déçu de ce film. Il est un peu difficile de rentrer vraiment dedans à cause de son histoire. Surtout quand il s’agit de retour dans le passé, mais bon, sans réellement savoir pourquoi, personnellement, ce fut un pru plaisir !!
Maintenant qu’un collègue m’a expliqué un ou deux éléments, je laisse quelques semaines passées et je me lance dans un second visionnage. Impatient !
Et pour le plus important : au top ta critique ! Comme d’hab !
Pareil, je n’ai pas tout compris le premier coup, j’ai écris mon texte après l’avoir revu (j’ai proposé la projection à ma mère, qui regarde peu de films maintenant, mais aime toujours beaucoup Nolan).
Comme toujours chez Nolan, c’est rythmé, on ne s’ennuie pas, et l’action a très peu recourt aux CGI du coup chaque cascade en met plein la vue. Même si on est d’accord, c’est loin d’être son meilleur métrage, ce n’est pas parfait. Le film a souffert du coup de sa sortie lors d’une année où le public n’était pas prêt à se prendre un peu la tête sur un métrage de 2h30 et voulait juste se divertir.
En effet, ce n’est pas non plus son meilleur film. Je suis entièrement d’accord avec toi !
Il est vrai que voir un film sans des tonnes de CGI, c’est vraiment très agréable.
Et ta mère a appréciée le film ?
Pas son meilleur, mais en soit, il n’a jamais fait un mauvais film, et c’est déjà un exploit en soit !
Bon il doit bien y en avoir, parfois même pour des trucs cons genre effacer quelques éléments indésirables à l’image, mais c’est judicieusement utilisé. Ou bien pour améliorer un élément déjà présent.
Elle a bien aimée oui, elle n’a pas bougée pendant les 2h30 du canapé, donc c’est bon signe.