SANS UN BRUIT (A Quiet Place) de John Krasinski (2018)

SANS UN BRUIT

Titre original : A Quiet Place
2018 – Etats Unis
Genre : Fantastique
Durée : 1h30
Réalisation : John Krasinski
Musique : Marco Beltrami
Scénario : Bryan Woods, Scott Beck et John Krasinski
Avec Emily Blunt, John Krasinski, Millicent Simmonds, Noah Jupe, Cade Woodward et Leon Russom

Synopsis : Une famille tente de survivre sous la menace de mystérieuses créatures qui attaquent au moindre bruit. S’ils vous entendent, il est déjà trop tard.

Sans un Bruit, alias A Quiet Place, avait apparemment fait pas mal de bruit (ah ah) dés l’apparition de son premier trailer. Que je n’avais bien évidemment pas vu puisque je ne regarde jamais de trailers, de peur d’être spoilé, ou que l’on me vende un film qui n’a rien à voir au final avec le produit terminé. Mais ça ne m’a pas empêché d’être attiré pour le voir, car il faut dire qu’entre 3 films de genre blindés de jumpscares putassiers, A Quiet Place semblait avoir de bonnes choses pour lui. On pourrait même dire que le métrage fait parti d’une petite vague de films de genre récents qui se décident à exploiter les différents aspects cinématographiques pour offrir une bien belle ambiance. Je veux parler de ces films, qui utilisent le plus souvent une mise en scène simple, mais surtout fluide et appliquée, et utilisant le son pour poser une ambiance, et parfois même raconter quelque chose. En gros, se servir du média utilisé de manière intelligente. Par là, je parle bien entendu de Don’t Breathe et son utilisation parfois du noir (le personnage étant aveugle) et du son (il perçoit mieux les sons), Green Room (dans un univers musical), Hush – Pas un Bruit (avec son personnage principal sourde et muette), et maintenant ce A Quiet Place. Le métrage nous place directement pas mal de jours après le début d’un drame quelconque qui aurait dévasté en partie l’humanité. Dans sa mise en place, on pense limite à tous ces films de zombies actuels. Une ville dévastée, quelques survivants enfermés dans un supermarché et qui ne doivent pas faire de bruits pour ne pas attirer quelqu’un ou quelque chose. Comme je ne savais même pas de quoi le film parlait, ça fonctionnait super sur moi d’ailleurs. L’introduction prend son temps, les plans sont élégants et travaillés, le silence rapidement pesant (le film n’est pas un film bien bruyant). On a tout de même droit à une intro de 10 minutes, sans jumpscares, sans shaky cam, sans longs dialogues inutiles prenant le spectateur par la main.

D’emblée, j’aime, jusqu’à la fin de cette introduction, osée et me faisant dire qu’on tient bien là un bon grand film. Passé cette introduction, le film reprend lors du jour 472, soit 472 jours après le début de la catastrophe, et le film va se focaliser donc sur nos personnages, à savoir les parents (Emily Blunt et John Krasinski, d’ailleurs coscénariste et réalisateur du film) et leurs deux enfants (Millicent Simmonds et Noah Jupe), confortablement installés dans un coin reculé. Avec la petite introduction en poche, le réalisateur n’a pas besoin de développer plus, il a déjà toutes les cartes en mains pour faire fonctionner son film. Des monstres errent, le moindre bruit les attire, et donc notre famille vit dans un coin reculé où ils se mettent à surveiller le moindre de leurs sons. Et cet effet de stress constant, de surveillance constante, et bien elle marche du tonnerre, même si on pourra rapidement pester contre un point du scénario, qui paradoxalement, nous réservera de très bons moments que l’on voit venir à l’avance, avec notre héroïne enceinte. Car oui, accoucher, ce n’est pas sans douleur, ça fait du bruit, et un bébé, n’en parlons même pas. L’idée est bonne, même si on se dit que l’idée même d’avoir un bébé est totalement inconsciente, mais bon, durant les 1h30 du métrage, on adhère à ce choix. Et A Quiet Place fait alors presque un sans faute, disons même qu’il frôle le sans faute durant 1h20. Le silence dans lequel nous plonge le métrage devient très rapidement ultra pesant. Rien que de voir la famille devoir préparer un repas dans le silence le plus complet, et paniquer dés qu’un petit élément tombe par terre provoque son petit effet. Même la petite routine, avec les repas en silence, le sable qu’ils mettent par terre autour de la demeure pour limiter le bruit provoque un certain petit malaise. Il n’y a que les rares sorties extérieures qui viennent briser le silence installé autant par le concept que par la mise en scène, comme lors du passage de la rivière.

