LA ROSE DE FER de Jean Rollin (1973)

LA ROSE DE FER

Titre original : La Rose de Fer
1973 – France
Genre : Fantastique
Durée : 1h26
Réalisation : Jean Rollin
Musique : Pierre Raph
Scénario : Jean Rollin et Maurice Lemaître

Avec Françoise Pascal, Hughes Quester, Natalie Perrey et Mireille Dargent

Synopsis : Lors d’un mariage, deux jeunes gens sont attirés par leur regards, lui, poète rencontre la jeune fille de ses rêves. Elle est belle et innocente. Lui est un jeune poète à l’esprit de Bohême. Il récite un poème et ils se retrouvent ensuite dans le jardin d’une grande maison où a lieu ce mariage. Les amoureux se donnent rendez-vous un dimanche matin pour faire du vélo dans une gare de marchandises et finissent leur randonnée dans un cimetière où le jeune homme y tire son inspiration dans le silence. Entre deux poèmes ils courent à travers les tombes. Ils s’embrassent et finissent par descendre à l’intérieur d’une tombe où ils vivent pleinement leurs passions. La nuit les surprend en sortant du caveau. Les malheureux n’arrivent plus à trouver la sortie. Ils sont fascinés par ce lieu de mort mais deviennent peu à peu déments, pensant qu’ils ne trouveront jamais la sortie et que cette nuit sera éternelle.

En seulement quatre ans, Jean Rollin aura réalisé quatre films, sur des vampires. Il tombe alors sur le cimetière d’Amiens en Picardie, et en tombe amoureux. Il écrit alors une courte nouvelle, puis l’adapte en scénario. Le concept est simple : une nuit, un lieu, deux personnages. Un homme rencontre une jolie jeune femme lors d’un repas de mariage, et tombe amoureux immédiatement. Il lui propose un rendez-vous le jour suivant. Commence alors une journée en amoureux, à se balader, avant que les deux tourtereaux n’arrivent dans le fameux cimetière. Ils s’y retrouvent enfermés une fois la nuit tombée. Commence alors le film, le vrai film de Jean Rollin, une nuit d’errance poétique au milieu des tombes, des caveaux, des squelettes, de la mort et donc, par extension, de la vie. Beaucoup considèrent La Rose de Fer comme étant le film le plus personnel de Jean Rollin, et également comme étant son meilleur film, son chef d’œuvre. Difficile de ne pas leur donner raison, et ce dès la sublime scène d’ouverture, où l’on découvre Françoise Pascal sur une plage bien connue des fans de Rollin, caressant une rose de fer déposée là par les vagues, le tout sur une musique douce et poétique de Pierre Raph. Les moments suivants, servant à mettre en place les deux personnages principaux, s’avèrent pourtant moins prenant, mais toujours poétique, notamment grâce au hasard, puisqu’en se levant un matin pour tourner dans une gare abandonnée, l’équipe trouvera une épaisse brume sur les lieux. Brume donnant un aspect surréaliste, poétique, coupé du temps. Nos personnages évoluent, coupés du monde, coupés du temps, et se retrouvent alors dans le cimetière.

Avant même la tombée de la nuit, Jean Rollin filme son cimetière comme un personnage à part entière, et le peuple de quelques personnages, humains eux, mais forts étranges, à l’image de ce petit bossu (joué par Rollin lui-même), ou ce clown venant poser des fleurs sur une tombe ornée de chapeaux… de clowns. Si l’image du clown est souvent présente dans l’univers de Rollin (les deux personnages fuient dans Requiem pour un Vampire en étant maquillés en clowns, le clown est le gardien dans Les Démoniaques l’année suivante), il lui donne ici une signification poétique totalement surréaliste, et réussie. Si l’on pourra toujours pester contre certains dialogues prononcés de façon théâtrale et bien trop distante, à la tombée de la nuit, le film prend alors son envol. Jean Rollin soigne sa mise en scène comme jamais, livrant à chaque plan un véritable tableau, une peinture agréable à l’œil. Les déambulations de ces deux personnages principaux, en proie à la folie, si elle se fait extrêmement lente, ne semble pas longue. Car outre sa mise en scène travaillée, sa photographie magnifique, son décor très bien trouvé, Rollin a un autre atout dans sa poche. Deux autres même finalement. Le premier, ce sera l’actrice Françoise Pascal, totalement investie dans son rôle.

Toujours dans le bon ton, la jeune actrice semble totalement habitée par son personnage. Le peu de lignes de dialogues à sa disposition mettront en avant le côté poétique de son basculement dans la folie, inversant ainsi son rôle avec celui de son petit ami. La peur pour ces lieux gagnera l’homme, tandis que la femme sera comme fascinée, voir possédée. Encore aujourd’hui, la jeune femme garde un excellent souvenir de ce tournage, de cette expérience, et de son travail avec Jean Rollin, parvenant même à rire des conditions de travail (un tournage principalement de 18h à 6h du matin, une scène nue sur la plage avec une température glaciale). L’autre atout est son scénario, puisque Rollin, même si son scénario tient en quelques lignes, soigne la narration de celui-ci, et surtout place au bon moment des instants plutôt magiques, comme la chute dans la fosse où les personnages se retrouvent au milieu des squelettes, ou la danse de Françoise Pascal dans les allées. Ou tout simplement justement ces quelques instants imagés où l’actrice déambule nue sur la plage. La Rose de Fer regorge de moments poétiques de cet acabit, jusqu’à ce final surprenant. Le scénario, en allant à l’essentiel sans chercher à expliquer quoi que ce soit (le personnage devient-il fou ? Est-elle possédée par un esprit ?), y trouve sa plus grande force. Sans doute l’un des meilleurs films de son auteur.

Les plus

Une ambiance poétique prenante
Des plans magnifiques
Françoise Pascal
Un propos intéressant qui n’en fait pas trop

Les moins

Quelques défauts dans le son

En bref : Rollin signe un film pour se faire plaisir, et livre un moment poétique très réussi. Lent, poétique, anti commercial, La Rose de Fer est un de ses meilleurs films.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *