AFFAMÉS (Antlers) de Scott Cooper (2021)

AFFAMÉS

Titre Original : Antlers
2021 – Etats Unis
Genre : Horreur
Durée : 1h39
Réalisation : Scott Cooper
Musique : Javier Navarrete
Scénario : C. Henry Chaisson, Nick Antosca et Scott Cooper

Avec Keri Russell, Jesse Plemons, Jeremy T. Thomas, Graham Greene, Scott Haze, Rory Cochrane, Amy Madigan et Cody Davis

Synopsis : Dans une petite ville minière de l’Oregon, une institutrice et son frère policier enquêtent sur un jeune écolier. Les secrets de ce dernier vont entraîner d’effrayantes conséquences.

Quand j’ai posé mes yeux sur Antlers, j’ignorais tout de lui. Ce n’est que peu de temps après, et une discussion éclairée avec un cher collègue, que j’ai appris que oui, le film avait un titre Français, Affamés donc, et surtout, que le film était en plus sorti en France, et au cinéma. Et du coup, 1h39 après le lancement du film, ma surprise n’en fut que plus plaisante. Non pas car Antlers est une pépite, mais car c’est une série B, bien filmée, bien éclairée, au suspense qui se tient, avec des personnages moins stupides que dans un banal slasher, bref, une série B tout ce qu’il y a de plus respectueuse, très éloignée des standards actuels (pas de found footage, pas de jumpscares à outrance pour camoufler un manque de talent), et qui a eu droit à une sortie sur grand écran, dans un pays frileux comme la France, où on préfère clairement mettre en avant une énième production aseptisée signée Blumhouse et le dernier blockbuster Marvel qu’une modeste production. Comme dirait un célèbre personnage Français, et ce bien que je n’ai pas spécialement apprécié son aventure sur grand écran en cette année 2021 : Sir on en a gros ! Antlers, c’est un film qui a tout de même eu du mal à arriver, puisque filmé fin 2018, il ne débarque qu’en Octobre 2021. Mieux vaut tard que jamais. C’est sûr qu’un film horrifique avec une mise en scène bien troussée, peu de jumpscares et une créature issue d’un mythe indien pourtant bien connu, le Wendigo, ça fait beaucoup moins vendre de tickets qu’un Normal Activity, ou une énième suite. Rappelons-nous qu’en 2021, on a eu droit à un American Nightmare 5, un nouveau Saw (le neuvième), un nouvel Halloween (le 12ème). Loin de moi l’idée de critiquer gratuitement le milieu, même si c’est oh combien facile, mais force est de constater que lancer une énième suite à de longues sagas est toujours plus rassurant pour les gros studios, car même si la qualité laisse à désirer (plot twist, c’est souvent le cas), le public se ruera dans les salles. Le simple fait que Antlers ai rapporté 18 millions dans le monde, même si ça paraît peu (et que le budget du film n’a pas été communiqué), c’est tout de même rassurant, même si c’est moitié moins que le dernier Saw, tout de même considéré comme un échec, puisque sans compter le marketting, l’immonde Spiral a coûté 20 millions. Loin donc d’un Saw 2 et ses 147 millions récoltés pour 4 millions de budget.

Et Antlers donc ? Car je me doute que vous ne cliquez pas sur ma critique pour lire un essai sur l’état du monde du cinéma en 2021 ! Et bien c’était à la fois exactement ce que l’on pouvait attendre de lui, quand on sait que le réalisateur est Scott Cooper, réalisateur des Brasiers de la Colère et Black Mass, et que le tout est produit par Guillermo Del Toro. Une mise en scène appliquée, une photographie souvent léchée avec un très joli travail sur l’obscurité (la moindre des choses pour une série B à l’ancienne), et une créature qui a eu droit à un soin tout particulier, et qui me fait dire que soit les concepteurs en CGI se sont appliqués comme jamais, soit que la bête a été faite aussi en animatronic, ce qui expliquerait un tel résultat qui tient la route. Antlers nous amène en tout cas dans une toute petite ville de l’Oregon, une ville qui va mal, crise économique et tout ça. Un propos pas nouveau, ni dans le cinéma de genre, ni dans le cinéma tout court, mais dans lequel le scénario ne va pas appuyer lourdement sur ces points, mais plutôt se focaliser sur des personnages quelque peu extérieurs, à savoir, une professeur, et un de ses élèves. Oui, car tant qu’il y aura des enfants, la dame aura du travail, et ses élèves, très jeunes, n’ont finalement que faire de la crise. Scott Cooper en profite pour filmer ses décors de manière morne. C’est souvent gris, pluvieux, inhospitalier, filmé en plans larges avec de lents travellings, et ça marche du tonnerre. Rien de révolutionnaire, mais un certain savoir faire. Et encore à mettre sur le dos du réalisateur, il sait ménager ces effets, préférant poser pendant toute la première partie une ambiance, faire planer un certain doute, une ambigüité, plutôt que de nous abreuver d’images chocs, même s’il y en aura des images chocs, le film étant par moment assez sanglant dans sa proposition. Mais ça aussi, ça fait du bien. Un film de genre qui sait prendre son temps, qui tente et parfois réussi à poser une ambiance sans pour autant avoir recours à des effets faciles, et qui sait quand il peut enfin se lâcher un peu pour que son effet fonctionne.

En fait, c’est même triste à dire, car Antlers n’est qu’une série B, une simple série B bien fichue, qui fait ce qu’elle doit faire, ni plus ni moins, mais que ces points positifs, certains étant même logiques voir normaux pour une série B, se retrouvent être des qualités à une heure ou les studios ont totalement aseptisés le cinéma de genre, en lui retirant toute violence, tout propos, et en mettant des tâcherons à la mise en scène. Forcément ici, avec un vrai réalisateur qui sait ce qu’il fait, une histoire parlant de créature mythologique et de cannibalisme, il était difficile de rentrer dans le moule des studios et de livrer un produit lisse. Antlers du coup, par extension, fait du bien. Il se suit très bien même quand certains de ses twists sont prévisibles, il flatte la rétine avec une certaine simplicité dans sa mise en scène, mais qui lui donne une certaine identité qui fait plaisir aussi. Puis ses moments chocs, bien éparpillés sur la longueur du récit, fonctionnent puisqu’on ne nous abreuve pas d’effets gratuits à outrance (hein Spirale). On pourra toujours dire que quelques éléments sont un peu faciles, en mettant en scène le principe du cannibalisme dans une ville économiquement faible, en mettant en avant des acteurs enfants et donc, l’innocence, mais qu’importe, ça fonctionne plutôt bien, et Antlers captive le spectateur sur la durée. Et on pourra même saluer l’audace de Scott Cooper d’avoir utilisé son talent pour une histoire d’épouvante, s’éloignant donc de son concept souvent plus proche du western, et de ses critiques sociales (présente ici mais en arrière plan, juste pour établir un contexte). Ce qui est certain, c’est que le réalisateur n’a aucunement perdu de sa noirceur habituelle en basculant dans le genre horrifique, et cela donne un petit plus indéniable à son film, un plus que l’on n’est plus vraiment habitué à voir sur les écrans.

Les plus

Une série B très bien fichue
Un film qui ménage ses effets
Ses effets, de créatures ou sanglants, sont très bons d’ailleurs

Les moins

Mais dans le fond, ça reste de la simple série B
Bien sous tout rapport, mais un poil prévisible

En bref : Affamés reste certes une série B, mais efficace, bien filmée, bien troussée, qui n’abuse jamais de ses éléments horrifiques et fait passer un très bon moment.

A FEW WORDS IN ENGLISH
THE GOOD THE BAD
♥ A well made B movie
♥ The film knows how to handle its effects
♥ The creature, or even the bloody effects, are effective
⊗ But it remains a little B movie
⊗ A bit predictable
Antlers is, maybe, just a B movie, but it’s effective, well shot, well made, it knows when to use horror, and you’ll spend a good time watching it.

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