ELECTION (黑社會) de Johnnie To (2005)

ELECTION

Titre Original : 黑社會
2005 – Hong Kong
Genre : Policier
Durée : 1h39
Réalisation : Johnnie To
Musique : Lo Ta-Yu
Scénario : Yau Nai-Hoi et Yip Tin-Shing

Avec Simon Yam, Tony Leung Ka-Fai, Louis Koo, Nick Cheung, Eddie Cheung, Lam Suet, Gordon Lam, Wong Tin-Lam, Tam Bing-Man et Maggie Siu

Synopsis : Les grandes figures de la Wo Shing Society, la plus ancienne triade de Hong-Kong, s’apprêtent à élire un nouveau leader. Des rivalités naissent entre deux candidats. L’un est très lié aux traditions de la Triade, l’autre veut les bouleverser, quitte à utiliser la violence et la fraude…

Johnnie To, c’est un peu comme Tsui Hark, quand on se décide à parler de l’un de ses nombreux métrages, mieux vaut préciser d’entrée de jeu où l’on se situe vis-à-vis dudit artiste, tant les deux auteurs ont leur réputation, en plus de jouir d’une aura auprès des cinéphiles amateurs de cinéma Asiatique. Si bien d’ailleurs que les avis faisant croire que chacun de leur film révolutionne l’industrie du cinéma commencent à fatiguer, un brin. Dans les deux cas, nous sommes pour moi face à des auteurs, c’est indéniable, et des auteurs importants, mais malgré tout à la carrière bancale. Tsui Hark, depuis des années, a plongé dans les coproductions avec la Chine, le tout en abusant de CGI, qu’il maitrise certes mieux que certains de ses confrères, mais qui ne sont pas ma tasse de thé. Johnnie To, c’est un autre cas de figure, alternant films de commandes et cinéma plus personnel, alternant polar et comédie. Certaines des œuvres les plus réputées de Johnnie To me laissent de marbre par exemple, et pire, parviennent à m’endormir, mais je ne citerais aucun titre ici. Si bien que se lancer dans un Johnnie To, pour moi, demande une motivation extrême vu qu’on ne sait pas souvent ce sur quoi nous allons tomber. Election trainait donc depuis des années, et il me faisait peur, tant le film avait à sa sortie été adulé par certains, et qualifié de somnifère par une petite minorité. Et au final ? Et bien, vu avec des années de retard, Election est fort sympathie, en plus de pouvoir être vu avec ironie sur le système actuel. L’histoire a beau se dérouler dans le milieu des triades, avec tous les deux ans une élection pour élire celui qui sera le parrain, et recevra donc le sceptre du dragon, impossible de ne pas sourire bêtement devant son écran en imaginant des élections banales ayant lieu un peu partout dans le monde, pour des présidents, des ministres et j’en passe, tant le métrage de Johnnie To s’amuse en quelque sorte à montrer un univers qui semble régit par des élections, un sens de l’honneur, mais qui derrière, ne montre finalement que corruption, coups bas, meurtres, le tout pour arriver à ses fins.

Les élections du titre, en soit, elles sont presque absentes du métrage, puisqu’en l’espace de 10 minutes, les votes sont faits, Lok (Simon Yam) sera pour les deux années à venir le nouveau président. Dans les faits par contre, c’est différent, puisque bien que Lok soit officiellement élu, son rival, Big D (Tony Leung Ka-Fai) ne l’entends pas sous cet angle-là, et l’a plutôt mauvaise d’avoir dépensé autant d’argent pour gagner des élections… qu’il a perdu. Du coup, que faire ? Faire pression, en venir aux kidnappings, aux menaces, et du coup, comme pour beaucoup dans la triade, avoir le sceptre c’est la tradition et que rien n’a plus de valeur, voilà qu’une course poursuite s’engage pour le récupérer. La vision de la triade au sein du métrage est à la fois amusante, logique, et connue. Le visage que la triade veut se donner, avec son élection démocratique, fait sourire, tandis que son fonctionnement réel lui est logique, et que les crasses que tout le monde est prêt à faire ne cache pas leur appartenance au milieu, et donc est bien connu des spectateurs se lançant dans un film sur les triades. Johnnie To d’ailleurs va tenter, pendant une bonne partie de son métrage, de préserver les apparences en opposant Lok et Big D, le premier étant montré sous un angle glorieux, puisqu’il écoute les anciens, s’occupe de son fils, paraît sympa avec tout le monde, et après tout, pourquoi pas, il suffit que Simon Yam balance un sourire et on le croit sur parole. Le second par contre nous est montré sous le pire visage possible dés son introduction, avec corruption de membres pour avoir des votes, et rapidement, kidnapping et torture pour faire changer d’avis ceux qui sont contre lui. Pourtant, il y a bien une chose que l’on sait depuis le temps, c’est qu’il ne faut pas toujours se fier aux apparences, et qu’un loup peut souvent se déguiser en agneau si cela l’aide à atteindre son but.

