Titre original : Blade Runner 2049
2017 – Etats Unis / Canada / Angleterre
Genre : Science Fiction
Durée : 2h44
Réalisation : Denis Villeneuve
Musique : Hans Zimmer et Benjamin Walifisch
Scénario : Hampton Fancher et Michael Green
Synopsis : En 2049, des humanoïdes issus du génie biologique, appelés réplicants, ont été intégrés dans la société pour assurer la survie de l’humanité. K, l’un des plus récents modèles conçus pour obéir, travaille comme blade runner au LAPD. Sa mission consiste surtout à pourchasser et éliminer les anciens modèles délinquants. Dans une ferme, il élimine un ancien modèle et découvre par hasard une boîte enterrée au pied d’un arbre. L’analyse médico-légale révèle que ce sont les restes d’un réplicant femelle mort à la suite des complications d’une césarienne pratiquée dans l’urgence. Sa supérieure, le lieutenant Joshi, lui ordonne de détruire toute trace pouvant mener à cette découverte, y compris l’enfant né à la suite de la procédure médicale. Joshi croit que cette information pourrait mener à une guerre entre les humains et les réplicants dotés d’une certaine autonomie.
Il y a des films qui mettent des violentes claques dans la face. Des films où pendant la vision, on encaisse durant 2h45 le métrage, en jubilant, puis une fois la vision terminée, le film nous hante, son propos, ses thèmes. Blade Runner 2049, projet aussi risqué qu’attendu, est un de ces films là. Un film où pendant toute la vision, on est ébahit par la beauté formelle de son univers, par son visuel, ses effets spéciaux, sa photographie, sa musique, un univers qui nous plonge dans une réalité alternative, puis une fois la vision achevée, l’on se pose des questions, des questions sur son univers, ses thèmes, la solitude, l’amour, l’identité. Premier point, heureusement que Ridley Scott, devenu l’ombre de lui-même, a quitté la chaise de metteur en scène pour laisser la place à Denis Villeneuve. Qu’il continue de saccager la saga Alien, de toute façon, après Prometheus et Alien Covenant, on n’attend absolument plus rien de lui. Car Blade Runner 2049 de Denis Villeneuve, c’est du blockbuster à 150 millions de dollars de budget qui fait de l’anti blockbuster. Fans de blockbusters jouant sur les effets spéciaux, les scènes d’action aussi longues qu’improbables et surtout inutiles au récit qui ne veut souvent rien dire et n’a rien à dire, fuyez, puisque Blade Runner 2049 est l’exact opposé de ce que la production cinématographique actuelle est. Merci donc à la production d’avoir osé ce film, d’être allée chercher le scénariste du film original, et d’avoir confié la mise en scène à Denis Villeneuve.
Denis Villeneuve qui avait prouvé déjà en 2016 qu’il était à l’aise avec la science fiction en signant Premier Contact (Arrival), probablement le meilleur film de science fiction de 2016, si ce n’est le meilleur film de 2016 tout court, nous revient donc en forme malgré la challenge de donner une suite à Blade Runner. Et livre jusque là le meilleur film de 2017, rien que ça. À la fois très proche et très différent du Blade Runner original, 2049 a su faire les choix qu’il fallait pour transcender son propos, son univers, et nous amener dans un monde fait de solitude et de mélancolie. Blade Runner nous interroger sur l’humanité, sur l’identité, ce qu’est l’humain, ce qu’est la machine. 2049 prolonge ses questionnements, en ajoute en cours de route, et sait se faire à la fois suite mais également film à part entière. À première vue, cette suite d’ailleurs reprend les grands ingrédients du film culte. On y suit toujours un flic, qui est un réplicant, nous suivons toujours une enquête qui au final, avouons le, ne sert qu’à faire avancer la narration du film puisque la profondeur de celui-ci ne se situe pas dans ses qualités narrative, mais bel et bien dans les thèmes qu’il exploite et qu’il met en image au fur et à mesure de la quête du personnage, K. Et comme son prédécesseur, Blade Runner 2049 baigne dans une ambiance de solitude magnifique de tous les instants. La solitude de Dekkard dans le film original, puis sa rencontre avec Rachel, trouve ici son reflet dans le miroir avec K, sa solitude, sa relation avec Joi, avant d’emmener cette même thématique vers de nouveaux horizons. Oui, Blade Runner 2049 est clairement le moment de cinéma le plus beau, le plus réfléchit, mais surtout le plus intense de cette année. Intense au point de ne savoir qu’en dire. Le genre d’œuvre qu’il va falloir digérer, et qu’on a immédiatement envie de revoir une fois la projection terminée.
