AD ASTRA de James Gray (2019)

AD ASTRA

Titre original : Ad Astra
2019 – Etats Unis
Genre : Science Fiction
Durée : 2h03
Réalisation : James Gray
Musique : Max Richter
Scénario : James Gray et Ethan Gross
Avec Brad Pitt, Tommy Lee Jones, Ruth Negga, Donald Sutherland, Kimberly Elise, Loren Dean et Sean Blakemore

Synopsis : L’astronaute Roy McBride s’aventure jusqu’aux confins du système solaire à la recherche de son père disparu et pour résoudre un mystère qui menace la survie de notre planète. Lors de son voyage, il sera confronté à des révélations mettant en cause la nature même de l’existence humaine, et notre place dans l’univers.

Il y a des réalisateurs dont je ne parle pas beaucoup mais pour lesquels j’ai une affection particulière. Et ça tombe bien, parce que 2019 m’aura gâté à ce niveau là. Le nouveau Sono Sion sur Netflix, le nouveau Bong Joon-Ho qui repart de Cannes avec la Palme d’Or, ou encore ce Ad Astra d’un certain James Gray. Un réalisateur à la courte carrière certes, seulement 7 films en 30 ans, mais qui a su marquer et se forger une solide réputation. The Lost City of Z, Two Lovers, La Nuit Nous Appartient, The Yards. Oui, du cinéma d’auteur qui ne parle pas à tout le monde, souvent résolument lent, mais lent ne veut pas dire chiant. Dernier opus en date donc, faisant en quelque sorte suite à The Lost City of Z en terme de thématiques, Ad Astra. Ou quand le réalisateur annonce ces deux influences, sacrément voyantes à l’écran, sans que cela ne dérange. Ad Astra, c’est donc l’histoire de Roy, qui va devoir traverser l’espace pour retrouver son père, qui fait un peu n’importe quoi au niveau de Neptune. Une mission pour ramener le père, même si sur Terre, la Nasa préférerait plutôt bombarder l’endroit et donc l’éliminer. Ce voyage, cette quête, on pense à Apocalypse Now, le réalisateur ne s’en cache pas. Mais niveau rythme, ambiance, beauté visuelle pure et dure, c’est plus du côté de 2001 qu’il faudra aller piocher. Ça tombe bien, j’adore les deux films. Et comme la plupart de mes films de science fiction préférés, Ad Astra est avant tout un voyage interne, humain. Oui, j’adore Blade Runner et sa suite, j’adore 2001 et sa suite, j’adore Moon, et ce sont au final des films de science fiction plus intimes, qui souvent privilégient les émotions et le voyage intérieur des personnages. Ad Astra est de ceux là. Tommy Lee Jones joue le père, perdu au loin autour de Neptune, à la recherche d’une vie extraterrestre.

Y-a-t-il de la vie là-bas ? Ce n’est finalement pas le propos du film, et qu’il réponde ou non à la question, ça ne changera rien au film, qui met en avant Brad Pitt dans le rôle principal de Roy. Ad Astra est son voyage. Imparfait, mais pour peu que l’on rentre dans l’ambiance, hautement satisfaisant. De par sa beauté plastique bien évidemment, Ad Astra étant à tout point de vu sublime pour les yeux. Mais pas que. Sublime pour les yeux, sublime pour les oreilles (merci Max Richter, et merci le sublime morceau Says de Nils Frahm qui passe en boucle maintenant chez moi), mais en rentrant dans l’ambiance, sublime pour le ressenti. Car il y a, en effet, des défauts à ce Ad Astra. Des défauts qui pourraient s’avérer très gênant si on ne rentre pas dans la proposition de James Gray, et qui ne changera rien à l’appréciation de l’œuvre le cas contraire. Heureusement pour moi, je me suis pour le coup trouvé du bon côté. Après une scène d’ouverture tout bonnement impressionnante visuellement, on envoie Roy aux confins du système solaire. Enfin, sur Mars en réalité au début, avec un arrêt sur la Lune. Lune devenue un piège à touristes avec ses prix exorbitants. Il ne manquerait plus que les chauffeurs de taxi arnaqueurs aux portes de la station pour que je ne me sois cru revenu à Kiev en Ukraine. Blague à part, Ad Astra nous parle du long voyage de Roy, et un voyage, si tout se passe bien, ce n’est pas très impressionnant, ni intéressant, et le scénario lui met à intervalle régulier des bâtons dans les roues. Le souci, c’est qu’au final, beaucoup de ses soucis sont des petits défis, vite surmontés, peu crédibles par moment, et qui n’ont que peu d’incidence sur l’ensemble du récit. Une course poursuite sur la lune ? Une station abandonnée avec un possible élément hostile à l’intérieur ? La traversée d’un lieu dangereux pour infiltrer une navette ? Pas de souci pour ce brave Brad Pitt. Peu crédible par moment à l’écran, mais encore une fois, pour peu qu’on soit à fond dans le film et son ambiance, ça passe. Mieux, la maestria avec laquelle James Gray traite son film ferait tout passer.