Election est donc bien construit dans sa narration, sait jouer ses cartes au bon moment, tout en n’étirant pas son maigre concept, et bénéficie, comme toujours ceci dit avec Johnnie To, d’un enrobage technique très soigné, ainsi que d’un casting d’habitué qui fait toujours à voir, puisque nos deux concurrents sont entourés de têtes connues comme Louis Koo, Nick Cheung ou encore Sam Suet. Du tout bon à l’écran donc. Comme souvent d’ailleurs, Johnnie To privilégie l’ambiance et l’attente à l’action pure, préférant réserver les rares moments violents pour les moments où nous nous y attendions le moins, afin de marquer. Dans le fond il aurait tort de se priver, car Election est fluide, et il se passe assez de choses à l’écran pour ne jamais ennuyer le spectateur, et donc rendre ces rares explosions de violence convaincantes. Il est un peu plus dommage par contre qu’en multipliant les personnages, la plupart restent en arrière-plan, et paraissent donc n’être par moment que des hommes de main sans grande importance (oui, je pense à vous, Nick Cheung et Louis Koo). De même, mais cela ne concerne pas le film en lui-même techniquement, mais Election est un film, avec un début, un milieu et une fin, et la pertinence de faire deux opus sur cet univers avec ces personnages, une fois que tout a été révélé ici, laisse un brin songeur, mais ça, on y reviendra au moment de parler du second opus. Election premier du nom en tout cas ne renouvelle pas le genre, n’est pas un chef d’œuvre, mais offre un point de vue assez ironique sur le milieu, et a donc assez d’arguments pour séduire.

Les plus

Le concept de l’élection, ironique
Un film sobre et appliqué
Excellent casting
Se suit sans ennui

Les moins

Beaucoup de personnages restent en arrière-plan
Un film qui se suffit à lui-même

En bref : Ce premier Election est un film de triade très solide, avec un point de vue assez ironique, pour un duel entre deux grands acteurs allant à l’essentiel.

A FEW WORDS IN ENGLISH
THE GOOD THE BAD
♥ The concept of the election itself, ironic
♥ A simple and well made film
♥ Excellent cast
♥ Never boring and easy to follow
⊗ Lots of characters remain in the background
⊗ One film is enough about the election in fact
This first Election is a strong Triad movie, with an ironic point of view, for a duel between two great actors.

4 réflexions sur « ELECTION (黑社會) de Johnnie To (2005) »

  1. Moi qui suis rarement déçu par un Johnnie To, Celui-ci devrait le plaire. Je louche dessus depuis très longtemps, il faut dire que sa réputation joue en sa faveur. Tu viens confirmer que c’est une valeur sûre.
    Bien sûr, chaque film de To n’a pas vocation à révolutionner le genre. D’ailleurs, bien peu de réalisateurs font des films dans ce sens. Le style To est néanmoins unique et incontestablement séminal, faisant rayonner toute une production à l’international.

    1. Alors oui, si tu adores le cinéma de ce cher Johnnie, fonce (et si tu veux mieux comprendre mon avis, regarde des films comme l’affreux BLIND DETECTIVE avec Andy Lau, une comédie insupportable de 2h15). Mais les deux ELECTION, c’est du tout bon (vu le 2 après avoir écris la chronique du premier). Je ne sais pas si ça existe en France en Blu-Ray, mais si oui, je finirais par les prendre.

        1. Pour la sortie cinéma oui c’est sûr, un ami avait été (moi j’ai fais mon petit joueur par crainte de tomber sur des Johnnie To auxquels je n’adhère pas du tout), dvd certain aussi, Blu-Ray je ne savais pas. Mais tant mieux, sauf si maintenant ça ne se trouve qu’à 100 euros, là c’est mort.

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