Le passage dans la forêt juste derrière d’ailleurs fonctionne à merveille. Et tout ce qui s’ensuit fonctionne également à merveille, avec le monstre dans la maison, l’accouchement, les enfants perdus dehors. Même si le métrage laisse alors peu à peu la musique l’envahir (bande son parfois assez bruyante de Marco Beltrami), l’ensemble fonctionne encore et délivre quelques moments de tension hyper bienvenus. Jusqu’à ce que l’on atteigne les 10 dernières minutes du métrage, qui semble alors effectuer un virage à 180 degrés l’éloignant de ses ambitions de départ pour partir dans une direction un peu plus bruyante, mais également plus musclée et qui oublie par moment le réalisme. Alors oui, le réalisme limite, pas bien grave, après tout nous somme dans un film de genre avec des monstres, donc passons sur certaines facilités scénaristiques ou autres. Mais le métrage, comme tout métrage de genre se respectant, doit alors en donner un peu plus au spectateur dans son dernier tiers, et parfois, A Quiet Place le fait très bien (le passage dans le champ de maïs), et parfois, beaucoup moins bien. Mais si ironiquement, ces moments un poil plus musclés fonctionnent encore, A Quiet Place nous montre sa pire petite faille seulement 3 secondes avant son générique de fin, avec un plan final too much et légèrement déplacé comparé à tout ce qui précédait, et surtout comparé au personnage en question. Un plan poseur et iconique qui semble même venir d’un autre métrage. Un peu comme si le réalisateur, dans son envie de proposer un final qui se bouge plus que le reste du métrage, n’avait pas su où se situait sa limite. Alors oui, c’est dommage, et certains autres éléments sont dommages également, mais au final, rien qui ne gêne vraiment la vision du dit métrage, qui est et restera une excellente surprise de cette année 2018.

Les plus

Une excellente mise en scène posée
L’utilisation du silence
Des scènes de tensions qui fonctionnent

Les moins

Un score musical sans doute trop présent
Des facilités et incohérences vis-à-vis de son concept
Le plan final

En bref : Sans un Bruit est une excellente surprise. Il y a quelques défauts, notamment sur la fin, mais l’expérience visuelle et sonore proposée nous offre quelques excellents moments de tension.

8 réflexions sur « SANS UN BRUIT (A Quiet Place) de John Krasinski (2018) »

  1. Très bonne analyse. Film intelligent qui m’avait surpris dans son traitement. Ce n’est pas le film d’horreur standard loin de là. J’ai moi aussi ressenti un agacement, un malaise ou une déception, quant au plan final.

    1. Merci beaucoup pour ton commentaire.
      C’est ce genre de métrages qui me fait aimer le cinéma de genre, même si on tombe plus souvent sur des films faciles que ce genre de petites perles. Du coup vraiment dommage pour ce plan final, qui donne un côté « bad-ass » au personnage comme pour en faire une Ellen Ripley dans une suite (qui a été annoncée en plus), mais qui me semble bien trop… too much vu le personnage de base. Famille à protéger ou pas.

  2. Je suis d’accord avec toi, j’ai beaucoup aimé ce film dont je ne connaissais pas l’histoire. C’est le mélange film d’horreur/Emily Blunt/John Krasinski qui m’a donné envie de le voir. La scène finale ne m’a pas dérangée tant que ça, j’ai trouvé l’utilisation de l’appareil auditif plus problématique car on le sent venir de très loin et j’ai même été frustré qu’ils ne l’utilisent pas plus tôt. Mais effectivement un très bon film, et si c’est vrai qu’il y aura une suite j’ai un peu peur.

    1. J’ai été un peu me documenter du coup, et effectivement, le second volet est en écriture actuellement, on peut donc facilement penser à une sortie pour 2020. On ne sait du coup forcément rien pour le moment, mais soit ce sera une suite directe et donc dans un sens forcément plus « musclée », soit de nouveaux personnages.

      1. Je pense qu’une suite sera forcément dans un genre différent et va vouloir expliquer des choses laissées en suspens. C’est dommage de ne pas pouvoir garder un peu de mystère, de laisser le spectateur imaginer. Car j’imagine qu’ils vont vouloir expliquer d’où viennent les créatures

        1. J’espère pas honnêtement. C’est en général quand même hyper rare qu’on ai droit à une préquelle sur l’origine de quelque chose dés le second opus, ils attendent en général de ne plus avoir d’idées… ou de ressortir une saga des années après (The Thing avec sa préquelle 30 ans après, Prometheus).
          Donc sincèrement, je croise les doigts pour que l’on ai pas la préquelle !

