REDACTED de Brian De Palma (2007)

REDACTED

Titre Original : Redacted
2007 – Etats Unis / Canada
Genre : Guerre / Drame
Durée : 1h30
Réalisation : Brian De Palma
Musique : –
Scénario : Brian De Palma

Avec Izzy Diaz, Rob Devaney, Ty Jones, Mike Figueroa, Kei O’Neill, Daniel Stewart Sherman et Patrick Carroll

Synopsis : En avril 2006, un petit groupe de soldats américains en poste à un point de contrôle de Samarra en Irak. La succession de leurs points de vue différents permet de confronter l’expérience de ces jeunes soldats sous pression, avec ceux de journalistes ou collaborateurs des médias, des relations avec la communauté irakienne locale… Tout cela dans le but de faire la lumière sur les conséquences désastreuses du conflit actuel.

En 2007, beaucoup avaient perdu espoir en Brian De Palma. Pas moi. Oui, Le Dahlia Noir, que j’avais découvert sur grand écran, m’avait déçu, mais j’y voyais plus un écart, un film parasité par des producteurs au vu de ce que l’on pouvait lire un peu partout en interviews. Surtout que contrairement à beaucoup, je suis un défenseur de Femme Fatale, et si Mission to Mars m’a laissé un souvenir mitigé, je suis aussi un fervent défenseur de Mission Impossible (mon préféré de la saga, et le seul pouvant être considéré comme un vrai film d’espionnage) et Snake Eyes. Et pourtant, la faute à une sortie confidentielle avec peu de copies disponibles, j’étais passé durant toutes ces années à côté de Redacted. Mais quand je vous dis que les copies étaient limitées, je ne ment pas, puisque je travaillais à l’époque dans un cinéma Art et Essai, et que j’avais pu du coup lire (et embarquer chez moi, je l’ai toujours) le dossier de presse, mais que nous n’avons jamais passé le film. Quatorze années après sa sortie, j’ai donc pu découvrir Redacted, avec une connaissance encore plus grande de la filmographie de De Palma, et du coup une pointe de tristesse face à ces deux derniers métrages, Passion et Domino, deux métrages que je n’aime pas. Et quinze ans après, je vous en parle. Heureusement, Redacted, ce fut une autre histoire, car si je ne suis pas un fan du métrage, il a sa place au sein de la filmographie de De Palma, et son mode de tournage, mixant caméra embarquée, caméra tenue par les personnages, caméra de sécurité et j’en passe, s’il est nouveau pour lui, cet esthète de l’image, il trouve justement une justification, à la fois dans le récit, dans l’époque de son récit, mais dans la carrière de son créateur, lui qui aime travailler l’image de manière parfois maniaque, pour mieux nous tromper, pour que sa caméra mente.

D’ailleurs c’est très simple, Redacted, c’est la version de 2007 de Outrages, qui date de 1989 déjà, et qui était quasiment un chef d’œuvre. Différente époque de tournage, différente méthode de raconter un récit, différente guerre mise en avant (le Vietnam contre l’Iraq), différente génération de soldats, même souci. Oui, quoi qu’il arrive, la guerre, c’est sale, ça le restera, peu importe la raison (souvent oubliée en cours de route par les soldats eux-mêmes, voir même par ceux initiant les guerres), ça peut te briser moralement un homme, ça laisse des traces, et ce qui s’y passe dépassera toujours ce qu’on nous racontera. Car, autant dans Outrages que dans Redacted, il y a cette image de la guerre, celle que l’on veut montrer au public. Cette volonté de faire passer les militaires pour des hommes droits, faisant le bien, pour de bonnes raisons, l’image publique que l’on tente de véhiculer, par les médias par exemple. Car dans les deux films, il est question d’un drame, assez similaire dans les faits (le kidnapping et le viol d’une mineur par un groupe de militaires, ainsi que l’assassinat de toute sa famille), avant finalement de voir un des membres du groupe craquer face à la situation, aux actes commis, et qui se retrouve face à la hiérarchie, qui veut camoufler l’affaire. Pas car elle salira le nom de quelques américains, mais salirait le nom de l’armée en elle-même, de leur « cause ». Le propos est là, le propos n’a pas changé en 20 ans entre les deux films. La seule chose qui a changée, ce sont ses soldats, et le climat général. Là où au Vietnam, les soldats faisaient au départ confiance à leur pays, à l’utilité de cette guerre, avant de tomber dans la désillusion la plus totale, ici, les soldats ne sont plus les mêmes. Dés le départ, ça cloche. Certains sont là car ils n’avaient pas le choix, d’autres pour éviter la prison dans leur pays. La guerre est une échappatoire pour eux, et comme ils s’ennuient et ne mesurent aucunement l’importance de leurs actes, l’importance même de la vie, ça dérape. Pas parce que les événements le demandent, mais tout simplement car cela les occupe, leur sort de leur quotidien ennuyeux, que De Palma filme de manière plus traditionnelle, lorsque leurs journées s’enchaînent à un checkpoint routier quasiment sans passage.

