THE LOVERS (梁祝) de Tsui Hark (1994)

THE LOVERS

Titre Original : 梁祝
1994 – Hong Kong
Genre : Drame
Durée : 1h47
Réalisation : Tsui Hark
Musique : Mark Lui, William Wu, James Wong et Raymond Wong
Scénario : Tsui Hark et Sharon Hui

Avec Charlie Yeung, Nicky Wu, Elvis Tsui, Carrie Ng, Lau Shun, Sun Xing, Hau Bing-Ying, Linda Liu et Yuan Shen

Synopsis : Un haut fonctionnaire de la cour impériale rentre pour annoncer à sa femme qu’il compte marier leur fille unique, Chu Ying-tai, à un des héritiers de la famille Ma. Afin d’assurer ce mariage, il fait passer à cette dernière un examen sur l’art, mais il comprend très vite que sa fille est incapable de jouer de la lyre, de rédiger ou de réciter un poème. La mère de Ying-tai décide alors de l’envoyer au collège Sung Yee afin de parfaire son éducation, pendant trois ans, mais pour ce faire, la fille doit se travestir en garçon pour apprendre dans ce collège non-mixte. Après avoir été reçue par la directrice de l’école, elle rejoint la bibliothèque, où elle s’apprête à dormir mais elle fait la rencontre du jeune Liang Shan-po qui ignore que Ying-tai est une fille…

En Chine, la romance de Liang Shanbo et de Zhu Yungtain, soit les Amants Papillons, est très connue et très répandue. Des opéras, des films. Et pour le public occidental, il est très facile de se laisser prendre par cette intrigue, puisque chez nous, on pourrait dire que Les Amants Papillons, c’est un peu Roméo et Juliette. Un amour impossible entre deux personnages issus de background bien différent, Zhu venant d’une famille riche et Liang d’une famille beaucoup moins aisée, et surtout, l’issue tragique du récit est un peu la même dans les deux cas. Hong Kong n’a pas attendus longtemps avant de se lancer dans une première adaptation en 1963, The Love Eterne, mais ne l’ayant pas vu, je ne me prononcerais pas sur ses qualités cinématographiques ou sa fidélité avec l’histoire de base. En 1994, c’est au tour de Tsui Hark de livrer sa vision de cette histoire, en changeant quelques éléments, et en recentrant l’intrigue sur une période plus courte. De même, il change clairement quelques petits éléments dans la relation naissante entre les deux amoureux. Si normalement, Liang ne réalise pas avant un très long moment de la nature de Zhu, son adaptation lui ouvrira les yeux beaucoup plus rapidement, car impossible de rendre le propos réaliste et crédible en étirant la narration du film le long d’un cursus scolaire entier, soit trois ans. L’intégralité du film se tiendra donc sur six mois. Originalement, Liang ne découvre la vraie nature de sa promise que bien après, lorsqu’ils se retrouvent des mois après l’école. Dans le même ordre d’idée, Tsui Hark décide de vieillir ses personnages, dans l’histoire original, ils étaient bien plus jeunes lorsque tout commence, ce qui pourrait également poser quelques soucis de continuité, et surtout, de réalisme encore une fois, puisque c’est là que le corps subit le plus de transformation. Mais Tsui Hark reste fidèle à l’ambiance, à l’intrigue générale et à son cheminement, pour livrer ce qui est sans doute son plus beau film, et même en apparence son plus simple.

Car nous sommes en 1994, et Tsui Hark, lors de ses années-là, enchaînant les opus d’Il était une fois en Chine, et s’apprêtait à lancer l’année suivante l’épuisant The Blade. Avec The Lovers, il adapte sa mise en scène à son sujet, et ose donc le plus souvent poser sa caméra, filmer en toute simplicité cette relation naissance, entre humour parfois bon enfant mais fonctionnant admirablement bien, romance loin d’être niaise et noirceur lors du dernier tiers. On est plus proche du Tsui Hark de Green Snake, autant dans l’imagerie que pour le côté romantique, les serpents kitch en moins. L’auteur semble en tout cas totalement à l’aise, et a surtout extrêmement bien choisis son casting, puisque le film repose énormément sur l’épaule de ses deux comédiens principaux. Charlie Yeung donc, époustouflante à l’écran, et seulement dans son troisième rôle au cinéma, après de rapides rôles dans Future Cops et Les Cendres du Temps, est pour beaucoup dans la réussite du métrage, parvenant à donner à son personnage un côté fragile et un peu gaffeur, sans pour autant en faire des tonnes, et elle est immédiatement attachante. Face à elle, Nicky Wu, convaincant également, et à la carrière malheureusement assez courte, même si les deux acteurs se retrouveront de nouveau ensemble dès l’année suivante, toujours devant la caméra de Tsui Hark pour Dans la Nuit des Temps. D’ailleurs, la première force du métrage est de se focaliser quasi intégralement sur les deux acteurs et donc leur futur couple pour rendre l’ensemble prenant et parfois même touchant. Les autres personnages ne sont au départ que secondaires, autant dans l’école avec les rares échanges avec les autres camarades de classe, que lors de l’ouverture dans la famille de notre héroïne. Ce n’est finalement que lors du dernier acte que ces personnages secondaires ne prennent de l’importance, apportant alors la noirceur au sein du récit, son côté fataliste.

