BABEL de Alejandro Gonzales Inarritu (2006)

BABEL

2006 – Etats Unis
Budget : 25 millions $
Genre : Drame
Durée : 2h23
Réalisation : Alejandro Gonzales Inarritu
Musique : Gustavo Santaolalla
Scénario : Guillermo Arriaga

Avec Brad Pitt, Cate Blanchett, Gael Garcia Bernal, Yakusho Yôji, Adriana Barraza et Kikuchi Rinko

Synopsis : En plein désert marocain, un coup de feu retentit. Il va déclencher toute une série d’événements qui impliqueront un couple de touristes américains au bord du naufrage, deux jeunes Marocains auteurs d’un crime accidentel, une nourrice qui voyage illégalement avec deux enfants américains, et une adolescente japonaise rebelle dont le père est recherché par la police à Tokyo. Séparés par leurs cultures et leurs modes de vie, chacun de ces quatre groupes de personnes va cependant connaître une même destinée d’isolement et de douleur…

Le voici, le nouveau film de Alejandro Gonzales Inarritu, après Amours chiennes et 21 grammes, tout deux excellents et fonctionnant sur les mêmes bases narratives. Ces films en effet la particularité de traiter de plusieurs histoires, apparemment sans liens les unes avec les autres, de les entrecouper, les décaler au niveau temporel, et de les rassembler petit à petit en une seule et même histoire. L’exercice est bien souvent périlleux, mais ici, traité de manière finalement cohérente, où tout rentre dans l’ordre, après avoir fait planer le doute sur le spectateur pendant un long moment. 21 grammes, le précédent film du réalisateur, pouvait même surprendre au début par le rôle de Sean Penn, grâce à un montage astucieux, mettant le doute, allant jusqu’à faire croire chez le spectateur qu’il joue un double rôle. L’expérience est tentée à nouveau ici avec Babel. Doté d’un plus gros budget, il permet au réalisateur, en plus d’entremêler ses intrigues, de situer le film dans 3 lieux différents : le Maroc, le Mexique, et le Japon. 3 lieux avec au départ, vraiment aucuns liens apparents.

Maroc, de jour. Un homme marche dans le désert, puis s’arrête à la maison d’un ami. Avec lui, un fusil, et 300 cartouches. Il le vend à son ami et à sa famille, composée de la mère, des deux fils, et d’une fille. Le but : protégez le bétail contre les coyotes, nombreux. Tout de suite, le ton est donné, et il n’est pas rose. Un des fils espionne sa sœur en train de se déshabiller par un trou dans le mur, et elle le laisse faire. Il y a une sorte de conflit entre les deux frères par rapport au fusil, devant sans doute représenter la force et l’autorité pour eux. S’amusant à tester les capacités du fusil, notamment la distance de tir, le plus jeune d’entre eux tire sur un bus et… rien ne se passe. Ils sont déçus. Seulement quelques instants après, le bus s’arrête, et les deux enfants comprennent immédiatement ce qu’ils ont fait, et s’enfuient. A l’intérieur du bus, plusieurs touristes venant d’un peu partout, dont de France et d’Amérique, et donc, le fameux couple interprété par Brad Pitt et Cate Blanchett, Richard et Susan. Susan est touchée par la cartouche du fusil, et ils sont emmenés dans un petit village en attendant l’arrivée d’une ambulance.

Japon. Nous suivons une jeune femme, Chieko, une sourde muette. Elle souffre vraiment beaucoup de son handicap. Une sorte de racisme est représenté autour d’elle, avec son lot de personnes n’acceptant par les différences. Elle ne peut pas parler et n’entend pas, donc, elle ne mérite pas qu’on y prête attention si ce n’est pour se moquer d’elle… Une sorte de racisme que l’on retrouve partout, que ce soit dans la peur des touristes perdus dans un petit village Marocain, où encore la peur des coutumes des pays voisins pour les deux jeunes enfants, Mike et Debbie. Cependant, Chieko est bien celle qui en souffre le plus, à cause de son handicap, ce n’est pas elle qui a peur des autres, mais les autres qui ont peur d’elles, jusqu’à ce qu’elle rencontre des cousins d’une amie et sortira avec eux, en profitant de la drogue et de l’alcool. Mais encore là, tout ne sera pas rose pour elle, comme c’est bien souvent le cas dans la vraie vie. Voilà dans les grandes lignes les trois histoires traitées dans Babel. On pourrait même séparé l’histoire au Maroc en deux parties, l’une suivant Richard et Susan, et l’autre la famille marocaine à la source de la problématique du film.

Outre la peur de l’autre que l’on ressent ou que l’on subit envers les autres, l’autre thème clé du film est bien la compréhension. Que ce soit des Américains au Maroc, des Américains au Mexique, ou une Japonaise ne parlant pas et n’entendant rien du tout, les personnages ont tous du mal à se faire comprendre envers les autres, et donc à communiquer en général. Et ce sera une des sources de tous les problèmes. Pour son film, Inarritu filme la plupart de son film caméra à l’épaule, ce qui fonctionne à merveille, augmentant la tension ressentie par le spectateur lors de certaines scènes, comme si le caméraman était par moment lui-même surpris de ce que la caméra capture comme image. Pour accompagner les images de son film, magnifiques, Inarritu fait une nouvelle fois appel à Gustavo Santaolalla pour la musique. Ayant orchestré la musique de ces deux précédents métrages, il reprend la barre ici, en reprenant d’ailleurs le théme de fin de 21 grammes, et se voit accompagné d’autres morceaux, notamment pour la partie se déroulant au Japon, où on retrouve Sakamoto Ryuchi, le compositeur de Snake eyes et Femme fatale de Brian De Palma. Les deux ou trois morceaux qu’il a composé sont très beaux et hypnotisant, notamment celui de fin, qui accompagne un magnifique plan de caméra reculant sur les rues de la ville.

Le film tient en haleine durant ces 2h23, et même si certains événements s’avèrent prévisibles, cela semble plutôt voulu et donc ne gâche en rien la vision du métrage. Il faut déjà saluer l’effort et surtout la réussite de faire ce genre de film, aux histoires simples mais tellement hachées qu’il est parfois dur de les faire fonctionner. Surtout dur de faire que l’on s’attache aux personnages dans une telle situation temporelle se déroulant devant nous, et pourtant, c’est la troisième fois que le metteur en scène parvient cet exploit. Une belle leçon de cinéma dans un film virtuose, mais loin de remonter le moral. Sans être glauque, c’est une œuvre triste, sans espoir durant un long moment, et pour certains personnages secondaires, pourtant, toujours responsables de leurs erreurs, mais auxquels on s’attache si facilement.

Les plus
Trois histoires qui se rejoignent
La mise en scène
Superbe interprétation
Attachant et prenant
Les moins
Une sensation de redite après Amour Chienne et 21 grammes

En bref: Prix de la mise en scène à Cannes, Babel est une œuvre complexe dans sa façon dont l’histoire nous est contée, est reste un grand moment de cinéma, pas très gai ceci dit.

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