Titre original : 女囚701号 さそり (Joshuu 701-Gô: Sasori)
1972 – Japon
Genre : Femme en prison, vengeance
Durée : 1h27
Réalisation : Ito Shunya
Musique : Kikuchi Shunsuke et Kaji Meiko
Scénario : Konami Fumio et Matsuda Hîro d’après le manga de Shinohara Tooru
Avec Kaji Meiko, Yokoyama Rie, Natsuyagi Isao, Watanabe Fumio et Watanabe Yayoi
Synopsis: Trahie par un policier véreux dont elle était amoureuse, Matsushima Nami se retrouve enfermée en prison, où elle va rapidement s’attirer la haine des autres détenues. Bien décidée à se venger, elle va tout tenter pour s’échapper, et ainsi devenir La Femme Scorpion.
La saga des Sasori, La Femme Scorpion est une saga totalement culte issue du cinéma d’exploitation Japonais du début des années 70. Alors que chaque studio essaye de faire face à la crise, la Toei se lancera dans des films de prison pour femmes. Beaucoup de produits, pas toujours bons, parmi lesquels quelques titres sortent du lot, dont la saga Sasori (qui veut d’ailleurs tout simplement dire Scorpion). Sasori, c’est une très (trop) longue saga, dont seulement 7 épisodes sont disponibles en France. Si les trois premiers opus, réalisés par Ito Shunya, sont assurément cultes, on ne pourra pas dire la même chose des suivants. Le quatrième opus s’en sortira tout de même avec les honneurs grâce à de très bonnes séquences, et son actrice principale, mais après le départ de Kaji Meiko, c’est la débandade dans la saga, que la Toei tentera de relancer à zéro, jusqu’en 2007 ou un remake en coproduction avec Hong Kong vu le jour (remake affreusement mauvais pour l’anecdote). La Femme Scorpion (Joshuu 701-Gô : Sasori) est le premier épisode de la saga, réalisé en 1972, et possède encore aujourd’hui, 40 ans après, toute sa force, grâce à l’équipe responsable du métrage (et des trois premiers opus, tout simplement).
A la base, La Femme Scorpion, c’est un manga culte de Shinohara Tooru, et la Toei propose la mise en scène à Ito Shunya, dont c’est le premier film. Un réalisateur plutôt discret par la suite. Censé offrir aux spectateurs et à la Toei un simple film de prison sexy avec un brin d’hémoglobine, Ito livrera finalement bien plus que cela, un film porteur d’un message, et surtout porté par une actrice d’exception, que l’on retrouvera dans les 4 premiers opus de la saga, et dans la saga Lady Snowblood (deux sagas ayant très fortement inspirées Tarantino pour ces détestables Kill Bill – Détestables pour qui en connaît les très nombreuses influences). Nous sommes dans le bain dés la scène d’ouverture, commençant par un plan sur un drapeau japonais qui flotte au vent, lorsque le chef de la prison reçoit les remerciements du gouvernement. Cérémonie qui sera alors immédiatement interrompue par l’alarme : Matsushima Nami tente une nouvelle évasion. Le rapport entre la prison et ses prisonnières maltraitées par les hommes et la société Japonaise de l’époque dirigée par des hommes alors que les femmes n’ont pas leurs mots à dire est flagrant (et le sera encore plus dans le second opus culte de la saga).
Nous comprenons par la suite qui est vraiment Nami, lors de passages purement théâtraux où nous découvrons son passé. Nami était amoureuse, de la mauvaise personne. Flic véreux prêt à tout pour gagner plus d’argent. Les hommes sont manipulateurs, sans scrupules, ils battent les femmes, ils sont prêts à tout pour évoluer et obtenir plus de pouvoir. La majeure partie du film continuera dans cette direction, que ce soit dans la prison ou dans les rares passages à l’extérieur de celle ci. Nami sera maltraitée en prison, par les gardiens, qui usent souvent de la force pour la faire parler, et même par le chef de la prison. Même les prisonnières en rajouteront une couche, Nami les énerve. Quand aux hommes à l’extérieur de la prison, ils sont également prêts à tout pour faire disparaître Nami. La jeune femme se retrouve seule contre tous, ou quasi (quelques rares prisonnières se rangeront de son côté). La Femme Scorpion développe donc des thématiques intéressantes et ne faiblit jamais en rythme, faisant monter la sauce crescendo jusqu’à un final rapide mais assez hypnotisant. Mais outre son message et son scénario, La Femme Scorpion possède deux autres atouts majeurs qui l’élèvent au rang de film culte, et quasi de chef d’œuvre. Tout d’abord, il y a la mise en scène de Ito Shunya, qui signe donc ici son premier métrage. Malgré une vitesse de croisière assez folle, il réussi là un pari fou, faisant baigner son film dans une ambiance très particulière et souvent hallucinante. Beaucoup de scènes ont des accents théâtrales, le jeu d’éclairage représente à merveille le ressenti du personnage de Nami (et le rapproche en ce sens un peu du cinéma des années 70 Italien, avec le giallo), et les différents cadres qui constituent le film sont toujours pensés avec génie.
Ito joue beaucoup avec les premiers plans et les arrières plans, pour assister le message de son film. Beaucoup de plongées, et une utilisation de l’espace souvent judicieux. La mise en scène effectue un sans faute dont beaucoup devraient prendre des leçons encore aujourd’hui. C’est simple, la réalisation sublime totalement certaines scènes. Outre le passé de Nami, on pourra citer tout simplement le meurtre sous la douche, grand moment de cinéma. Mais la Femme Scorpion ne serait rien sans Kaji Meiko, interprète de Nami, qui en tout et pour tout ne doit pas avoir plus de deux phrases dans tout le film. Toute l’émotion et son ressenti passe par son visage et son regard, hypnotisant. Elle créé un personnage unique et inoubliable (comme souvent), et nous rappelle qu’il s’agît d’une actrice exceptionnelle. En plus de jouer Nami, Kaji signe aussi la chanson d’ouverture, qui sera reprise dans les opus suivants (et par Tarantino dans Kill Bill…). Une chanson absolument magnifique correspondant à merveille à l’univers du film et de son personnage, essai qu’elle refera par la suite en signant la musique de Lady Snowblood. Kaji Meiko devient Sasori, et la saga sans elle perdra beaucoup de son charme par la suite. La Femme Scorpion est donc un film culte, le début d’une saga mythique malgré quelques rares défauts (des coups donnés à côté, par exemple), souvent oublié au profit de sa suite (Elle s’appelait Scorpion), dont les hommages sont encore nombreux aujourd’hui, parfois avec talent comme avec Love Exposure de Sono Sion, parfois beaucoup moins avec Tarantino et le récent remake.
Les plus
La sublime mise en scène
Kaji Meiko
Le message
Le thème Urami Bushi
L’ambiance du film
Des scènes cultes
Les moins
Quelques coups non donnés flagrants
En bref : Un film d’exploitation culte qui brille par une sublime mise en scène et le talent de son actrice principale.