Titre original : 修羅雪姫
1973 – Japon
Genre : Chanbara
Durée : 1h37
Réalisation : Fujita Toshiya
Musique : Hirao Masaaki
Scénario : Nagata Norio
Avec Kaji Meiko, Hasegawa Horisho, Kurosawa Toshio, Daimon Massaki, Okada Eiji, Akaza Miyoko, Uchida Shinichi et Chii Takeo
Synopsis : Yuki est condamnée depuis la naissance à une vie de vengeance. Mise au monde en prison par sa mère Sayo pendant le début de l’ère Meiji au Japon, la jeune fille sera élevée dans l’art du sabre, avec pour seul but de venger sa mère décédée.
Directement après avoir tournée La Mélodie de la Rancune, quatrième opus de la saga Sasori, qu’elle quitta, Meiko Kaji rejoint la Toho pour tourner le premier opus de Lady Snowblood, film adapté lui aussi d’un manga. Une suite vu le jour peu de temps après, toujours avec Kaji Meiko, et aujourd’hui, en France, le film est surtout connu pour avoir été pompé par Kill Bill de Tarantino (le thème musical, la scène sous la neige, un personnage pouvant être vu comme une nouvelle version de Yuki, le découpage en chapitre, un par ennemi, le passage animé, l’histoire en elle même). Lady Snowblood s’inscrit dans la grande tradition des films de sabre japonais des années 70, après la saga des Baby Cart et j’en passe, en situant son histoire dans un contexte historique intéressant pour broder dessus une histoire de vengeance classique (dans la forme, car le point de départ lui est totalement original). Vers 1870 au Japon, les choses changent, surtout en politique. Le Japon découvre en effet la force militaire et technologique des pays d’Occident, et une période de trouble commence. En Janvier 1973, une loi arrive, obligeant tous les hommes de 17 ans ou plus de s’inscrire pour rejoindre les forces armées. On ne pouvait y échapper qu’en payant une taxe, élevée. C’est ainsi que le Japon enverra dans les villages des recruteurs, habillés de blanc. Le peuple se rebella et il y eu beaucoup d’émeutes, si bien que la couleur blanche devint le symbole de la mort. C’est dans ce contexte que se situe l’histoire de ce premier Lady Snowblood, Shurayukihime en Japonais, qui est un habile jeu de mot entre Shirayuki-hime, voulant dire Blanche-Neige et Shura, signifiant Carnage. Lors de cette période, la famille d’un nouvel enseignant arrive dans un village. Par malheur, il est habillé en blanc, et le gang du village ne voudra rien entendre. Le père se fera assassiner, la mère se fera violer pendant trois jours consécutifs, et finira par être enfermée en prison à vie. C’est dans ce contexte qu’arrive la partie la plus originale du métrage, qui le démarque de tous les autres films de vengeance. Ne pouvant l’accomplir elle même, étant enfermée en prison, la jeune femme va accepter le fait de donner « du bon temps » aux gardiens, dans le but de tomber enceinte et de donner naissance à un enfant, qui devra accomplir sa vengeance. C’est dans ces circonstances que nait Yuki, Kaji Meiko donc. Le film peut alors vraiment débuter, et immédiatement, si l’on remarque les qualités et les limites du métrage, l’influence qu’il a eu sur Kill Bill saute aux yeux dés la scène d’ouverture, lors d’un combat sous la neige, ou les membres sont coupés et le sang coule à flot.
Comme à son habitude, nous retrouvons pour la musique d’ouverture une chanson interprétée par Kaji Meiko elle même, chanson qui, comme le thème de La Femme Scorpion, sera reprit dans Kill Bill. Immédiatement, ce qui nous saute aux yeux, c’est le personnage de Yuki. Elevée dans le but unique d’assouvir la vengeance de sa mère, qui mourut en lui donnant la vie, Yuki n’a pas d’autres buts, pas de passions, rien, juste un désir de vengeance pour sa mère qu’elle n’a pas connue. Un personnage déshumanisé qui ne connaît finalement pas grand chose de la vie. Sa jeunesse ne fut qu’entrainement, après qu’elle fut recueillie par une amie de sa mère à sa sortie de prison. Son rapide entrainement qui nous sera montré en flashback remmènera encore une fois à Kill Bill malheureusement, tout comme la structure du film en lui même. Pour venger sa mère, Yuki a une liste de cinq personnes qu’elle doit tuer. Et le film sera donc découpé en cinq chapitres, de durée inégale, chaque chapitre pour une personne à abattre. Chaque chapitre nous donnera donc droit à des combats, qui pour certains n’ont, il faut l’avouer, rien d’extraordinaire, mais le réalisateur soigne véritablement sa mise en scène, si bien qu’une ambiance étrange et magnifique se dégage du métrage. Deux principaux éléments vont aider à s’immerger totalement dans le métrage. D’un part, comme je l’ai déjà dit, il y a le personnage interprété par Kaji Meiko, très intéressant, bien que certains points auraient pu être plus poussé, notamment le fait qu’elle n’a jamais eu de vie normale, et qu’une fois sa mission accomplie, elle n’aura plus vraiment de but dans la vie. Mais elle possède une telle présence à l’écran, autant lors de ces rares scènes de dialogue (comme Sasori dans La Femme Scorpion, Yuki parle peu, préférant ne placer qu’une ou deux phrases bien senties au bon moment) que lors des combats ou lorsqu’elle lance un regard noir qu’elle est unique.
De l’autre côté, la mise en scène, avec ses cadrages travaillés, l’enchaînement très classe et rythmé des différents plans, et le travail sur les couleurs est absolument sublime. Dommage que pour le moment, aucune édition DVD ne rende vraiment hommage à ce travail, si ce n’est l’édition Japonaise non sous titrée (évitez l’édition anglaise). Au fur et à mesure de l’avancée du métrage, le réalisateur ajoutera de nouveaux personnages, notamment un jeune homme, qui écrit des histoires publiées dans le journal, et qui va décider d’écrire l’histoire de Yuki (permettant au film de caser quelques dessins dans le métrage, idée déjà reprise dans… Kill Bill), afin de l’aider à démasquer ses futures victimes. Car Yuki ne s’arrêtera pas avant la fin, quitte à être blessée, quitte à mourir, et quitte à laisser les proches de ses victimes avec un sentiment de vengeance équivalent au sien. Un point intéressant et en général peu exploité dans les films de cette époque. Lady Snowblood est donc un peu un film précurseur, un film de vengeance abouti visuellement et avec des idées originales, le tout porté grâce à la présence de son actrice principale, dont on ne pourrait que regretter finalement que le manque d’ampleur donné aux combats, qui finalement sont relativement assez courts, mais pas avides en giclées de sang surréalistes et membres tranchés. Ajoutons à cela une fin relativement triste qui fonctionne, et on n’a qu’une envie, c’est d’enchaîner sur le second opus. Du grand cinéma d’exploitation des années 70.
Les plus
Sublime mise en scène
Kaji Meiko
Un film précurseur
Un point de départ original
Très beau thème musical
Les moins
Pompé à 80% par Kill Bill
On a vu mieux en combats
En bref : Un très grand film de vengeance qui en inspira beaucoup par la suite, avec la sublime Kaji Meiko (la saga Sasori).