AGITATOR (荒ぶる魂たち) de Miike Takashi (2001)

AGITATOR
Titre original : Araburu tamashii-tachi – 荒ぶる魂たち
2001 – Japon
Genre : Policier
Durée : 2h30
Réalisation : Miike Takashi
Musique : Endo Kôji
Scénario : Takechi Shinegori
Avec Kato Masaya, Takenaka Naoto, Mickey Curtis, Matsukata Hiroki, Endo Kenichi,  Ishibashi Renji et Miike Takashi

Synopsis : Tsuchiya et Hirata du clan Yokomizo rencontrent Mizushima et Muroi du clan Shirane en secret afin d’unir leurs forces et devenir le groupe le plus puissant du syndicat. Pour unir leurs forces, ils vont commencer les hostilités dans un club où Hashida, un membre du clan Higuchi, va poignarder un membre d’un clan rival. Cet incident déclenche alors inévitablement le début des hostilités entre les deux familles. Kaido, va alors en profiter pour devenir le médiateur entre les deux clans et les forcer à s’unir. Les choses empirent quand le boss du clan Yokomizo est assassiné. Les chefs des deux familles vont se réunir afin de trouver une résolution politique au conflit. Mais les hommes de Higuchi, proche du boss Yokomizo, et son protégé Kunihiko, ne comptent pas en rester là et décident de venger leur boss.

Bien qu’étant l’un des réalisateurs japonais les plus distribués en France (pas loin d’une vingtaine de métrages, ce qui n’a rien d’étonnant vu la taille de la filmographie de Miike), Agitator reste une œuvre encore inédite chez nous, mais méritant pourtant pleinement le coup d’œil, comme beaucoup d’autres de ses métrages, mais qui est encore une fois à part dans sa filmographie (tellement vaste que l’on y trouve finalement de tout et que rien n’est à part). Agitator, malgré son titre, n’a rien d’une œuvre violente comme on pouvait s’y attendre. On est très loin des excès de films tels Dead or alive, ou encore Ichi the killer. Non, ici Miike nous livre un film de yakuza classique, rondement mené, à la durée conséquente de deux heures et demi. Un film s’attachant beaucoup plus aux personnages, aux alliances et aux trahisons qu’à la violence et aux excès, et qui malgré sa longue durée, ne paraît jamais véritablement long. Ainsi, à quelques rares séquences, Agitator sera un film très calme, jouant avec les personnages, leurs émotions, et sur l’attente du spectateur en terme de violence et d’assauts sanglants. Miike va d’ailleurs jouer avec cette attente à de nombreuses reprises dés le départ, en nous faisant croire à un raid meurtrier dans les premières minutes, se révélant en fait être une farce organisée par Higuchi envers son bras droit, Kunihiko, pour l’amener à fêter son anniversaire. Nous nous sommes bien fait avoir, tout comme Kunihiko, et il va encore falloir attendre. L’attente, le mot clé du métrage, qui va se permettre alors de développer la relation établie depuis l’enfance entre Higuchi et Kunihiko.