Pour les parents, on reconnaîtra aisément deux grands noms du cinéma HK, avec Elvis Tsui qui enchaînait les tournages à l’époque et pas toujours bien habillé (Sex and Zen, Royal Tramp, L’Auberge du Dragon, Butterfly and Sword, A Chinese Torture Chamber, Viva Erotica) et Carrie Ng (Dragon from Russia, Angel Terminators, Sex and Zen). Mais voilà, autant la partie plus légère qui fait office d’ouverture, avec l’amitié naissante entre nos personnages après leur rencontre, que la partie plus ouvertement romantique par la suite, ou la partie finale, chaque partie fonctionne bien, Tsui Hark soigne l’ensemble, laisse ses acteurs s’exprimer, et la relative légèreté de toute la première partie ne fait que renforcer finalement le côté tragique de ce qui suit, et donc rend cette romance crédible à l’écran, là où il aurait été très facile de verser dans la niaiserie la plus totale. Non, ici, on a une œuvre dont l’humour ne plaira peut-être pas à tout le monde, mais qui se fait néanmoins plus subtile que d’autres métrages du genre de la même période. Sans doute aussi car autour de nos deux tourtereaux, l’ensemble est extrêmement soigné, que ce soit dans les décors et costumes d’époques, ou dans l’éclairage justement qui renvoie directement finalement au Green Snake de l’année précédente, avec des jeux de couleurs parfois identiques. Sans oublier la musique, souvent très jolie. Hark prouve qu’il peut donc être un grand romantique lui aussi, et ça tombe bien puisqu’au final, c’est clairement cette partie là de sa carrière que je préfère.

Les plus

Charlie Yeung et Nicky Wu, crédibles et attachants
Une belle mise en scène
Un côté touchant et tragique sur la fin
La légèreté du début fonctionne

Les moins

Un humour pas pour tout le monde

En bref : Tsui Hark signe un film plus simple, plus posé, et laisse ses personnages se développer à l’écran. Il se dégage une certaine tendresse de la première partie, tandis que la seconde partie, plus tragique, fonctionne très bien aussi.

A FEW WORDS IN ENGLISH
THE GOOD THE BAD
♥ Charlie Yeung and Nicky Wu, lovely couple
♥ Beautiful filmmaking
♥ A tragic and touching story near the end
♥ It starts with a very light tone, and it works
⊗ The humour is definitely not for everyone
Tsui Hark delivers a simple film, slow, he leaves the characters develop themselves on screen. The first part is kinda touching and tender, and the second part is more tragic but works too.

7 réflexions sur « THE LOVERS (梁祝) de Tsui Hark (1994) »

  1. La mise en images à l’air splendide. C’est clair, on est bien dans la grande époque de Tsui Hark. Très envie de le voir aussi celui-ci.

    1. Voilà, toi, grand fan de Tsui Hark, je te le conseille vivement. Un de mes préférés avec GREEN SNAKE, deux de ses films romantiques et donc assez éloignés de son style fou de manière générale. Et deux films de la première moitié des années 90, vraiment une grande période donc, avant qu’il ne tente la pas glorieuse période US et ne revienne après avec TIME AND TIDE (et le catastrophique BLACK MASK 2, que je me refuse à revoir un jour, même pour écrire dessus, c’est juste mort).

      1. J’ai « Black Mask 2 » en DVD, acheté en solderie sur la foi du réal. Depuis que je sais que c’est une bouse, je n’ose même pas enlever le blister. Je crois qu’il va prendre la poussière encore un long moment.
        A quand une édition de « The Blade » digne de celle de « Time and Tide » ! ?

        1. BLACK MASK 2 est souvent considéré, même parmi les plus gros fans du réalisateur, comme son pire film, ou un des pires en tout cas. Un calvaire difficile à finir, un métrage assez incompréhensible dans le fond.
          Possible que THE BLADE, comme d’autres, arrive un jour. SEVEN SWORDS est donc enfin sorti chez l’éditeur Spectrum (apparemment, très belle édition donc), et je sais qu’ils comptent aussi sortir SHANGHAI BLUES (dont j’ai l’édition dvd depuis des années, mais toujours pas vu).

          1. Seven swords en effet, à un prix maousse. Je l’ai récupéré sur Arte, ainsi que quelques King Hu (notamment « Raining in the mountain) programmés pour un thème asiatique.
            Shanghai Blues, ça doit être très bon aussi.

            1. Certes, mais après c’est aussi blindé de bonus, tu as aussi un livre et une BD dans le coffret. Après moi je ne suis pas assez fan pour me laisser tenter (contrairement au coffret SASORI qui sort chez Le Chat qui Fume dans les prochains jours). King Hu au final je n’en ai quasi pas vu, c’est un truc qu’il faudra que je rattrape clairement un jour.
              SHANGHAI BLUES a excellente réputation, tout comme PEKIN OPERA BLUES, que j’ai aussi d’ailleurs. Meilleure réputation que les deux derniers Tsui Hark, films coréalisés et films de propagande Chinoise qui durent 3 heures chacun.

              1. Il se fait vieux notre Tsui Hark, et après les Détective Dee, il se fond dans le régime.
                Il aurait pu prendre exemple sur son modèle King Hu qui lui s’était barré à Taipei.

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