GRAVE TORTURE (Siksa Kubur) de Joko Anwar (2024)

GRAVE TORTURE

Titre Original : Siksa Kubur
2024 – Indonésie
Genre : Ambiance ambiance
Durée : 1h58
Réalisation : Joko Anwar
Musique : Aghi Narottama
Scénario : Joko Anwar

Avec Faradina Mufti, Reza Rahadian, Widuri Puteri, Muzakki Ramdham, Slamet Rahardjo, Niniek L. Karim, Christine Hakim et Arswendi Nasution

Synopsis : Après la mort de ses parents dans un acte terroriste, la jeune Sita se met une idée en tête. Prouver que l’idée de la torture dans la tombe après le décès est fausse.

Depuis ses deux réussites incontestables que sont les deux opus de Satan’s Slaves, le réalisateur Joko Anwar, qui est très loin de ses débuts, est attendu au tournant, que ce soit avec sa série sortie récemment, ou son nouveau long métrage qui comme souvent, a fait sensation en festival. Ce film donc, c’est le Grave Torture qui nous intéresse en ces lignes. Un métrage étrange, dans le bon sens du terme. Il faut dire que le cinéma horrifique, dont le cinéma horrifique Indonésien donc, suit souvent des codes assez précis, et donc, que les surprises sont rares. Grave Torture lui nous emmène vers des horizons que l’on ne soupçonne pas forcément au départ. Ici, l’on pourrait presque dire qu’en réalité, pendant 1h30 sur les deux heures du métrage, nous sommes face à une introduction. Alors attention, il ne faut pas prendre le terme totalement à la lettre. Introduction oui avant que la vraie horreur, plus frontale, ne débarque. Tout ce qui précède donc tient bien plus du pur film d’atmosphère. De ce point de vue-là d’ailleurs, c’est incroyablement réussi. L’ambiance est pesante, en permanence, le spectateur n’est pas forcément à l’aise, et surtout, le métrage part sans arrêt vers des horizons que l’on n’attendait pas. Pendant une première demi-heure par exemple, nous suivons Sita et son frère Adil alors qu’ils sont jeunes, après la mort de leurs parents dans un acte terroriste. Alors, d’entrée de jeu, on peut pointer du doigt un élément assez étrange et pourtant faisant entièrement parti de l’univers du métrage et de sa narration. À savoir que pour éviter un acte de torture surnaturel dans la tombe après le décès, les gens prennent peur et font des actes ignobles. Dans le cas présent donc, le terroriste qui fait exploser sa bombe devant le magasin des parents de Sita.

Pourquoi pas dans le fond, mais d’un point de vue purement religieux (ce que je ne suis pas), se donner la mort, et entrainer la mort des autres, ce n’est pas de base un péché ? Donc quelque chose qui, en soit, serait un bon argument pour subir une telle torture ? Alors, peut-être que je ne suis pas assez calé sur le sujet pour émettre un véritable jugement, mais cet élément m’aura fait réagir. Par la suite par contre, c’est en réalité du tout bon, avec une intrigue qui nous trimbale d’une fausse piste à une autre. Le film prend son temps, se focalisant sur l’après catastrophe, en insérant ci et là quelques éléments surnaturels avec ce tunnel réputé hanté, ou bien avec ce trafic d’enfant dans une école religieuse. Des sujets graves, qui ne seront au final jamais exploités de la manière qu’on peut l’attendre. Le surnaturel est en retrait, totalement (mais aura son importance, suivant notre interprétation du film), et alors que l’on peut avoir quelques idées sur la direction du scénario, non, Sita et Adil s’échappent, et le film reprend alors des années plus tard, avec Sita devenue adulte et travaillant comme infirmière dans une maison de repos, tandis qu’Adil lui s’occupe d’un boulot bien joyeux, à savoir préparer les morts après leur décès. Grave Torture parle clairement, globalement, de la mort, du deuil, de comment tout cela nous impacte, que cela soit nos proches ou de simples inconnus, de l’acte même de la mort jusqu’au passage dans la tombe. Des thèmes participant bien évidemment grandement à l’ambiance étouffante se dégageant du métrage. Surtout que là encore, le film prend des tournures que l’on n’avait pas forcément prévu, si bien que l’on suit l’aventure avec attention, sur le qui-vive, surpris, pas forcément rassuré.

Ce sont là les deux plus grandes forces du métrage. Son ambiance et son côté imprévisible, différent la plupart du temps du reste de la production horrifique Indonésienne, bien plus rentre-dedans. Ici c’est plus subtil, et ça parvient à faire son effet sans avoir recours à une imagerie horrifique connue, ni même sans avoir recours à des jumpscares, même si certains parviennent à se glisser dans le récit par la suite, comme justement pour nous faire un peu plus douter de la réalité que l’on veut nous mettre sous les yeux. C’est en tout cas dans sa dernière demi-heure que le film fonce dans une imagerie dans le fond plus classique, plus frontale, plus sanglante aussi, malgré quelques CGI moyens, mais qui justement, trouve une toute autre signification grâce à tout ce qui précédait, un sens plus profond, l’on pourrait même dire presque plus intellectuel, sans pour autant en faire des tonnes, et sans justement tout expliquer aux spectateurs. Ce qui, dans le fond, est une grande qualité, mais aussi peut laisser perplexe lors de la première vision, puisque Grave Torture ne délivre donc pas du tout la marchandise que l’on attendait, mais se fait plus subtil. Au terme du métrage donc, l’on reste avec plus de questions en tête que de réponses clairement données par Joko Anwar, qui signe aussi le scénario, ce qui, par extension, permet au film de survivre dans le temps, de nous « hanter », plutôt que de n’être qu’un efficace film horrifique, prenant sur le moment, mais que l’on pourrait oublier sur la durée.

Les plus

Une ambiance étouffante
De très bons acteurs
Un film qui va là où on ne l’attend pas
Des moments de terreur réussis

Les moins

Quelques maladresses d’écriture
Le côté très lent et atmosphérique ne plaira pas à tous
Quelques CGI discutables

En bref : Grave Torture, le dernier métrage de Joko Anwar, est un métrage horrifique bien plus subtil qu’il n’y paraît aux premiers abords. Tout n’est pas parfait, et la proposition parfois énigmatique ne plaira pas à tous, mais on a là le plus souvent un film tout en ambiance qui sait prendre le spectateur à la gorge, et le faire réfléchir même après la vision.

A FEW WORDS IN ENGLISH
THE GOOD THE BAD
♥ A great and powerful atmosphere
♥ Very good actors
♥ The film goes where you don’t expect it to go
♥ Some fine terrifying moments
⊗ Some parts of the plot are weird
⊗ The slow atmosphere won’t be for everyone
⊗ Some messy CGI
Grave Torture, the last film from Joko Anwar, is more subtil than we can think at first. It’s not perfect by any mean, and the cryptic proposition won’t be for everyone, but the atmosphere is really great and the plot will make you think after viewing the film.

2 réflexions sur « GRAVE TORTURE (Siksa Kubur) de Joko Anwar (2024) »

  1. Oui un film assez étrange, dont il est difficile de parler en fait, j’aurais eu du mal à écrire dessus. Il reste en tête malgré tout, tel un lancinant mal-être.

    1. Il est difficile de mettre des mots sur un ressenti, et encore plus difficile ici d’en parler sans trop en révéler. Une chose est sûre, je le reverrais, sans doute pour le faire découvrir à un ami, je ferais d’une pierre deux coups.

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