Et quand De Palma laisse alors les acteurs s’exprimer, ce sont eux qui tiennent la caméra, à la manière d’un found footage donc. L’image qui ment pouvait donc être les médias jusque là, les gradés de l’armée, mais en donnant la caméra à un de ses militaires, puisqu’il espère filmer ce qu’il se passe au quotidien, y voyant là son ticket d’entrée vers une école de cinéma à son retour au pays, prétextant que les images ne mentent pas, on réalise toute l’ironie du propos et du contexte. Redacted, dans son propos, est passionnant, et sa manière de mettre tout ça en image l’est tout autant. Ce n’est pas parfait, tout simplement car il faut déjà adhérer à cette manière de filmer, cette manière beaucoup plus brute à laquelle De Palma ne nous a d’ailleurs jamais habitué, lui qui travaille ses images et ses plans. Bien entendu que cela va avec le propos, mais dans un sens, je lui préférerais l’habillage bien plus classique d’Outrages. Même chose pour le casting, la plupart des acteurs à l’écran sont convaincants, mais il leur manque ce petit quelque chose que pouvaient avoir Sean Penn ou Michael J. Fox dans le métrage initial. Mais encore une fois, l’époque a changée, et là où Outrages mettait en avant des personnages forts, et même un personnage que l’on pouvait apprécier, ce ne sera pas le cas ici, Redacted semble préférer délivrer un portrait relativement triste et transparent de cette nouvelle génération de soldats comme je le disais plus haut. Et pour la fameuse scène dite choc du métrage, De Palma fait le choix du cinéma vérité, avec cette caméra embarquée, sans coupes, ce qui dans un sens va le limiter (le film étant une toute petite production, tournée rapidement, vu son sujet sensible et peu vendeur). Finalement, la plus grosse atrocité, ce sera ces images de fin, images réelles des dommages collatéraux de la guerre, qui parviennent à nous remuer d’ailleurs, ce qui était le but. Et si Redacted ne fait qu’actualiser l’enrobage d’un propos que De Palma avait déjà tenu, il reste une anomalie dans le milieu cinématographique des années 2000, plutôt sensible sur le sujet de la guerre.

Les plus

Une prolongation des thèmes d’Outrages
Le côté cinéma vérité qui colle bien au sujet
Le propos, pertinent
Sombre et sans concession, bien que limité

Les moins

Un côté technique maitrisé, mais épuisant
Limité sans doute par son budget

En bref : Redacted est un métrage intéressant, et même passionnant dans les thèmes abordés, et dans son actualisation de thèmes déjà abordés dans Outrages. Il ne réussit pas tout ce qu’il entreprend, mais ce genre de métrages doit exister.

A FEW WORDS IN ENGLISH
THE GOOD THE BAD
♥ An extension of the themes of Casualties of War
♥ The found footage aspect works well with the subject
♥ It’s fairly interesting
♥ Dark and going straight to the point
⊗ Technically well done, but exhausting
⊗ Some limitations, probably because of the low budget
Redacted is interesting, thanks to the themes it deals with, and the fact it’s an updating of themes already covered in Casualties of War. It’s not perfect, but it’s important that its exists.

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