SOCIETY de Brian Yuzna (1989)

SOCIETY

Titre original : Society
1989 – Etats Unis
Genre : Horreur
Durée : 1h39
Réalisation : Brian Yuzna
Musique : Phil Davies et Mark Ryder
Scénario : Rick Fry et Woody Keith

Avec Billy Warlock, Connie Danese, Ben Slack, Evan Richards, Patrice Jennings et Tim Bartell

Synopsis : La famille de Bill appartient à la haute société de Beverly Hills, mais il ne s’y sent pas à l’aise, il s’en sent exclu. Bill va finir par découvrir que cette haute société se livre à des orgies contre-nature.

Après avoir produit les films de Stuart Gordon à ses débuts (Re-Animator, From Beyond et Dolls), Brian Yuzna se lance dans la réalisation en 1989 avec talent, avant de poursuivre une carrière intéressante mais en dents de scie. Avec son premier métrage, Yuzna parvient à surprendre, autant par sa première partie, classique, facile, limite hors sujet, tout droit sortie d’un sitcom, que dans sa seconde partie lorgnant beaucoup plus vers le fantastique et le gluant. Pour ce premier essai, Yuzna s’en sort donc plus que bien, et parvient à mélanger habillement humour et gore, à marquer les esprits, alors qu’au départ, ce n’était vraiment pas gagné. Tout commence à la façon d’un slasher (un peu comme Beyond Re-Animation bien des années plus tard). Le jeune Bill avance dans une maison, il fait nuit, l’obscurité règne, il attrape un couteau. La musique se fait stressante, la lumière s’allume, et ce n’est que sa mère en face de lui. Bill se retrouve dans le cabinet de son psy. Il ne se sent pas à l’aise dans sa famille de riche, comme mis à l’écart. Il croque dans une pomme, et là, dans son esprit, l’intérieur de la pomme n’est que pourriture et vers. Dans cette petite scène simple, Yuzna laisse sous-entendre le sujet du métrage, sans que le spectateur ne s’en rende compte immédiatement. La pomme, c’est l’univers dans lequel Bill évolue depuis sa naissance. Un univers en apparence calme, qui ferait envie à tout le monde, mais en grattant quelque peu la surface, c’est un autre univers, beaucoup moins reluisant, qui se révèle à Bill, et à nous, spectateurs. Car Society va jouer avec cette thématique pendant les trois quarts de sa durée, allant jusqu’à faire croire au spectateur connaisseur qu’il s’est trompé de métrage.

Et c’est là la plus grande force du métrage, outre son final totalement décalé et hallucinant. Yuzna parvient, pendant plus d’une heure et quart, à nous captiver malgré la banalité de son propos (en apparence), et surtout hors propos pour un film de genre. Nous suivons les interrogations profondes de Bill, interrogations obligatoires de l’adolescence, avec son lot de pourquoi, de comment, de réactions violentes au lycée ou envers sa propre famille. Bill se sent à l’écart, ses parents semblent lui préférer sa sœur Jenny qui fait ses premiers pas dans la haute société, son psy le croit paranoïaque. Bill va finir par croire à un complot et se rebeller contre sa famille, encore plus quand un de ses amis, Blanchard, va lui faire écouter un enregistrement illégal concernant sa famille, qui pratiquerait des orgies. Bill, au début, refuse d’y croire, mais progressivement, les évènements vont lui sembler trop étranges et trop gros pour que ce ne soit que des coïncidences. La cassette contenant l’enregistrement à été truqué, Blanchard a un accident de voiture, et surtout, Bill surprend sa sœur sous la douche dans une position étrange. L’étrangeté fait irruption progressivement dans le récit, mais rien ne peut nous préparer à la réalité, bien que beaucoup de questions resteront en suspens. Pour le moment, Society ressemble juste à un sitcom sur Beverly Hills, un film plutôt bien mené sur la vie d’un adolescent mal dans sa peau, mais Yuzna va bien plus loin, puisque ici, les riches se nourrissent des pauvres.

La société bourgeoise en prend énormément pour son grade, Yuzna dépeignant cet univers comme un lieu crade, fermé, incestueux, pervers. Un monde refusant la différence et ne se souciant guère de ce qui se passe autour d’eux. Seules les apparences méritent d’être préservées, en ce qui les concerne. Ceux venant d’autres milieux sont à mille lieux d’imaginer ce qu’il se passe réellement parmi ces personnalités aisées. Et c’est ainsi que Yuzna peut amener l’élément fantastique dans le métrage, en mélangeant habilement maquillages surprenants et dégoûtants et humour noir savoureux, sans jamais aller dans le vulgaire pur et simple. Si beaucoup de questions restent sans réponse, le final de Society fascine et dégoûte à la fois, nous proposant un cocktail assez étonnant où le sang n’apparaîtra étrangement pas, mais laisse place à une toute autre catégorie d’effets spéciaux, innovante et osée. Sans ce final aujourd’hui connu de tous, Yuzna n’aurait fait pour ce premier essai à la mise en scène qu’une sorte de drame sur la quête d’identité d’un jeune homme, de sa place dans sa famille et au sein de la société. C’est sa dernière demi-heure qui donne toute sa signification au métrage, à ce qui a précédé, au prologue, sans pour autant en dévoiler le fin mot. Society reste finalement un métrage plus intelligent qu’il n’y paraît au premier coup d’œil, doté d’un bon scénario, d’excellents effets spéciaux. Les acteurs s’en sortent merveilleusement bien, et la réalisation, classique dans toute sa première partie, paraissant limite télévisée (comme souvent chez Yuzna d’ailleurs), convient à son sujet délicat. Un film plus que sympathique pour son premier film.

Les plus

Les thèmes du film correctement exploités
Le final hallucinant
Un métrage surprenant

Les moins

Une réalisation parfois trop télévisée

 

En bref : Une série B surprenante et sympathique, où la haute société en prend sérieusement pour son grade. Yuzna prouve qu’il est aussi bon metteur en scène que producteur. En tout cas, le final restera dans les mémoires.

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