  3. J’ai plusieurs gros problèmes avec ce film parce que je suis ressortie de ma séance en me sentant totalement flouée (j’aime les critiques objectives).
    Déjà par la promesse de « film d’horreur ». C’est l’éternelle histoire de la promotion mensongère parce qu’on vise un public adolescent venu pousser des cris en meute aux séances de 22h… Pas nouveau, on a déjà fait le coup pour The Witch ou It Comes At Night mais je me fais avoir à chaque fois, c’est rageant.
    Admettons que ce soit un « film d’ambiance »… Je trouve que le silence est plutôt mal exploité, justement. Y’a toujours un brouhaha sonore en fond, et puis y’a des fois où on peut faire un peu plus de bruit que d’autres parce que là, c’est moins pratique si on peut pas se faire s’entrechoquer deux assiettes tandis que les ratons-laveurs font des bonds sur le toit en TOTALE impunité.
    Alors que je m’attendais à être crispée à mon siège tout du long (parce que comment vivre sans faire le moindre bruit hein ? C’est encore pire qu’un scénario d’invasion zombie), les seules scènes où j’ai véritablement eu des gros coups de pressions sont au nombre de… deux : l’introduction avec leur expédition dans la pharmacie et ce fameux jouet à piles (un court-métrage dans le film, qui condense parfaitement tout ce que je m’attendais à retrouver durant l’ensemble du film, en fait) et la balade en forêt avec le vieux édenté qui surgit de nul part.
    Je rejoins le commentaire précédent sur la découverte du « comment qu’on va retourner leur sensibilité auditive contre eux ». Ils s’en rendent vraiment compte DEUX ans après ? Alors qu’on nous assomme de zooms sur l’intérieur de leur crâne purulent (subtilité) ?
    Et personnellement, j’ai trouvé que Krasinski en faisait des caisses (les yeux exorbités, les sourcils haussés en permanence et cet index tellement enfoncé dans sa joue desfois qu’on doute qu’il est en train de faire « CHUUUUTEEUUUUH » à ses enfants…). Emily Blunt moins, mais seulement parce que je la comparais à son mari et du coup, ça pouvait difficilement être pire, à mes yeux.

    Du coup, je suis moins convaincue que toi : bonne idée, mais tellement mal traitée… Penser qu’une suite (ou pire, un préquel) est en préparation me laisse grandement perplexe. Encore que savoir comment l’humanité a compris qu’il fallait désormais bannir le bruit * , la parole et la musique de son existence pourrait m’intéresser mais on va pousser non plus…

    * Les Unes de journaux affichées dans leur bureau et qui proclament « PAS DE BRUIT POUR RESTER EN VIE », j’avoue m’être demandée comment elles avaient pu 1) Être imprimées, 2) distribuées à travers le pays et 3) Arriver jusqu’à leur bled de campagne isolé de tout).

    1. Wow, ça en fait un long commentaire dés mon réveil !
      Ah, le film a été vendu par le marketing comme un film d’horreur ? Je l’ignorais ça. Et je ne m’en porte pas plus mal, ça me permet de découvrir les films vierge de toute information. Il me semble par contre que le public a été néanmoins plus réceptif à ce Sans un Bruit comparé à The Witch et It Comes at Night. J’ai bien aimé les 3 métrages, mais je ne les range pas dans la catégorie film d’horreur. Fantastique et Ambiance en effet.
      Au niveau de l’utilisation du silence, comme je le dis, moi c’est plutôt au niveau de la musique que j’ai trouvé ça dommage. Ils auraient du faire comme pour No Country for Old Men : aucune bande son. Surtout que le choix de Marco Beltrami en compositeur, je ne suis pas fan de son travail, je trouve ses compositions beaucoup trop bruyantes et appuyants trop souvent les effets que l’on voit déjà à l’image (Scream, The Thing, Die Hard 5, Carrie, Cursed, Underworld, ou même sa courte participation à l’univers de Rodriguez avec The Faculty).
      Pour l’absence de subtilité avec les monstres, je trouve néanmoins que le film n’abuse pas de leur présence (sur la fin, un peu quand même, mais sinon, le film sait prendre son temps, heureusement). Cette semi-subtilité (ou non-subtilité), je la résumerais à la bonne/mauvaise surprise lorsque le générique de fin s’est abattu et que j’ai vu le nom de Michael Bay à la production. Cela peut expliquer pour toi le manque de subtilité et les facilités du film, pour moi ça m’a surpris dans l’autre sens.

      Mais par contre, connaissant le milieu Hollywoodien et l’univers des suites, l’idée d’une préquelle me laisse totalement de marbre, car même si, comme tu le dis si bien, l’idée de découvrir comment l’humanité veut bannir le bruit peut amener de bonnes choses, le cahier de charge des suites/préquelles à Hollywood, le tout allié à ce plan final qui en dit long me laisse plutôt penser à une direction plus musclée pour ce futur second opus.

Laisser un commentaire

En savoir plus sur Loving movies

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading