Titre original : Les Combattants
2014 – France
Genre : Drame
Durée : 1h38
Réalisation : Thomas Cailley
Musique : Lionel Flairs, Benoit Rault et Philippe Deshaies
Scénario : Thomas Cailley et Claude Le Pape
Synopsis : Entre ses potes et l’entreprise familiale, l’été d’Arnaud s’annonce tranquille… Tranquille jusqu’à sa rencontre avec Madeleine, aussi belle que cassante, bloc de muscles tendus et de prophéties catastrophiques. Il ne s’attend à rien ; elle se prépare au pire. Jusqu’où la suivre alors qu’elle ne lui a rien demandé ?
Parfois il est bon de se lancer au hasard dans un petit film Français, surtout quand après un rapide coup d’œil, les avis, autant presse que public sont plus que bons. Les Combattants donc, un film que l’on nous vend comme une comédie romantique, un genre bien trop épuisé en France, mais pourquoi pas. Pourtant, après seulement quelques instants, on se rend compte que Les Combattants sera un film différent de d’habitude. Et tant mieux. Une petite bouffée d’air frais ? Sans doute oui. Car ici, tout se joue dans un premier temps sur le décalage entre les deux personnages principaux. Arnaud d’un côté, jeune homme qui vient de perdre son père et qui semble voué à continuer l’entreprise familiale auprès de son frère. Son boulot, c’est de travailler le bois. Il n’a pas d’ambition spéciale, même sa mère tente de lui faire penser autrement, qu’il peut tenter des choses pour accomplir ses rêves, mais il n’en a pas, l’entreprise familiale lui correspond très bien. Travailler le bois et construire des abris, ça lui suffit. Face à lui, Madeleine, qu’il rencontre par hasard sur la plage alors que ses potes lui ont fait une blague en l’inscrivant à une session de combat défensif. Madeleine ne vit que pour une chose : se préparer à l’apocalypse. Oui rien que ça. Ce qui amuse en plus, c’est sa personnalité qui ira jusqu’au bout quoi qu’il arrive, quitte finalement à se priver de vivre. Apprendre à se battre, nager avec des tuiles hyper lourdes sur le dos, et fatalement, rembarrer les autres, voir les rabaisser sans forcément toujours s’en rendre compte. Encore plus « amusant », dans le contexte actuel, est de voir la scène où Madeleine est invitée à manger chez la famille d’Arnaud, et que leur différence d’opinion forcément va amener une discussion amusante, lorsque Madeleine annonce noir sur blanc que la Terre court à la catastrophe et qu’elle se prépare à survivre.
Oui, la pollution, les guerres, le réchauffement climatique, ou comme Arnaud le souligne, les virus (il ira jusqu’à dire « le coronavirus »). Mais Les Combattants ne veut pas être un film moralisateur. On le vend comme une comédie romantique. Oui, tardivement, il y aura un poil de romance. Oui, beaucoup de dialogues ou situations peuvent faire rire, et donnent un ton souvent léger. Mais finalement, parfois, le film part tout simplement vers le drame, ou tout simplement vers le choc de personnalités. Tout les oppose, et finalement, forcément, tout les rapproche. Les opposés s’attirent ? Le film dresse un portrait parfois touchant mais souvent décalé de ses deux personnages, et en effet, la scène d’ouverture, où Arnaud et son frère doivent choisir le bois du cercueil de leur père donnait le ton parfois absurde du film. Sans aller bien entendu au niveau de l’absurde d’un autre métrage dans lequel joue Adèle Haenel pour Quentin Dupieux, à savoir Le Daim. Mais son côté absurde et le côté marginal des personnages donnent immédiatement un côté attachant à l’aventure proposée. Et il est vrai que bien trop souvent en France, on nous parle de marginaux d’un certain âge, et les films parlant des jeunes sont bien trop souvent clichés et niais. Rien de tout ça ici, on s’en éloigne littéralement. Pour son premier long métrage, Thomas Cailley livre du très bon travail. Autant au niveau du scénario, que du ton général abordé, que de la mise en scène pure, privilégiant même parfois les longs moments silencieux en laissant les images s’exprimer d’elles-mêmes, chose qui est plutôt rare dans le cinéma Français, souvent bavard plus que de raison.