Blade Runner 2049 donc, c’est avant tout son scénario. Un scénario en soit simpliste, une enquête assez banale. Mais un scénario qui trouve toute sa profondeur dans ses thèmes, dans sa manière de les aborder à l’image, et finalement, dans sa manière de savoir prendre son temps. À l’heure où il faut que tout aille vite, que ça explose de partout, que les dialogues doivent tout expliquer 30 fois pour être sûr que le spectateur a comprit une histoire aussi complexe que celle de Transformers (ironie quand tu nous tiens), Blade Runner 2049 prend son temps, pose sa caméra, laisse ses décors respirer dans le cadre, les acteurs s’exprimer et se mouvoir pour transmettre des émotions. Si le scénario est classique, sa mise en image est tout simplement sublime et grandiose. Et si on pourrait également dire que les personnages sont souvent un brin simplistes, voir souvent mutiques, c’est encore une fois passer à côté du sujet du métrage. Car en plus d’avoir des personnages uniques qui ironiquement nous racontent beaucoup plus de choses lorsqu’ils sont silencieux, l’émotion pointera parfois le bout de son nez là où on ne l’attend absolument pas, et surtout, bon dieu mais ce casting de fou ! Ryan Gosling en K est absolument parfait, trouvant un rôle quasi mutique, et faisant donc ce qu’il fait de mieux (Drive, Only God Forgives). Mais il n’est pas le seul, car tous les acteurs ont leur grand moment, même lorsque ceux-ci n’ont que deux scènes à l’écran.
Jared Leto par exemple est énorme et vole limite la vedette aux autres acteurs présents dans ses scènes par sa présence, son style. De quoi nous faire oublier son Joker de Suicide Squad. Mais la palme revient d’une part à Harisson Ford, dont la relation avec Ryan Gosling fonctionne parfaitement à l’écran et trouve le bon ton immédiatement, et plus surprenant, à Ana de Armas, actrice que je suis depuis quelque temps, et qui trouve ici un rôle sublime. De nombreux moments entre elle et Ryan Gosling sont magiques, comme la scène sous la pluie, ou une autre plus tardive que je ne spoilerais pas, mais qui exploite les thèmes du film comme il se doit. Mais Blade Runner 2049 evidemment, c’est aussi la mise en scène classe et millimétrée de Villeneuve, et surtout la photographie à tomber par terre de Roger Deakins (Skyfall, No Country for Old Men, Sicario). Une photographie mettant en avant des plans parfaits avec des décors majestueux qui frappent la rétine et ne nous lâchera pas de sitôt. Point polémique par contre, l’ost signée Hans Zimmer et Benjamin Walifisch, qui pour ma part, est majestueuse également, devenant agressive à de rares instants comme pour nous mettre un ultime choc dans les oreilles. Leur partition contient des morceaux magnifiques (les morceaux Flight to LAPD, Rain, Joi et Sea Wall tournent en boucle depuis la vision du film), et donne vie à l’univers en cherchant à continuer ce qui existait déjà plutôt qu’à bêtement copier l’ost de Vangelis du film original, sublime également en passant.
Blade Runner 2049, c’est une claque intelligente, un plaisir pour les yeux, pour les oreilles, pour les émotions. Mais comme il se fait l’anti blockbuster par excellente, aucun doute qu’il sera méprisé par beaucoup, que beaucoup le trouveront ennuyeux, que certains ne verront que ce que les images ont à proposer sans pousser la réflexion plus loin. Blade Runner a marqué le monde du cinéma en 1982, malgré de virulentes critiques à sa sortie, et aura gagné son statut de film culte avec les années. Aucun doute que c’est ce qui se passera également pour Blade Runner 2049. Le film va diviser, le film va rebuter certains spectateurs, avant de devenir tout aussi culte que le premier, et de laisser ses détracteurs sur le côté. Ils ne reviendront pas de sitôt à cet univers, et après tout, si ce n’est pas leur tasse de thé, on ne pourra pas leur en vouloir. Mais pour ceux qui savent à quoi s’attendre et veulent voir de la science fiction dans ce qu’elle a de meilleur, avec des thèmes intéressants et intelligents, foncez, le voyage est unique.
Les plus
Visuellement c’est la perfection
Le score musical, parfait aussi
Les acteurs excellents
Les thèmes
Des moments d’émotions entre K et Joi
Les moins
Le rythme ne plaira pas à tout le monde
En bref : Blade Runner 2049 est un grand film. Il fait l’opposé des blockbuster actuel, il sait prendre son temps, nous interroger, nous fasciner, et nous hanter par la suite.