LOVE & PEACE (ラブ&ピース) de Sono Sion (2015)

LOVE & PEACE

Titre original : Rabu & Pisu – ラブ&ピース
2015 – Japon
Genre : Comédie
Durée : 1h57
Réalisation : Sono Sion
Musique : –
Scénario : Sono Sion
Avec Hasegawa Hiroki, Aso Kumiko, Shibukawa Kiyohiko, Okuno Eita, Makitasupôtsu, Fukami Motoki et Tezuka Tôru

Synopsis : Été 2015 à Tokyo. Ryoichi rêvait de devenir une rockstar quand il était plus jeune, mais est à présent un salaryman timide dans une compagnie de musique. Il est la victime des moqueries de ses camarades, et est secrètement amoureux de Yuko avec qui il travaille. Il achète un jour une tortue, qu’il appelle Pikadon. Suite à une blague, il jette la tortue dans les toilettes. Pikadon va atterrir dans les égouts dans un refuge tenu par un grand père qui donne la parole à tous les animaux et jouets dont les propriétaires se sont débarrassés.

Difficile de savoir comment aborder une nouvelle œuvre de Sono Sion en 2015, tant il semble que le réalisateur, ayant enfin la notoriété qu’il méritait, prend la même voie que celle de Miike, à savoir tourner un nombre de projet incalculable par an, alternant commercial et personnel, et donc forcément, du bon et du moins bon. En tournant plus de six projets en un an, ils ne peuvent pas tous être bons. En 2015 donc, nous avions eu l’intéressant Tag, qui bien qu’inabouti par certains aspects, restait un beau projet, et à côté, la bouffonnerie The Virgin Psychics, adaptation de sa série Minna Esper Dayo (catastrophique), ou encore The Shinjuku Swan, qui ne bénéficie absolument pas d’une bonne réputation (apparemment, son pire film de l’année, produit sans âme et même un peu filmé n’importe comment). Love & Peace lui bénéficie de très bons échos. Et à la manière de Why Don’t You Play in Hell ?, un projet que Sono Sion a dans sa veste depuis plus de 20 ans. Ici, il est question d’un raté rêvant de devenir une star du rock, d’une tortue devenant géante et détruisant Tokyo à la manière de Godzilla, et de jouets ayant la parole façon Toy Story. Un mélange assez étrange mais qui peut le faire après tout. Ce n’est pas comme si le chef d’œuvre de Sono Sion, Love Exposure, ne mélangeait pas déjà les genres et les ruptures de tons. Et pourtant, Love & Peace m’a déçu. Il reste clairement un film sympathique, mais dont les quelques changements de tons nous font souvent regretter la partie précédente du métrage.

Car la première demi-heure, contre toute attente, est excellente, et très encrée dans le cinéma de son auteur. On y suit un looser, joué par Hasegawa Hiroki, tout en surjeu comme dans Why Don’t You Play in Hell ? Timide, faisant des grimaces, amoureux de sa collègue, maltraité par les autres, rêvant de créer un groupe de rock pour conquérir le stade, il a tout du looser en marge de la société comme Sono Sion les aime, et il s’avère plutôt attachant. Il se trouve rapidement son meilleur ami en achetant une tortue, et va l’appeler Pikadon, ce qui sera un des quiproquo du film, puisque Pikadon représente la bombe atomique. Cette tortue va lui donner espoir, il va l’amener partout avec lui. Il fera même des jeux de plateau avec sa tortue. Sono Sion n’en fait pourtant pas trop (Hasegawa Hiroki s’en charge), son métrage est amusant, son personnage attachant, la tortue toute mignonne. Mais rapidement, à cause des moqueries de ses collègues, il se débarrasse de la statue et va vite mal le vivre. Mais grâce à sa tortue, recueillie par un grand père qui donne la parole aux jouets et animaux non désirés par leurs maîtres, notre héros va petit à petit obtenir ce qu’il veut. Car la tortue tout mignonne va pouvoir exaucer ces vœux, et grandir à chaque vœu. Là on se dit que ça va être du bon, 2 heures de bonheur si le métrage continue dans cette direction, drôle et tout.

Sauf que non, car passé le début de l’ascension du personnage principal, Sono Sion change quelque peu le ton de son métrage, et nous fait regretter la première partie. Son looser sympathique devient rock star égoïste et détestable, un gros connard donc, la tortue grandie mais pas trop non plus, et le réalisateur lui se concentre avant tout sur ses jouets qui ont la parole, décidant donc de nous livrer pendant quasi une heure son Toy Story. Oui, Love & Peace, c’est souvent Toy Story 3 en live, des jouets tristes, abandonnés, qui ne souhaitent qu’une chose, retourner chez leur propriétaire, ou du moins être aimés de nouveau. L’humour laisse donc place à l’émotion, les effets spéciaux sont tous à l’ancienne (des marionnettes donc), mais l’ensemble a eu du mal à fonctionner pour moi. Non pas car ce que Sono Sion propose est mauvais, mais parce qu’il le contre balance avec son histoire de rock star égoïste que l’on veut détester, au lieu de garder son personnage attachant et drôle du début. Il tente bien de relier le film avec son œuvre via la musique (on reconnaîtra le thème de Noriko’s Dinner Table, une chanson de Why Don’t You Play in Hell ?, un thème de Strange Circus, d’autres de Cold Fish), mais n’est-ce pas plutôt de l’auto référence pour faire plaisir au fan ? Et la tortue géante dans tout ça donc ?

Finalement, il faut attendre la dernière partie du métrage, ou plutôt ses 15 dernières minutes pour avoir droit à du Kaiju Eiga. Ce qui est assez surprenant sachant que cet aspect fut relativement mis en avant. La tortue géante arrivera réellement 15 minutes avant la fin donc, pour une seule et unique scène de destruction. Qui finalement, n’est même pas si utile que ça à l’intrigue, sauf dans ces derniers instants (qui ne sont pas de la destruction). On a l’impression que Sono Sion a surtout voulu se faire plaisir avec cette scène. Et il faut dire que oui, elle est amusante, et voir cette scène purement réalisée à l’ancienne (avec maquette, inserts de tortue en animatronic), ça fait plaisir, ça fait sourire. Puis Pikadon au final, n’est-elle pas le personnage le plus attachant du métrage, une tortue qui ne pense qu’au bonheur de son maître, qui n’a pas des besoins humains et donc reste toujours fidèle à sa nature ? Ben moi je vous dis que si ! Dommage franchement que le film dans son ensemble ne garde pas la légèreté du début. Love & Peace n’est donc pas un chef d’œuvre, mais c’est clairement moins lourd et vulgaire qu’un Tokyo Tribe, plus posé qu’un Tag, moins con et répétitif qu’un The Virgin Psychics, et en soit, c’est déjà bien.

Les plus

La première demi-heure, fun

La scène de Kaiju Eiga

Les moins

Un personnage qui devient vite énervant

Un long milieu façon Toy Story

 

En bref : Love & Peace souffle le chaud et le froid. Il commence de manière amusante et très fun, puis devient plus sérieux et veut jouer sur l’émotion. Ironiquement, son personnage le plus attachant du début à la fin sera sa tortue…

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