1BR de David Marmor (2019)

1BR

Titre original : 1BR
2019 – Etats Unis
Sortie : 24 Avril 2020 (Etats Unis), 6 Septembre 2019 (L’Étrange Festival)
Genre : Thriller
Durée : 1h30
Réalisation : David Marmor
Musique : Ronen Landa
Scénario : David Marmor
Avec Nicole Brydon Bloom, Giles Matthey, Taylor Nichols, Alan Blumenfeld, Naomi Grossman et Celeste Sully

Synopsis : Fraîchement débarquée à Los Angeles, Sarah s’installe dans un appartement au complexe Asilo Del Mar, et fait la connaissance de son voisinage hétéroclite mais soudé. La jeune fille a d’abord du mal à s’intégrer, et refuse notamment les avances de Brian, un voisin de palier.

Si le cinéma de genre grand public n’est plus que l’ombre de lui-même, avec des sorties bien calibrées à intervalle régulier, et l’on peut remercier Blumhouse pour ça (ou pas, car quelques films intéressants sortent du lot heureusement), il faut souvent se tourner vers le cinéma indépendant pour trouver des petites perles, qui outre le fait qu’elles font souvent bien plus preuve d’originalité, bénéficient d’un ton souvent plus noir et violent. Oui, les budgets sont moindres, la visibilité par le public également (pas de sorties dans tous les multiplexes du monde), et il faut souvent faire les choses dans l’urgence. Mais souvent, des réalisateurs brillent dans cet exercice, depuis toujours. Comment ne pas citer parmi les plus grands les réussites de John Carpenter durant les années 70 et 80, qui faisaient souvent mieux avec un budget risible ? Et depuis bien cinq ans, c’est un peu la même chose. On pourra même dire que trois réalisateurs sortent clairement du lot, chacun avec deux métrages à leur actif, à savoir Panos Cosmatos (Beyond the Black Rainbow et Mandy), Robert Eggers (The Witch et The Lighthouse) et Ari Aster (Hereditary et Midsommar). Mais je m’égare là clairement du sujet, et parlons un peu de 1BR, un film tourné dans l’urgence, avec un budget que l’on devine bas, et qui est le premier métrage du scénariste et réalisateur David Marmor. Presque huis clos dans une résidence, il met en avant la toute jeune et encore inconnue Nicole Brydon Bloom, une jeune femme qui a quitté sa famille pour s’installer à Los Angeles et qui a un travail de bureau pas vraiment palpitant. Et qui du coup, se cherche un nouvel appartement pour s’installer durablement et prendre sa vie en main. Récemment, la dimension sociale se fait de plus en plus grande au cinéma, et notamment dans le cinéma de genre, que ce soit l’horreur pure, ou dans le cas qui nous intéresser, le thriller sombre qui menace de sombrer à chaque instant dans l’horreur graphique, mais qui évite avec joie les débordements comme pour ne pas faire retomber la tension.

Bravo David Marmor sur ce point, qui ne cède pas un seul instant à la facilité. Il a des choses à dire, il sait ce qu’il veut nous montrer, et il s’y tient. Tout à son honneur. Dans un premier temps, le film aborde bien un élément que l’on a plus ou moins tous connu dans notre vie, à savoir recommencer sa vie à zéro dans une nouvelle ville, avec le premier job qui n’est pas forcément pour nous mais il faut bien vivre, et la visite d’appartement pour trouver un bon compromis entre ce qui nous convient et ce que l’on peut s’offrir. Los Angeles est la ville parfaite pour mettre en avant cet élément. La cité des anges comme on l’appelle, la ville qui vends du rêve, rêve à double tranchant. Pas besoin de situer l’intrigue dans le milieu du cinéma (ce qui aurait été l’option de facilité, et pleine de cliché) pour faire passer son message. 1BR évite les pièges, et sa première partie se fait aussi sobre que prenante, surtout si l’on n’a pas la moindre idée d’où le métrage veut nous emmener. L’arrivée de l’héroïne, Sarah, dans la résidence de ses rêves montre là un autre élément clé que l’on connait tous, à savoir s’intégrer dans une communauté, dans un voisinage. Bien entendu, cinéma de genre oblige, ça ne se passe pas comme prévu, et très rapidement, Sarah se retrouve captive de cette communauté, qui entend bien lui apprendre sa façon de penser. Sorte de culte religieux sans pour autant appuyer tel ou tel élément, donnant alors un aspect plutôt réaliste et faisant froid dans le dos à cette dite communauté. Un élément qui aurait donc pu très rapidement faire dévier le métrage vers des genres plus visuels. On pense notamment aux tortures porn à la Hostel ou Saw, avec ce personnage captif et qui doit obéir sous peine d’être punie. Mais si sévices il y a, rien de véritablement brutal, visuellement. La violence est plutôt psychologique ici, et donne bien l’impression que le réalisateur a eu le temps de faire mûrir son film, plutôt que de torcher un script et de le tourner dans l’urgence.

Même lors que l’aventure vire totalement au huis clos oppressant, finalement, le film ne fait que suivre sa ligne directrice, et continue d’explorer les mêmes thèmes. Cette communauté finalement, c’est un peu la vie de tous les jours dans les grandes villes, sur ce repli sur soi, et sur cette soi-disant élite qui ne veut pas être mélangée aux autres, et veut les convaincre que ce qu’ils font est juste, et que quoi qu’ils arrivent, ils ont raison, car ils sont l’élite. Et comme n’importe quelle « secte » (oui utilisons ce mot), il est tellement facile de s’en prendre à des jeunes, dont la situation n’est pas totalement fixe, et qui sont encore plus fragilisés par leur situation. Beaucoup de bonnes choses dans le fond de ce 1BR, qui heureusement, n’a absolument pas à rougir sur la forme non plus, le film étant on ne peut plus carré. Certes, les lieux sont réduits le plus souvent à leur strict minimum, certains décors sont visuellement dépouillés, volontairement (la pièce dans laquelle Sarah est enfermée par exemple), mais l’ensemble ne part jamais dans la violence gratuite, et n’a jamais recours à des effets de styles qui auraient pu desservir le propos. La tension fonctionne tout le long, et il faut saluer l’interprétation de la jeune Nicole Brydon Bloom, révélation du film. Même le final, qui aurait pu facilement partir dans des excès, ou tout simplement se planter lamentablement, fonctionne plutôt bien. Hâte de voir ce que le réalisateur fera par la suite en tout cas, en espérant qu’il aurait pour le coup un plus gros budget, qui lui permettront peut-être de raconter des histoires à plus grande échelle. Certes, 1BR dure 1h30, et quelques moments paraissent précipités, comme le passage au second acte du film, qui surgit d’un coup, sans montée en puissance. Mais là, je chipote, mais 1BR, bien qu’imparfait, est avant tout efficace, et a des choses à dire.

Les plus

Nicole Brydon Bloom, la découverte du film
Un film sobre
Belle tension
Les messages et intentions du métrage

Les moins

Des facilités, forcément
Quelques moments un poil précipités

En bref : David Marmor, pour son premier film, frappe fort. Il ne cède pas à la facilité, et son film s’avère parfaitement pensé, malgré quelques défauts et moments précipités. Un réalisateur à suivre malgré tout.

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