Miike nous fera tout de même croire que ce que l’on attend de lui va arriver lors de la séance dans le club, où Miike lui même joue un des yakuza qui va s’amuser à insérer un micro dans l’anus d’une fille (idée que l’on retrouve dans Visitor Q) avant de se faire descendre par un gang rival. Une scène politiquement incorrecte qui n’a pourtant pas véritablement sa place dans l’ensemble du métrage. Immédiatement après cette séquence, le calme revient, et les discutions s’engagent entre les différents clans. Le casting s’en sort très bien, l’interprétation est crédible et tout en retenue, on se retrouve en présence de visage connus de la filmographie de Miike avec Takenaka Naoto (Ley lines, Happiness of the Katakuris, les prisonniers du paradis) dans le rôle de Higuchi, ainsi que Endo Kenichi et Ishibashi Renji dans des seconds rôles. On s’attache très rapidement aux personnages de Higuchi et Kunihiko, au fur et à mesure que l’on découvre leur passé commun dans une petite ville, avant leur arrivée dans la grande ville pour devenir des yakuza. Deux personnages hauts en couleurs, vivant une amitié forte, de laquelle découle une forte confiance, qui ne vont pas accepter si facilement, après le meurtre de leur boss (Mickey Curtis, que l’on voyait déjà dans Fudoh), une solution diplomatique, qui leur semple bien trop simple et arrangée. Ce qui est le cas bien entendu. Ces personnages sont violents, à l’image de beaucoup de films de Miike, mais ne peuvent laisser sortir toute cette violence sans déclencher une guerre entre les différents clans. Pourtant, dés l’annonce de la mort du boss, ils ne pensent qu’à une seule chose : la vengeance. De ce fait, ils n’accepteront jamais la trêve qui leur est proposée, et quitteront le syndicat. Pourtant, la rage à l’intérieur d’eux est contenue, et le sera jusqu’au final (donc pendant plus de deux heures), et se révélera dans certaines scènes magnifiques de par leur sagesse immense.

Et pourtant, malgré l’envie de vengeance immense, Higuchi va rester le plus calme des deux, préférant se défouler de manière différente (le sport par exemple). Kunihiko va un peu faire à sa façon, bien qu’il sera freiné de nombreuses fois, et voudra découvrir le fin mot de l’histoire. Il y parviendra après avoir torturé Muroi (Endo Kenichi), ce qui ne sera pas du goût des autres yakuzas. C’est à la moitié du métrage que la situation va changer, avec l’assassinat de Higuchi. A partir de là, Kunihiko le dit lui même, il a en quelque sorte perdu sa raison de vivre (suivant les points de vue, Higuchi pouvait être vu pour lui comme un père, ou un frère), et son désir de vengeance va alors grandir, et plus personne ne sera là pour l’arrêter. Se rendant compte de la situation, il préférera laisser partir ses hommes plutôt que les laisser le suivre vers une mort certaine. Agitator se révèle donc être un film plus humain que violent. C’est la psychologie des personnages qui intéresse Miike ici, et la mise en valeur des thèmes qu’il aborde tout le long de sa carrière. Il n’est donc absolument pas étonnant de retrouver au scénario Takechi Shigenori, dont c’est ici le premier scénario, avant qu’il ne signe pour Miike ceux de Graveyard of honor, Deadly outlaw rekka, The man in white (sorte de remake de Agitator justement), Yakuza demon (l’intrus parmi tous ces titres vu la nullité du métrage) et IZO. On retrouvera pourtant d’autres éléments semblant être issus d’autres métrages de Miike ultérieurs (le premier Dead or alive par exemple), Agitator a donc tout à fait sa place dans la filmographie de Miike, même s’il a fait mieux et que l’on pourra lui reprocher d’être beaucoup trop contemplatif par moment, mais Miike nous livre pourtant une série de scènes inoubliables et marquantes, autant dans les scènes intimistes (une scène d’amour magnifique, la relation entre les différents personnages) que dans la violence (le final notamment, où lorsque Kunihiko poursuit le tueur de son boss et modèle). Le tout est porté par une mise en scène simple et efficace, et la musique de Endo Kôji, se rapprochant quelque peu par sa simplicité de la bande son de Rainy dog, et au bout de ces 2h30, on en vient à applaudir cet effort pour nous avoir fourni un film de yakuza classique comme il y en a des tas, mais avec ce petit quelque chose en plus le rendant attachant.

Les plus
Un bon polar
De bons personnages
Quelques scènes folles
Très bon casting
Score musical discret mais réussi
Les moins
Peut-être trop classique
Peut-être un poil trop long

En bref : Un film classique et calme durant plus de 2h pour Miike, mais un film humain et intéressant, complexe par ses personnages et situations. Parfois trop contemplatif et volontairement calme, mais attachant.

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