Titre original : Rabid
2019 – Canada
Genre : Horreur
Durée : 1h50
Réalisation : Jen et Sylvia Soska
Musique : Claude Foisy
Scénario : John Serge, Jen et Sylvia Soska
Synopsis : Rose est une jeune femme silencieuse, qui ne s’assume pas, dans son look et dans ses actions. Elle rêve de devenir designer célèbre dans le milieu de la mode, mais un accident la défigure. Elle finit par accepter un traitement expérimental pour la soigner, mais les conséquences ne sont pas toutes celles prévues…
Si parmi les fans de Cronenberg, beaucoup considèrent Rage comme un film mineur, pas moi. Il est vrai que face au reste de sa filmographie, et surtout des films qu’il fera par la suite (Scanners, Videodrome, Dead Zone, La Mouche, Faux Semblants pour ne citer qu’eux), Rage paraît quelque peu bancal, fauché parfois. Et pourtant, on y retrouve, dés ce second long métrage, tous les thèmes du cinéaste Canadien, le début de son style. Certains me diront que ces éléments sont déjà présents dans Frissons, son premier long métrage, mais trouvant Rage bien mieux maitrisé et intéressant, voilà ! Et puis il y a quelques images hautement marquantes, une Marilyn Chambers que j’aurais aimé voir bien plus souvent dans des films traditionnels, et un thème musical certes répétitif mais très joli. Mais comme chaque grand réalisateur, il était temps que les métrages de Cronenberg soient remakés. Et comme pour Carpenter dont les premiers remakes furent Assaut, Fog et Halloween (soit ses second, troisième et quatrième métrages), il faut commencer par ses débuts. Voici donc Rage, enfin, Rabid, version 2019. Bon point pour les producteurs, Rabid est toujours un petit budget, toujours Canadien, et ils ont été cherchés les Sœurs Soska pour écrire et réaliser le métrage. Et même si la suite de leur carrière n’aura pas été à la hauteur de leur second long métrage, à savoir le génial American Mary avec Katharine Isabelle, on ne peut que saluer ce choix. Après tout, les thèmes de American Mary, les modifications corporelles, tout ça c’était des thèmes qui pouvaient être dans l’univers de Cronenberg. Les voir donc à la tête du projet rassure un peu, même si elles sont aidées au scénario par John Serge, qui a bossé sur pas mal de téléfilms Canadiens.
Bref, qu’est ce que vaut cette relecture ? Est-ce un simple copié collé ? Un film qui a beaucoup à ajouter ? Une relecture différente qui ose s’éloigner de l’original ? Et bien un peu tout ça à la fois, pour le meilleur et pour le pire. Les sœurs Soska ne parviennent pas à retrouver le génie d’American Mary et signent là un remake simple dans les faits. Il conserve les scènes marquantes et iconiques du film original, mais ose parfois s’éloigner du métrage pour le reste, livrant une Rose différente pour le personnage principal, un final bien différent, supprimant quelques éléments, en ajoutant d’autres, et voilà. Le souci, c’est que lorsque le métrage veut s’éloigner du film original, il devient un peu plus classique, presque comme un banal film de zombies. Et quand il cherche à coller un peu plus au film de Cronenberg, il s’avère parfois bien maladroit. Le film délocalise son intrigue dans le milieu de la mode, ce qui donne un nouvel aspect à l’accident de Rose, puisque la jeune femme s’avère défigurée et ce n’est pas joli à voir. Les effets spéciaux sont convaincants et non jamais recourt aux CGI, ce qui est un excellent point. Défigurée et dans l’impossibilité de parler, Rose accepte un traitement expérimental, qui fait de la magie, puisque la jeune femme se retrouve guérie, comme avant voir améliorée. Seule différence, quelques cauchemars et hallucinations un brin glauques, et une attirance pour l’odeur du sang. On pense au film Grave de Julia Ducourneau lorsque Rose se met à sentir de la viande fraiche sortant de son frigo d’ailleurs. Et comme chez Cronenberg, les personnes que Rose attaque se voient contaminés par la rage. Mais ici, l’aspect ressemble à n’importe quel film de zombie actuel, et c’est un peu dommage. On a beau retrouver quelques scènes connues de l’original, comme la scène de la piscine, ou bien voir un père noël contaminé qui va se faire flinguer par la police, on a juste l’impression de voir un énième film de zombies lors de ces passages.
Le message du film original passe également quelque peu à la trappe, et les sœurs Soska se focalisent sur d’autres éléments. Des scènes d’attaques gore (morsures, doigts arrachés et j’en passe), le milieu de la mode, et bien entendu comme souvent, un petit côté sexiste. D’ailleurs à l’écran, ce sont souvent les hommes qui sont contaminés, et qui s’avèrent vulgaires envers les femmes. On retrouve là un petit côté American Mary. Mais comme je le disais, lorsque le film cherche à se raccrocher alors un peu plus au métrage de Cronenberg, comme lorsqu’il nous dévoile enfin la manière dont Rose se nourrie de sang, tout cela paraît un peu plus bancal, voir grotesque. L’agression dans la ruelle en est le parfait exemple. Mais par moment, les sœurs Soska se servent du film de base pour se laisser aller à leurs idées et à leur visuel. Et c’est dans ces quelques moments, notamment dans les scènes d’hallucinations et dans le final, que Rabid version 2019 trouve ses morceaux de choix. Le final n’a d’ailleurs plus rien à voir avec le film de 1977, et part dans un délire totalement différent qu’il est très difficile de comparer pour le coup, tant les idées sont à l’opposé. Le film parvient alors à surprendre un peu plus et à nous offrir quelques images marquantes. Ça ne retire en rien son côté bancal, et ça en fait au final un remake étrange, proche et différent de l’original. Pas désagréable, inférieur certes, mais parfois intéressant.
Les plus
Les effets spéciaux
Quelques éléments intéressants
Le final qui part dans une nouvelle direction
Laura Vandervoort convaincante
Les moins
Très bancal
Des éléments trop grotesques
Par moment bien trop classique
En bref : Livrer un remake de Cronenberg n’est pas tâche aisée. Les sœurs Soska s’attaquent donc à Rage, un de ses premiers métrages. Le résultat est étrange, entre remake, hommage et réimagination. Certains éléments fonctionnent, et d’autres paraissent trop classiques dans le cinéma de genre actuel.