On peut même dire en cherchant loin que le réalisateur a directement cherché à surprendre en inversant les rôles, en faisant de l’homme le jeune homme introverti et de la femme la combattante pleine de punchlines. On pourra bien dire que dans sa seconde partie, Les Combattants abandonne un peu de son originalité lorsque les personnages partent en entrainement militaire. Les situations sont un peu plus prévisibles, et le métrage part dans une direction un peu plus attendue, celle de Madeleine qui avec son comportement et sa mentalité, a à redire sur l’entrainement, la mentalité des militaires, et la logique tout simplement de ce qu’on leur apprend. Heureusement, cette partie, sans doute moins emballante mais nécessaire et plaisante, amène à un dernier acte bien plus réussi, et qui pour le coup, arrive clairement à surprendre et m’aura même impressionné lors de certains moments, parfois extrêmement simples il est vrai (quelques déambulations en forêt), et parfois pour le coup vraiment surprenants et plus ambigus, du moins au début. Et Thomas Cailley semble bien maîtriser l’ensemble de ses situations, livrant même quelques plans glaçants sur la fin, avant de boucler son film avec une tendresse envers ses personnages, nous ramenant alors quelques scènes en arrière. Finalement, ce cheminement, parfois classique, parfois osant des choses, aura bien fait évoluer les personnages, qui par la force des choses, se ressemblent un peu plus qu’ils ne le pensaient et ont appris à ce connaître en voyant au-delà de la simple image qu’ils avaient l’un pour l’autre au premier regard. Et comment ne pas achever cette chronique sans un petit mot pour le son, et notamment la musique, excellente du métrage et signée à trois. Le thème de fin tourne souvent chez moi à présent, me rappelant cette aventure que je viens de suivre.
Les plus
Deux personnages attachants
Drôle dans l’absurde parfois
Un film frais
Des moments clairement surprenants
Les moins
Un deuxième acte plus classique
En bref : En inversant les rôles classiques et en jouant sur différents humours (absurde, répétitivité, punchlines), Les Combattants parvient à être un film frais qui mélange plutôt habilement les genres, le tout porté par un très bon casting.
Pas vraiment le souvenir d’une « comédie romantique » pour ma part, et ton chouette article permet de recadrer comme il convient la tonalité de cette belle réussite. Certes, Adèle a encore la tête des mauvais jours, plus farouche encore qu’à la Naissance des Pieuvres. Je crois d’ailleurs que Cailley, avant de se lancer à travaillé avec Sciamma. Il y a quelque chose d’attachant et d’humain dans cette chronique d’apprentis soldats, une forme de proximité sans prise de tête qui me plaît dans ces films fauchés de la production nationale. Tu m’as donné envie de le revoir dis-donc.
Ah je me disais justement que cet article allait passer inaperçu (vu que je parle rarement de films Français au final), mais tu es toujours dans un coin pour partager tes impressions.
Adèle disait justement qu’elle aimait travaillait avec les réalisateurs qui signent leur premier film, car même si il y a des maladresses, ils ont une énergie et motivation qui est propre aux premiers films. Et c’est exactement ça pour Les Combattants, je l’ai ressenti ainsi en tout cas, et je ne regrette pas du tout la découverte.
Avec le confinement, profite, tu as le temps de revoir pas mal de films 😉 (pendant que moi, je galère mais je prépare quelques articles polémiques, notamment sur un super héros haha).
Pas tant de temps que ça. Je suis aussi au boulot, de chez moi.
J’ai le temps de lire tes articles et y répondre, c’est déjà ça. 😉
Moi ce que je retiens de ce film c’est quand même :
« Ben si c’est ça les meufs cet été, merci et Vive la France ! » 🇫🇷
Je suis jaloux tu sais ! Demain j’ai un jour de repos, mais je sais que je serais totalement crevé et brisé, et ne vais pas glander grand-chose… J’ai hâte de retrouver une vie normale.
Ha ha je me souviens, dialogue au tout début après la première rencontre ça, et une première morsure 😉