A TOUTE EPREUVE (辣手神探) de John Woo (1992)

A TOUTE EPREUVE

Titre Original : Hard Boiled – 辣手神探
1992 – Hong Kong
Genre : Polar hard boiled
Durée : 2h08
Réalisation : John Woo
Musique : Michael Gibbs
Scénario : Barry Wong

Avec Chow Yun-fat, Tony Leung Chiu-wai, Teresa Mo, Philip Chan, Philip Kwok, Anthony Wong, Bowie Lam, Anjo Leung, Bobby Au-yeung et Kwan Hoi-Shan

Synopsis : Hong-Kong 1997. Les Britanniques vont rendre dans quelques mois à la Chine populaire une ville corrompue par le crime. Alors que les policiers ont baissé les bras, un groupe d’inspecteurs, mené par Yuen, surnommé Tequila, décide de mettre fin a la suprématie des gangs.

Le parcours de John Woo a quelque chose d’assez fascinant quand on y repense avec du recul. Car si on y pense, le réalisateur est surtout connu pour ses polars et films d’actions, sauf que sa carrière n’a aucunement débutée avec Le Syndicat du Crime en 1986, mais son film date bel et bien de 1968, rien que ça. Avant de livrer ce qui fera sa reconnaissance, John Woo avait déjà réalisé une dizaine de films, souvent méconnus du public. Mais voilà, en 1986, il est propulsé sur le devant de la scène grâce au Syndicat du Crime, produit par Tsui Hark. Immense succès oblige, il poursuivra très rapidement dans cette voie avec l’aide de Tsui Hark, mais les deux hommes sont rapidement en désaccords, dés leur second métrage l’année suivante, Le Syndicat du Crime 2, film que Woo n’envisageait pas de faire, et malgré son final dantesque et explosif, et bien, je ne pourrais lui donner tort car je n’aime pas son film. L’année suivante, encore pour Tsui Hark, John Woo réalise The Killer, mais là encore, des désaccords entre les deux hommes, Tsui Hark voulant intégralement remonter le film, mais par manque de temps à cause (grâce) à la sortie trop proche à Taiwan, il ne put le faire, et l’accueil là-bas fut tellement positif que le public donna raison à John Woo. La même année, les deux hommes se brouillent définitivement quand Tsui Hark lance la production d’un troisième Syndicat du Crime, qu’il tournera lui-même, tandis que John Woo va lui dans son coin tourner le plus personnel (et sans doute son meilleur film) Une Balle dans la Tête. Plus dramatique, plus dur, l’ironie de tout ça, c’est qu’Une Balle dans la Tête fut très mal reçu à Hong Kong par le public et les critiques. Si bien qu’après la courte pause que fut Les Associés (Once a Thief) en 1991, et la rétrocession approchant, John Woo livre un dernier grand film avant de céder à l’appel des Etats Unis et de Jean Claude Van Damme en 1993. John Woo a environ 120 jours pour filmer son ultime film à Hong Kong, film où ce coup-ci, son héros sera un flic, et où l’action sera encore plus mise en avant. Un bouquet final avant de dire au revoir. Car contrairement à Tsui Hark et Ringo Lam, qui partirent aux Etats Unis le temps de deux ou trois films avant de revenir, John Woo passera 10 ans aux Etats Unis, le temps de six films à la qualité variable, mais ça, on en reparlera un autre jour.

Car il est donc temps de parler de Hard Boiled, alias À Toute Épreuve, un film assez intimidant de par sa place dans la filmographie de John Woo. Son adieu à Hong Kong, son métrage où le héros sera un flic, son film où l’action est tellement démesurée que si le film dure 2h08, la scène finale dure à elle seule bien 50 minutes qui ne s’arrêtent jamais. Si À Toute Épreuve a marqué tous les esprits, c’est bel et bien pour sa générosité dans l’action, son originalité pour mettre celle-ci en scène, que ce soit dans les chorégraphies des gunfights, ou dans certaines idées de mise en scène, tel ce long plan séquence dans les couloirs de l’hôpital lors du final. Son fond lui, est déjà plus classique que les films précédents du réalisateur. Pas d’amitié entre un tueur et un flic, pas de guerre venant déchirer l’innocence, la conviction et oui, encore l’amitié. Ceci dit, il sera toujours question d’amitié, entre notre flic joué par l’éternel Chow Yun-Fat et un flic infiltré joué par Tony Leung Chiu-wai. Deux grands acteurs et deux gueules du cinéma HK. Heureusement, face à eux, John Woo a vu les choses en grand, avec un Anthony Wong en grand méchant psychopathe et Philip Kwok en homme de main increvable. Le film prend alors des allures plus simplistes, celle du flic dur à cuir qui vide ses chargeurs sur ses ennemis, qui va tout faire pour que le business du grand méchant, ici la vente d’armes, s’écroule, et va se lier pour cela avec notre flic infiltré, devant jongler entre les deux camps. Du classique bien mené, allant toujours à l’essentiel, caractérisant ses personnages juste ce qu’il faut pour les rendre attachants ou détestables en une poignée de secondes. Mais on peut clairement dire adieu à ce qui caractérisait Une Balle dans la Tête ou The Killer, à savoir, l’émotion. Bien que parfois un brin too much dans The Killer, elle était pourtant bien là et ajoutait une dimension non négligeable à l’œuvre. Ici, l’action pure domine. Mais j’ai envie de dire, voir des films d’action aussi généreux, c’est tellement rare qu’on ne va pas non plus faire la fine bouche non ? Si dans Le Syndicat du Crime 2, il fallait attendre la scène finale pour retrouver un John Woo en forme et de l’action bigger than life, À Toute Épreuve lui nous explose au visage et ce dés la scène d’ouverture dans le salon de thé.

