L’EAU DOUCE QUI COULE DANS MES VEINES de Maxime Kermagoret (2013)

L’EAU DOUCE QUI COULE DANS MES VEINES

Titre original: L’eau Douce qui Coule dans mes Veines
2013 – France
Genre : Drame
Durée : 1h15
Réalisation : Maxime Kermagoret
Musique : Jérémy N.
Scénario : Maxime Kermagoret

Avec Élodie Vagalumni, Guillaume Frank et Jean-Baptiste Barois

Synopsis : Une jeune fille instable sentimentalement et socialement se voit proposer un poste pour lire des textes poétiques à un homme en fin de vie. Sur une semaine de visites journalières (soit une poésie par jour), ce dernier parviendra à faire basculer la jeune fille des ténèbres vers la lumière et redonner à celle-ci un sens à sa vie…

Le réalisateur Maxime Kermagoret n’en est pas à son premier essai cinématographique. Après le tournage en 2004 du film Destruction Massive, qui ne verra finalement le jour officieusement en DVD qu’en 2010, il retente l’expérience en 2012 en tournant le film qui nous intéresse aujourd’hui, qui fut présenté en avant première Parisienne hier soir au cinéma Le Desperado dans le 5ème arrondissement. Une projection intime suivie d’un débat avec le réalisateur lui-même, projection qui ne pouvait laisser indifférente. Tourné pour une somme ridicule avec un planning plutôt serré, le film créa d’ailleurs une petite polémique lors de son passage au CNC pour obtenir un visa d’exploitation, puisque la sous-commission attribua au métrage un « tout public » assez étrange, qui fut heureusement changé par un « interdit aux moins de 12 ans » qui peut s’avérer bien léger au vu d’une scène en particulier… Mais revenons au film en lui-même.

Maxime Kermagoret nous invite à suivre le quotidien de Céline, une jeune femme dont la vie ne semble pas vouloir lui faire de cadeaux, et qui ne fait rien pour véritablement se prendre en main. Elle n’a pas de travail, et socialement, elle « sort » avec Stéphane pour une relation purement sexuelle, mais ne servant qu’à combler les pulsions du jeune homme. Bien que peu présent à l’écran, les scènes avec le jeune homme seront marquantes de par le portrait peu glorieux que le réalisateur nous offre. Surtout que c’est bel et bien le point de vu de Céline qui est adopté, puisque les premières minutes du métrage nous la montrera sous tous les angles dans les moments les plus basiques du quotidien : les repas, les rendez-vous pour trouver du travail, le réveil, et même une scène de masturbation qui prend son temps (peut-être même un peu trop). Si Élodie Vagalumni, ancienne actrice X, n’est pas la meilleure actrice du monde, elle dégage clairement quelque chose. Son jeu est sincère et on sent l’actrice totalement investie dans son rôle, rendant ainsi son personnage attachant, et surtout vrai, et même touchant à plusieurs moments.

Les différents plans sur l’actrice ou même la magnifique photographie en noir et blanc la mettront parfaitement en valeur à de nombreuses reprises. Si bien que suivre le quotidien de cette jeune femme, dans sa chute, puis sa prise de conscience et finalement la voir remonter la pente grâce au travail qu’elle trouve, en lisant de la poésie à un vieil homme, fonctionne pleinement sur la durée. Le film se fait extrêmement dur dans sa première partie, mention particulière aux deux scènes en voiture où Céline est avec Stéphane, son « plan cul ». Il y a des personnages que l’on méprise en seulement quelques phrases ou quelques gestes, et Stéphane en est un dés les premiers instants. Maxime Kermagoret filme tellement son actrice en s’en rapprochant un maximum que finalement, la voir peu à peu remonter la pente fait un bien fou et surtout fonctionne sans réellement tomber dans la facilité, tant l’ensemble ne fait pas artificiel.

Même les derniers instants du métrage, pourtant d’une simplicité exemplaire, fonctionnent. Il est d’ailleurs étonnant de noter que toute la première partie du métrage fait extrêmement documentaire, en suivant le quotidien de Céline, au plus proche, la plupart du temps sans musique, alors que le film se fait alors plus cinématographique dés lors que Céline trouve un travail qui va la changer, avec une utilisation de la musique, de dialogues juxtaposés sur d’autres images, de fondus et d’autres moments où la musique prend le pas sur toute autre ambiance sonore. Mais finalement, on pourra aussi y trouver des apports venant d’autres univers, comme fatalement vu l’histoire, la poésie (les poèmes du film sont écrits par le metteur en scène lui-même) ou le roman, puisque le film est alors découpé par des titres, annonçant un poème et le jour de la semaine, comme pour annoncer un nouveau chapitre.

Bien entendu, L’Eau Douce qui Coule dans mes Veines n’est pas le film parfait. Son très faible budget se fait parfois ressentir, bien qu’il ne gène pas l’immersion dans l’œuvre. On pourra par contre signaler pour les rôles secondaires une interprétation parfois un peu trop brute (par manque de temps peut-être), et un léger souffle sur la bande son du film lors de certains moments, du moins lors de la projection d’hier soir. Mais en soit, rien qui ne gâche totalement l’envie de découvrir un cinéma autre et véritablement fait en totale indépendance, chose bien trop rare en France.

À note personnelle, et en tant que cinéaste, il est très étonnant de noter quelques ressemblances entre le film de Maxime Kermagoret et mon propre univers, qui ne peuvent que me faire un peu plus adhérer à son œuvre, notamment dans la représentation visuelle de certaines scènes, l’utilisation de la musique lors de scènes silencieuses, certains plans contemplatifs s’étendant en longueur sans pour autant paraître longs, ainsi que certains thèmes. Un grand merci à Florent Gilloury pour les captures du film.

Les plus

Un film sincère

Dur et réaliste

Belle fin

Un très beau noir et blanc

Les moins

Quelques imperfections dues au manque de budget

 

En bref : Le chemin difficile d’une jeune femme, qui ne cède pas aux stéréotypes, et qui captive malgré ses imperfections.

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