Titre original : November
2017 – Estonie
Genre : Drame fantastique
Durée : 1h55
Réalisation : Rainer Sarnet
Musique : Michal Jacaszek
Scénario : Rainer Sarnet d’après le roman de Andrus Kivirähk
Synopsis : Dans un village païen d’Estonie où les loups-garous, la peste et les esprits errent, le souci central des habitants est de survivre aux hivers rigoureux. Sans aucun tabou. Ils se volent les uns les autres, dérobent des biens à leur seigneur allemand et même au Diable quand l’occasion se présente….
Il y a des films qui laissent une très forte impression, mais dont il n’est absolument pas facile de parler, tant l’ensemble passe d’un ressenti à un autre, et que l’univers dépeint ne trouve de logique qu’au sein de lui-même. November est un film Estonien. Le premier film Estonien que je vois de ma vie d’ailleurs. Je ne savais pas franchement à quoi m’attendre en me lançant dedans, mais les avis plus que positifs un peu partout faisaient envie. Alors November au final, aussi bien que tout le monde le dit ? Et bien oui. Mais facile d’accès, absolument pas. Il est même logique d’ouvrir grands les yeux dés le début lorsque l’on ne sait rien du film, et rien du folklore de ce pays. Puisque November, plutôt que de nous conter une histoire simple, même si l’on pourra dire qu’une histoire d’amour à sens unique sert de fond, nous raconte plutôt les déboires d’un petit village rural paumé à une époque indéfinie, vivant dans les traditions, et dans la superstition. Pactes avec le diable, créatures de métal animée et douée de conscience pour les dures labeurs, créatures étranges, sorcellerie, tout est bon dans ce village, dans un but unique, survivre au rude hiver. Et du coup, quand on plonge cash dans l’univers, on écarquille les yeux, lorsque, lors des premiers instants, nous voyons une créature étrange faite de métal et de foin s’en prendre à un veau, avant d’être chassé par une famille, tout en réclamant plus de travail. November est un film à part. Entre fresque fantastique, récit sur les habitants d’un village paumé, film onirique et subliminal, et histoire d’amour. Il est amusant d’ailleurs de voir dans un rôle presque normal Dieter Laser, plus connu du « grand public » pour son rôle dans la saga The Human Centipede, mais là je m’égare.
November est donc un mix sur le papier totalement étrange voir WTF de situations folles (surtout lorsque l’on est étranger à ces cultures), de moments poétiques, de passages plus horrifiques, le tout saupoudré d’un humour totalement absurde, et d’un brin de théâtre, vu la représentation visuelle de certains aspects et de certains personnages. Mais plus que son mix de genre et d’idées, ce qui frappe et ce dés l’ouverture, c’est la qualité technique du métrage. Sans aucun doute un de ces plus grands points positifs, puisque visuellement, c’est le plus souvent à tomber par terre. Les plans semblent cadrés au millimètre près, le noir et blanc est absolument sublime. Et le tout pour seulement 1 450 000 euros. Un soin tout particulier a été apporté à l’univers visuel du film, et cela s’en ressent. Pas un plan à jeter. Le genre de métrage où, si l’on est sensible à sa direction artistique, on pourra passer 1h55 la bouche ouverte à s’exclamer. Il faut bien ça en vrai puisque la première heure n’est pas la meilleure, passant souvent d’un sujet à un autre. Un loup qui se roule par terre, le diable qui fait des pactes avec des habitants qui essayent de le tromper en signant non pas avec leur sang mais avec des myrtilles, les Kratts qui veulent du travail (les créatures de métal animées), une sorcière qui essaye d’aide les habitants, ceux-ci qui se volent entre eux pour obtenir des vêtements chauds ou objets de valeurs, des fantômes errants parmi les vivants, la peste qui vient faire coucou et j’en passe. Oui un beau gros bordel, et au milieu de tout ça, Lina (Rea Lest), amoureuse de Hans (Jörgen Lilk), qui l’ignore puisque lui même amoureux d’une baronne somnambule séjournant au château du coin. Si l’ensemble donne au film un cachet unique, certains éléments sont traités de manière un peu trop théâtrale, notamment ce qui concerne le diable, joué par Jaan Tooming qui en fait des tonnes.
Mais dans sa deuxième heure, le film resserre alors son propos, donnant beaucoup plus d’importance à Lina et Hans, et nous livre alors ces plus beaux moments, en terme d’émotions, les deux ayant leur cœur déchiré. Lina n’a d’yeux que pour Hans, tandis que son père tente de la marier à un gros et vieux paysan du coin. Hans lui n’a d’yeux que pour la Baronne, qui l’ignore totalement, et à qui il n’a finalement jamais parlé. Les deux sont ignorés, mais ne comptent pas abandonner. Lina en souffre, et pourrait même faire appel à la sorcière du village pour éliminer la Baronne et ainsi obtenir l’attention d’Hans, mais elle se refuse à le faire souffrir pour obtenir satisfaction. Le film s’égare moins, et en focalisant sa dernière parmi sur ses deux êtres meurtris, parvient à faire totalement mouche, délivrant des passages sublimes et tragiques, non sans humour, un humour noir et sombre, mais présent depuis le début. La résolution de cette intrigue, qui semble être la seule construite normalement du métrage (et ayant donc un début et une fin,), ne laisse pas indifférent. Certains moments sont même intenses. Plus classiques que le reste, mais intenses malgré tout. Mais au final, au-delà de son histoire d’amour impossible, c’est toute son ambiance que l’on retiendra de November, et certains de ses sous textes, entre les croyances païennes et chrétiennes (représentées par le Baron et la Baronne) qui s’invitent dans le récit, ces créatures folkloriques et j’en passe. Un film totalement unique, et marquant.
Les plus
Un noir et blanc sublime
Une ambiance unique
Quelques moments intenses
Rea Lest et Jörgen Lilk, très bons
Un folklore unique et intéressant
Les moins
Quelques éléments parfois trop théâtraux
En bref : November est une excellente surprise, un film qui semble partir dans tous les sens mais qui délivre de sublimes images et moments, trouvant alors sa propre logique au sein de son univers.
Ce film n’est pas passé sous mon radar, merci de l’y avoir amené 😉
On dirait un mélange de The Witch et Le ruban blanc…
Oh belle comparaison, que je n’aurais pas osé d’ailleurs (n’ayant pas vu Le Ruban Blanc en entier… peut-être une erreur de ma part ceci dit). Il y a un peu de ça en tout cas.
Je te conseille donc de le laisser sous ton radar, en espérant que comme moi, tu puisses passer outre le côté théâtral de certaines scènes, en particulier celles mettant en scène le diable. (il faut d’ailleurs que je trouve moyen d’harceler le compositeur, il me faut l’OST !!)
Le ruban blanc est un de mes films préférés !! Le seul que j’ai aimé de Haneke avec Funny Games
Bon alors je te promets de réessayer, n’étant pas fan de Haneke non plus (souvent, je n’arrive même pas à les terminer). Mais j’ai bien aimé Funny Games également.