Occasion d’ailleurs de trouver en tueur un certain Kunimura Jun, à la carrière plus qu’impressionnante, autant au Japon (il a tourné pour Miike, Kitano, Sono, Kitamura et j’en passe) que pour d’autres pays, comme donc Hong Kong ici, mais aussi les Etats Unis (Black Rain, Kill Bill), la Corée (The Strangers en 2016) ou pour Netflix récemment (Kate). À Toute Épreuve, en terme de quotas, on pourrait presque dire qu’il y a 25 minutes d’histoire pour 1h40 d’action non stop. Que ce soit l’ouverture donc, dans ce salon de thé où ça fusille dans tous les sens, la scène de l’entrepôt avec explosions, fusillades et moto, sans oublier l’éternel face à face où on se braque mutuellement avec une arme à feu, et bien évidemment son final dantesque dans l’hôpital, il y a de quoi faire. Car oui, c’est arrivé à la moitié du film que le scénario se pose déjà dans l’hôpital. À l’époque, on pouvait se poser des questions. Arriver déjà comme ce qui s’annonce le lieu final, à 1h10 de film seulement, alors qu’il reste une heure. C’est que John Woo ne plaisante pas ici, pendant une heure, ça va fusiller, sauter dans tous les sens, nous donner du ralenti, du plan séquence, de l’explosion, des bébés à sauver, des otages, un Anthony Wong sans pitié qui flingue des innocents, des duels entre tueurs, le tout avant de détruire intégralement les lieux, car ce ne serait pas fun sinon. Et donc oui, si le fond est un peu plus maigre que d’habitude, John Woo a tout misé sur le spectacle pyrotechnique et explosif de son film, soignant sa mise en scène, donnant aux fans ce qu’ils veulent très exactement, s’entourant d’acteurs investis qui donnent de leur personne, le tout avec la sublime musique de Michael Gibbs aux sonorités jazzy, sous la lumière de l’habitué Horace Wong (avec qui il travaille depuis Le Syndicat du Crime), et avec Philip Kwok aux chorégraphies des scènes d’action, ce qui l’éloigne énormément des petits films fauchés sur lesquels il avait tenu le même poste les années précédentes (Story of Ricky, Erotic Ghost Story 3 ou encore Sea Wolves, soit le septième In the Line of Duty). Bref, en temps que film d’action qui n’a comme ambition qu’en mettre plein la vue et de remettre tout le monde à sa place, À Toute Épreuve se positionne là, et on attend toujours une copie HD en France, vu la qualité des copies HD déjà disponibles à l’étranger. Soyons fous, on peut imaginer un jour une édition collector avec en prime l’ost en CD en bonus.

Les plus

De l’action explosive de partout
Hyper généreux
Un film soigné à tout point de vue
Un bon gros casting
Je vous ai dit qu’il y avait beaucoup d’action ?

Les moins

Certes, un fond plus simple et manichéen que d’habitude

En bref : Dernier film de John Woo avant son exil aux Etats Unis pendant 10 ans, À Toute Épreuve est un au revoir hyper généreux, explosif du début à la fin, maitrisé et qui en met plein la vue. C’était son but. Pari réussi !

A FEW WORDS IN ENGLISH
THE GOOD THE BAD
♥ An explosive movie
♥ Very generous
♥ It’s well done, in every way
♥ A great and big cast
♥ Did I tell you there’s action in the movie?
⊗ But it’s true, the story and everything are quite simple
Last movie made by John Woo before he went to the States for 10 years, Hard Boiled is a very generous farewell, explosive from start to finish. Well done really!

2 réflexions sur « A TOUTE EPREUVE (辣手神探) de John Woo (1992) »

  1. Oh oui, un beau petit coffret « Hard boiled », en voilà une belle idée ! Ça permettra de voir ce film qui fait désormais référence en matière d’action, et on comprend pourquoi en lisant ton excellent article.
    Je crois qu’on avait déjà évoqué la chose quand j’ai publié mon article sur « une balle dans la tête », ne reste plus qu’à faire honneur à « Hard boiled ». Christophe Gans, si tu nous entends, je suis sur que tu peux faire quelque chose. 😉

    1. J’ai l’impression malheureusement que HK Video ne réédite jamais en Blu-Ray ce qu’ils avaient sortis en DVD (et qui coûte souvent un bras voir plus). Pour ça que pour découvrir ou redécouvrir ces films, je miserais plus sur des petits éditeurs comme Spectrum (et pour ce qui est moins explosif, d’autres éditeurs, ou parfois ESC pour les quelques films plus récents comme THE SADNESS). J’ai la lance d’avoir tous les John Woo dans leurs éditions, dont certains achetés au départ au hasard (celui-ci notamment, trouvé d’occasion par hasard dans une boutique alors que je ne connaissais pas encore hyper bien le cinéma HK).
      Gans par contre lui, est occupé en ce moment avec son nouveau film, RETURN TO SILENT HILL. Que j’attend autant avec impatience (Gans, ça reste un événement) que crainte (Konami qui fait les jeux et a les droits n’a pris que des décisions de merde depuis bien 15 ans).

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