La course poursuite sur la lune, si elle ne change rien en soit, et se termine de manière improbable (quel coquin ce Brad Pitt, il a un véhicule tout cheaté), fait clairement le boulot et s’avère palpitante, à défaut d’être un moment clé, ou aussi intéressante que ce qui l’entoure. Car oui, Ad Astra est un film qui se base énormément sur le ressenti du spectateur et donc son ressenti vis-à-vis du voyage intérieur de Roy, dans sa quête pour retrouver son père qu’il n’a jamais vraiment connu, et donc pour affronter son propre passé, aller de l’avant, s’affirmer, ne pas refaire les mêmes erreurs. Rien de bien neuf, mais le tout est traité avec plus ou moins de subtilité, et avec le ton qu’il faut pour nous hypnotiser. Ou m’hypnotiser en tout cas. Car oui, si je pardonne tout, je pourrais bien dire que la voix off que l’on aura tout le long du film n’est pas la meilleure idée, s’avérant parfois envahissante ou un peu lourde, alors qu’elle correspond justement au trip du film et de son voyage intérieur. Et j’ai trouvé ça un peu dommage, alors qu’ironiquement, le monologue venant à la fois ouvrir et clore le film sont plutôt bien vus. Mais fonctionnent moins durant l’aventure. N’aurions nous pas encore plus ressenti la solitude de Roy durant ses longs jours de voyage en étant, comme lui, plongé dans le silence, dans cette ambiance froide, morte ? Je chipote ? Oui sans aucun doute, surtout qu’à mes yeux, Ad Astra est une grande réussite, et un film qui était clairement destiné à me plaire par ses nombreux choix, esthétiques ou allant bien au-delà. Hypnotisant, beau, sachant prendre son temps sans jamais ennuyer une seule seconde, et au final, un métrage ultra positif dans son message. Positif, plutôt beau, et surtout collant avec le voyage interne de Roy. Et nous, spectateurs, nous voyageons avec lui de la plus belle des manières ! Si Ad Astra n’est probablement pas le meilleur film de 2019, il restera un de ceux qui me parlera le plus longtemps, et que je reverrais avec grand plaisir pour revivre son voyage.

Les plus

Un film sensitif
Visuellement somptueux
La musique, somptueuse aussi
Brad Pitt, épatant
Un voyage intérieur réussi

Les moins

Des rebondissements peu crédibles ou peu utiles
La voix off, parfois de trop

En bref : Ad Astra est un merveilleux voyage intérieur et sensitif aux confins du système solaire. Travaillé, beau à en pleurer, hypnotisant vraiment si l’on rentre dedans, et positif. Pas parfait, mais si on l’adhère à la proposition de James Gray, on passe outre les défauts.

9 réflexions sur « AD ASTRA de James Gray (2019) »

  1. Wow ! Quelle belle plume tu nous as sortis pour t’envoyer vers les étoiles !
    Complètement d’accord avec toi sur l’ensemble, fascinant même si parfois peu crédible (ce bond à travers les anneaux de Neptune, hum…) Peu importe, mettons cela sur le compte de l’ivresse de l’espace. Par contre cette odyssée du père, cette quête du divin (en fait, Roy, c’est Perceval ?), cette vision quasi bradburryenne de Mars avec ses autochtones dégénérés, tout cela dit tellement de notre incapacité à nous projeter physiquement aussi loin que porte notre regard.
    James Gray sait encore nous faire rêver.

    1. Pourtant je ne suis pas totalement satisfait de mon article, pour cela qu’il me semble que je passe plus de temps à parler de ces quelques moments peu crédibles que des grandes réussites du métrage, puisqu’il est plus difficile de poser des mots sur du ressenti pur. Et oui, le bon aussi à travers les anneaux de Neptune, je crois d’ailleurs que j’ai levé un sourcil pendant une seconde en voyant ce qu’il se préparait à faire ce brave Roy, avant de me dire « non mais ça passe ».
      Mais je tenais néanmoins à parler d’un de mes coups de coeur de 2019 avant de parler de quelques films plus légers prochainement. Attends toi donc avec humour à du lourd avec le nouveau Michael Bay, oh dieu de la subtilité, mais également à un petit texte sur le dernier Tarantino et ce dangereux objet que l’on appelle « boite de conserve d’aliments pour chien », ainsi que sur le dernier De Palma, malheureusement bien du niveau d’un DTV comme sa sortie DTV le laissait présager, mais pas inintéressant.

      1. Oh, voilà un programme alléchant (comme une saucisse grillée ) !
        Je crois que je vais me refaire « once upon a time » pour les fêtes, histoire de me remettre en appétit. 😀

        1. Ha ha, si tu fais référence à une fameuse scène avec un lance-flamme, je valide ! Après, le film ne m’a pas subjugué. Trop long, des moments et personnages inutiles, contrebalancés par des moments de grâce il est vrai.

            1. Et puis ça reste l’un des meilleurs fusils de Tchekhov que j’ai pu voir de ces 10 dernières années. Qu’est-ce que j’ai ri !
              Ah oui carrément ? Bon, le fait que j’ai aimé alors que je ne suis plus pote avec Tarantino depuis un bail, c’est déjà un miracle en soit de mon côté. Je réfléchis justement à mon top de l’année, mais non, Tarantino n’y est pas 😛

    1. Au ciné c’était grandiose. Les plans, le son qui monte en DTS. Dommage que le film divise autant et n’a pas attiré les foules ici…

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