Titre original : La Morte Vivante
1982 – France
Genre : Horreur
Durée : 1h26
Réalisation : Jean Rollin
Musique : Philippe D’Aram
Scénario : Jean Rollin et Pierre Ralf
Avec Marina Pierro, Françoise Blanchard, Mike Marshall, Carina Barone et Jean-Pierre Bouyxou
Synopsis : Trois hommes viennent dans un château inhabité, afin de se débarrasser de futs de déchets toxiques, deux d’entre eux particulièrement curieux se dispersent dans la crypte du château où se trouve deux cercueils, l’intérêt de dérober des bijoux les poussent à ouvrir les tombeaux, c’est alors que l’un des corps se réveille, celui de Catherine Valmont, cette dernière tue les deux hommes un peu trop curieux par soif de sang frais. La morte vivante va et viens dans le château et ses alentours afin d’apaiser sa soif. Son amie d’enfance la rejoins, les souvenirs réapparaissent progressivement, c’est alors qu’elle se rend compte de son macabre état…
Les années 80 sont difficiles pour Jean Rollin. Pour continuer à tourner, il lâche son univers personnel à base de vampires pour signer des films impersonnels, dans des genres qu’il n’apprécie pas forcément. Ce tournant fut amorcé en 1978 avec Les Raisins de la Mort, puis continua avec La Nuit des Traquées en 1980, se déroulant à la Défense dans un univers froid. En 1982, il retourne aux zombies (après Les Raisins de la Mort donc), élément qu’il n’aime pas, tout comme le gore, mais parvient à implanter ces éléments dans un univers visuel qui lui est propre. La Morte Vivante se déroule donc à la campagne, dans un petit village, et même plus précisément dans un château. Et Rollin va donc tenter de mêler à cette histoire de morte vivante un aspect poétique typique de son cinéma. Est-ce que le mélange fonctionne ? Malheureusement, pas vraiment, La Morte Vivante étant, malgré quelques moments forts réussis, un métrage assez faible de Jean Rollin, où les défauts habituels de l’auteur explosent à l’écran, sans doute par les contraintes imposées sur son métrage, à l’opposé de son oeuvre. Quand le métrage commence, nous avons l’impression de nous retrouver devant un produit typique des années 80, puisque le drame arrivera la faute à des déchets toxiques. On pense à nombre de métrages du genre (zombies ou non, les déchets toxiques sont également le point de départ de… Toxic Avenger ou C.H.U.D.), et des incohérences et petits défauts frappent l’œuvre dés les premiers instants.
Des futs sont entreposés en sous sol (des futs qui sont transportés incroyablement bien, preuve qu’au moment de tourner, ils étaient vides), et ce qui frappe en premier, c’est le jeu des acteurs, très théâtral. Là où cet aspect typique de Jean Rollin passe nickel dans certains de ces métrages, car se déroulant entre rêve et réalité, ici, ça passe franchement moyen. Bien que le métrage traite clairement d’un élément fantastique, à savoir les morts vivants donc, le jeu des acteurs retire pas mal de crédibilité à l’ensemble. Que ce soit les trois hommes du début (dont Jean-Pierre Bouyxou, habitué du cinéma de Rollin mais également de Jess Franco) ou les deux personnages principaux du métrage (joués par Marina Pierro et Françoise Blanchard), ça ne passe pas. Seuls les deux acteurs du film jouant en anglais s’en sortent plutôt bien. Victimes ou bourreaux, on a ainsi du mal à croire à cette histoire. Dommage car que ce soit sur le papier ou à l’écran, il y a également de bonnes choses dans La Morte Vivante. À commencer par son histoire, puisque le métrage nous parle finalement de l’amitié entre Hélène, brune, jouée par Marina Pierro (L’innocent), vivante, et Catherine, blonde, morte, jouée par Françoise Blanchard (qui jouera l’année suivante dans La Chute de la maison Usher de Franco, ou en 84 dans Les Trottoirs de Bangkok de Rollin encore). Sur la papier, cette amitié à du potentiel, malheureusement souvent gâché.
À l’écran aussi donc il y a de bonnes choses, puisque le métrage bénéficie des effets spéciaux de Benoist Lestang, qui plus tard, s’occupera des effets de Baby Blood ou encore Le Pacte des Loups, rien que ça. Certains plans sont certes furtifs, mais ça saigne bien, et l’ensemble tient la route, avec son lot de morsures et de gorges tranchées. Certains plans sont même plutôt poétiques, comme lorsque cette femme, nue, la gorge tranchée, tombe et reste immobile, vidée de toute vie, dans l’escalier aux pieds du château. Car visuellement, on retrouve parfois la patte de Rollin dans des plans magnifiquement photographiés. Mais en se voulant moins surréaliste que ses films des années 70, Rollin a du mal à insuffler du rythme dans son métrage (passé l’ouverture, ça met un sacré moment avant de démarrer), et certaines de ses idées tombent à l’eau face au jeu (lui surréaliste) des acteurs, empêchant certaines scènes de fonctionner. Oui, La Morte Vivante a le cul entre deux chaises, entre ses intentions et le résultat final, entre ce que Rollin aime filmer et ce qu’il n’aime clairement pas mettre en scène. Pas non plus catastrophique, mais pas franchement bon non plus.
Les plus
De bons effets gores
Quelques très beaux plans
Les moins
Manque de naturel des acteurs
Peu de rythme
Pas mal de situations tombent à plat
En bref : La Morte Vivante est un film mineur pour Jean Rollin, traversé de quelques bons moments et de bonnes idées, mais qui ne fonctionnent que trop rarement à l’écran.